Le secrétaire général adjoint de l’Association des écoles privées agréées du Mali (AEPAM), Magansiré Diakité a animé, le samedi 21 octobre, dans l’enceinte du LTPAD, un point de presse afin d’expliquer les difficultés qui assaillent les promoteurs d’établissements privés. Pour la circonstance, il était entouré de plusieurs cadres de l’association.
A l’entame de ses propos, le conférencier a rappelé que le vendredi 29 septembre 2023, le ministre de l’Education nationale, lors d’une rencontre tenue dans la salle de réunion du cabinet, avait annoncé que la rentrée scolaire 2023-2024 a été fixée au 2 octobre 2023. Et d’ajouter que les promoteurs ont fait savoir à la tutelle que malgré le contexte très difficile, eu égard au retard des paiements au titre des années scolaires 2021-2022 et 2022-2023, ils reprendront les activités pédagogiques avec les moyens de bord.
A l’en croire, le jour même de la reprise, à travers la lettre n°2023-0045/MEF-DGI, de nouvelles conditions sont fixées pour tout paiement en direction des établissements privés, y compris ceux destinés aux élèves notamment les frais scolaires pour soutenir la gratuité de l’enseignement public ; la demi-bourse pour l’équipement des élèves, les activités culturelles et sportives ; la gratuité de voyage au bénéfice de certains élèves ; les frais de stage pour les élèves de l’enseignement technique et professionnelle en classe de terminale ; la pension alimentaire pour les élèves de l’agro pastoral. A ses dires, les nouvelles dispositions ont conditionné le paiement de chacune de ces dépenses publiques à la reconnaissance des arriérés des dettes fiscales, condition de l’obtention du quitus fiscal. Avant de marteler que la finalité est la mise en recouvrement par le Trésor public (avis à tiers détenteurs).
L’imposition des dépenses publiques est inappropriée
Pour lui, la soumission de chacune de ces dépenses publiques à l’impôt est inappropriée, puisque toutes ces dépenses sont la conséquence directe du principe de la gratuité de l’enseignement public comme stipule l’article 11 de notre Constitution. Alors que, dit-il, un moratoire avait été obtenu le 26 avril 2016, suite à une crise similaire, suivi de la création d’un cadre de concertation par la décision n°0145/MEF-SG du 6 juillet 2016.
Pour le conférencier, suite à la lettre n°2022-021/DRCF-KKRO du 5 septembre 2022, a imposé la production des pièces fiscales pour toutes dépenses publiques en direction des écoles, car pour lui l’activité est commerciale. “Cette idée a été généralisée par la lettre n°2023-0001/MEF-DNCF du 5 janvier 2023, qui exige le quitus fiscal comme pièce essentielle pour tout paiement. Or le quitus est la preuve de l’acquittement des impôts qui eux-mêmes restaient à déterminer au sein du cadre”, ajoute-t-il.
A l’entendre, cet état de fait a suscité la vive réaction des promoteurs, concrétisée par un arrêt de travail de 120 heures. Ainsi, une rencontre initiée par le ministère de l’Education nationale autour du sujet a abouti à un compromis et renvoyé les discussions de fond au sein du cadre de concertation, autrement recomposé mais avec la même mission suivant la décision n°2023-00010/MEF-SG du 10 février 2023 ; à savoir : examiner les problèmes fiscaux des établissements privés et de faire des propositions au ministre chargé des finances ; étudier les questions liées au paiement des frais de scolarité et des bourses aux établissements privés ayant accueilli des élèves sur ordre du ministère de l’éducation nationale ; examiner les questions liées à l’harmonisation et à la revalorisation des coûts de formation public/privé.Conformément à la mission du cadre, déplore-t-il, l’AEPAM a fait une proposition qui reste pour l’instant sans suite.
“Au regard de tout ce qui précède, si les paiements ne s’effectuent pas avant la fin du mois d’octobre à cause du quitus et de l’ATD (avis à tiers détenteurs), les établissements privés ne seront plus en mesure de poursuivre l’activité pédagogique”, fait remarquer le conférencier.
Conditions de la délivrance du quitus varient en fonction des centres d’impôts
Il indique que son organisation constate que les conditions de la délivrance du quitus variaient en fonction des centres d’impôts : de 200 000 F à Kita et plus du million à Mopti. Et d’ajouter que c’est l’occasion d’attirer l’attention de l’opinion nationale en général et celle des autorités en particulier sur l’imminence d’une crise qu’on peut éviter.
Afin de sortir de cette crise, le conférencier déclare que la solution n’est pas fiscale. Car, selon lui, elle réside dans une analyse objective du problème a conclu que la solution ne peut pas être fiscale parce que l’enseignement au Mali relève de la catégorie des services publics (article 2 de la loi s’exerce à travers l’accès à l’éducation d’orientation sur l’éducation).
Il poursuivra que ce service public est garanti à chaque citoyen à travers la fréquentation des établissements d’enseignement publics ou privés parce que l’Etat s’est déjà engagé depuis des décennies à subventionner certains établissements privés, il ne peut dès lors soumettre d’autres à l’impôt.
De son point de vue, les établissements privés sont par rapport à l’Etat dans une situation statutaire et non contractuelle et le contentieux de l’enseignement ne relève pas du tribunal de commerce.
Il ajoutera que la loi d’orientation est très explicite qui mentionne que le service public de l’enseignement est indistinctement dispensé dans les établissements publics ou privés.
“Cette qualification de service public à elle seule suffit pour écarter toute possibilité d’imposition. Elle requiert par conséquent pour sa mise en œuvre des fonds publics non susceptibles d’imposition pour les établissements publics, on parlera de dotation budgétaire, pour les établissements privés, la dépense publique s’appelle subvention ou frais de scolarité”, précise-t-il.
Création d’un fonds d’équipement des écoles du Mali
Afin de sortir de cette crise, l’AEPAM propose la création d’un fonds d’équipement des écoles du Mali pour améliorer le plateau technique de toutes les écoles du Mali (publiques comme privées) qui est généralement très en deçà des normes admises en matière d’équipements (laboratoires, salles spécialisées, etc.)
Ce fonds, dit-il, serait alimenté par une redevance annuelle payée par chaque établissement privé, laïc comme confessionnel, du préscolaire au supérieur.
Ce fonds aura une double mission notamment il servira à équiper les écoles publiques et à constituer un fonds de garantie pour les établissements privés dans le cadre de leurs demandes de prêts pour supporter leurs besoins d’équipements.
A l’en croire, la proposition ainsi formulée a été soumise, conformément à l’article 3 du cadre de concertation entre l’Etat et les promoteurs privés, au Ministre de l’Economie et des Finances lors de la troisième rencontre du cadre. “L’AEPAM à ce jour attend avec impatience le sort réservé par Monsieur le Ministre à cette proposition”, conclut-il.
Boubacar Païtao