Alors que les candidats attendaient avec impatience la publication des résultats du concours d’entrée à l’Ecole Normale d’Administration, le Directeur Général de cette école, M. Amadou Keita, a démissionné à la grande surprise. Il observe depuis un silence pour des raisons qui lui appartiennent, mais assez intriguant en alimenter la polémique et de nombreuses interrogations quant à la sincérité des résultats du concours. C’est ainsi que le ministre Amadou Koita, lors de sa traditionnelle conférence de presse, a fait des révélations sur une conversation qui s’est tenue entre l’ex-DG de l’ENA et le Premier ministre Soumeylou Boubeye Maiga à la veille de sa démission. L’homme, qui s’est imposé un silence de cimetière, est finalement sorti de sa réserve pour recadrer le sujet en apportant le démenti à tout ce que le ministre porte-parole du gouvernement a confié aux journalistes. Comme quoi, la démission de ce cadre qui a montré ses preuves à la Faculté des Sciences Juridique risque d’alimenter longtemps la toile.
Dans cette lettre, il explique en effet pourquoi les coulisses de ces deux entretiens avec la primature, dont l’ENA est directement rattaché. « Je m’étais volontairement imposé une obligation de réserve. J’avais décidé cela en raison du climat délétère dans notre pays. Notre pays vit une situation sociopolitique très difficile. Je pensais qu’il ne fallait pas en rajouter avec des débats qui saperaient l’autorité et la crédibilité des institutions de l’Etat », a-t-il mentionné, avant d’ajouter que c’est la sortie du porte-parole du Gouvernement, relayée par la presse et les réseaux sociaux, qui le contraint à rompre le silence en vue de recadrer les « révélations» faites, dire les choses avec exactitude et «apporter un démenti aux contrevérités qu’il a proférées». Le Directeur démissionnaire de l’Ena s’inscrit par exemple en faux contre les allégations selon lesquelles il s’apprêtais à publier un résultat non sincère » et signale au passage que les concours d’entrée à cette école sont organisés sous la supervision d’un jury indépendant chargé de la correction des épreuves et de la proclamation des résultats. C’est ce même jury, poursuit-il, qui statue sur les notes, recense l’existence les notes éliminatoires et les copies devant faire l’objet de troisième correction avant délibération et proclamation des résultats. Comme quoi, le Directeur général de l’ENA ne fait que publier des résultats proclamés par le jury, a-t-il précisé.
Quid des allégations du Ministre porte-parole faisant état d’un appel passé par le Premier ministre au Dg Keita, en présence de sa Directrice de Cabinet, pour lui exposer les renseignements en sa possession sur les résultats du concours ? Faux ! rétorque Amadou Keita, qui affirme à ce sujet que le Premier ministre ne lui a donné aucun renseignement, ni ne lui a demandé d’explication sur l’organisation du concours. « Ses premiers mots ont consisté à me dire qu’il a décidé d’annuler le concours de l’ENA parce qu’il détient des informations relatives à des versements d’argent à plusieurs niveaux. Quand je lui ai demandé si je peux prendre connaissance de ces informations, il m’a répondu que lui il les a et c’est suffisant», a-t-il détaillé, en ajoutant que son interlocuteur a promis par la même occasion d’aider à organiser un concours mieux sécurisé et s’est même engagé à lui faire parvenir une correspondance pour ce faire.
Et puisse qu’il s’agissait par ailleurs de tout dire, le démissionnaire a signifié à l’adresse du Ministre Koita avoir été convié à la Primature à une seconde réunion au cours de laquelle des assurances lui ont été données qu’il est personnellement hors de cause avec notamment des supplications pour revenir sur sa démission. « J’ai refusé et souhaité qu’une enquête soit diligentée pour faire la lumière sur les allégations qui ont été faites, afin de préserver la crédibilité du concours, comme tout le monde semble le vouloir », a mentionné le Dg, expliquant au passage qu’il lui semblait être en face d’une tentative de déresponsabilisation de sa personne. Et le Directeur général de déclamer l’interrogation suivante : « Un chef d’organisme personnalisé, ayant le sens de la responsabilité, peut-il accepter, en dehors des situations prévues par les textes, l’immixtion de l’autorité de tutelle dans le fonctionnement de son service alors qu’elle n’a pas prouvé qu’il a été défaillant et surtout si cette autorité a refusé de lui communiquer le moindre détail sur les informations dont elle avait dit qu’elle était en possession ? »
Dans sa lettre de démission, il dit en effet avoir signifié sans équivoque au Premier ministre son désaccord concernant une décision d’annulation du concours, alors que des preuves d’une fraude n’ont pas été produites et que les personnes impliquées n’ont pas été identifiées.
Amidou Keita