Un adage de chez nous affirme: «Dire bonjour à un affamé est concevable, mais lui demander s’il a bien dormi, c’est là où l’on se moque vraiment de lui !». Dire qu’au Mali les enfants vont à l’école, il n’ya là qu’une vérité. Mais lorsqu’on s’évertue à flatter sa bonne santé, il faut éviter une telle façon d’amuser la galerie.
Nul doute que l’Ecole Malienne, à l’image du pays tout entier, est en décadence véritable, et cela à tous les cycles d’enseignement. Ainsi, la déperdition scolaire qui a pris naissance dans la gestion calamiteuse de Moussa Traoré se poursuit encore aujourd’hui plus dangereusement. La baisse tendancielle des niveaux d’études n’est plus à démontrer.
Du primaire à l’université, la formation se fait de plus en plus au rabais. On ne parle plus le français dans les milieux scolaires quand bien même c’est la langue officielle en République du Mali.
A l’université, le français de la rue fait son petit bon homme de chemin. Dans ces conditions, les mémoires de fin de cycle sont de plus en plus la reproduction ou le plagiat de documents se rapportant aux thèmes choisis. Il ya deux ordres de faits coupables.
En premier lieu, les élèves arrivent à l’université dans l’essentiel des cas par des voies peu recommandables comme la fraude et la manipulation des notes. La seconde réalité qui porte atteinte à l’encadrement c’est que dans la plupart des cas, les encadreurs eux-mêmes ne sont pas à la hauteur. Cela ne fait l’ombre d’aucun doute pour tous ceux qui sont sur le terrain.
L’honorable député Bréhima Béridogo, interpellant le ministre de l’Education Amadou Touré en 2008, avait dit en substance: ’’A l’université du Mali, ce sont des enfants qui portent des bébés au dos’’. Cela explique plus clairement qu’au Mali il n’y a pas de formation adéquation des formateurs. La preuve de cette calamité qui touche l’école malienne c’est aussi le tripatouillage qui a lieu dans la conception et l’adoption des nouvelles méthodes d’enseignement mais aussi dans la formation des formateurs aux techniques «nouvelles» d’enseignement.
Peu d’enseignants savent pourquoi la nouvelle école fondamentale (NEF) et pourquoi son abandon inopiné seulement après trois ans de mise en application. Ce qui est à l’œuvre chez nous dans les établissements secondaires, depuis 2013, c’est la méthode d’enseignement en Approche Par Compétence (APC). Sans être dans l’espace scolaire, il est aisé de constater que c’est là une méthode parachutée sur la tête des formateurs quand bien même des semblants de séminaires de formation ont eu lieu dans des délais peu raisonnables (de trois à cinq jours) avec l’accent particulier sur les perdiems et non sur la qualité de la formation ; et qui dit que les formateurs des formateurs maîtrisent leur domaine ? Ce qui semble encore plus diabolique dans cette affaire, c’est que la ‘’nouvelle méthode’’ d’enseignement n’a vraisemblablement pas été précédée du diagnostic et de l’état des lieux de la méthode abandonnée. La seule certitude est et demeure que la méthode à l’abandon a formé les meilleurs cadres de ce pays. Qu’on n’aille donc pas raconter «la nécessité» d’adapter l’enseignement malien au contexte international !
– L’école malienne est soumise au diktat du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale (BM) depuis maintenant plusieurs décennies. La conséquence est patente et mérite pas qu’on s’y attarde longtemps.
– Peut-on causer dire, sans avoir mal à la conscience, que les conditions matérielles de l’application de l’APC sont réunies pour rendre notre système éducatif plus compétitif dans notre sous-région ouest africaine ? A le voir les programmes d’enseignement à l’université et leur inadéquation avec ceux en cours au secondaire.
– La politique de ‘’Un village, une école’’ (si ce n’est pas un slogan creux) entreprise par Alpha Oumar Konaré a vraiment conduit notre système éducatif au fiasco étant entendu qu’elle a fait rater la base de l’enseignement.
– La méthode globale introduite dans le primaire au Mali n’était pas pour arranger les choses (heureusement la méthode syllabique est de retour dans nos écoles même si des générations entières sont déjà sacrifiées !)
– Les grèves intempestives qui ont marqué l’école sous Alpha ne pouvaient conduire à la bonne santé de ce système éducatif national. Ces grèves furent longtemps (et c’est toujours le cas selon bien d’acteurs de l’enseignement) entretenues par un fond de politique dans l’espace scolaire. Dans ces conditions, peut-on parler de bonne santé de l’école malienne ? Tout sauf cela !
– Est-il encore besoin de rappeler ici que les examens et leurs résultats sont au cœur du cafouillage monstre et insolite. L’œuvre patriotique de Mme Togola Jacqueline Marie Nana a été anéantie par la nomination de Kénékouo dit Barthélémy Togo, un homme qui avait élu domicile au département de l’Education sans y apporter le moindre changement véritable.
Rappelons qu’il avait fait treize ans au poste de secrétaire général dudit département. Les responsables de la pagaille au baccalauréat 2014, arrêtés par Mme le ministre Jacqueline Marie Nana, ont été automatiquement mis en liberté par Togo juste après sa nomination. Mais il ne pouvait en être autrement quand on sait que ceux qui avaient été relevés par Mme Jacqueline étaient du groupe du ministre rentrant. Quelle interprétation faut-il faire de cet acte ?
Allez voir dans les établissements secondaires les modèles de nomination des responsables. Finalement, il n’est pas exagéré de dire que pour mériter une quelconque nomination au département de l’Education (et cela est valable pour tous les autres départements de la République) il faut appartenir à l’ethnie du prince ou à sa formation politique, ou tout au moins être un courtisant de la famille du prince. Cela nous rappelle Corneille qui disait qu’«un homme fait sa cour où s’attache son cœur, même au chien du logis il s’efforce de plaire». C’est cela une autre manche de la problématique de la gestion de l’école malienne.
– La rocambolesque annulation des résultats du Bac 2017 à l’Académie d’enseignement de Koulikoro est la preuve suffisante qu’il n’y a pas le moindre souci de servir l’école malienne.
A la première proclamation des résultats, des candidats avaient été déclarés admis. Ils avaient pour cela déjà commencé à fêter leur succès. Mais c’était sans compter avec le tripatouillage qui n’est pas méconnu (le cas de 2005 à Sikasso est un exemple).
A la deuxième proclamation, bien de ces candidats ’’admis’’ ont été déclarés non admis. Mais les fauteurs ne sauraient s’inquiéter outre mesure tant il est établi qu’au Mali, les choses se passent toujours à l’envers : au lieu que le mérite soit récompensé et la faute sanctionnée, c’est bien la faute qui est récompensée par des nominations et le mérite sanctionné (quand on travail bien on reste toujours au bas de l’échelle).
– Et la rentrée scolaire 2017-2018 ? Comme tout le Mali l’a constaté, c’est par les ditons que les populations ont appris que pour le public la rentrée des classes, initialement fixée au lundi 2 octobre 2017, serait reportée au lundi 9. En tout cas, au moment où nous mettions sous presse, aucune déclaration officielle dans ce sens et à notre connaissance ne lève le moindre doute.
Selon les coulisses, l’Etat n’a pas été en mesure de ravitailler les établissements publics en matériels didactiques pour respecter la date de rentrée du 2 octobre. Mais on n’ose pas expliquer aux Maliens ce que les responsables du département de l’Education en rapport avec les financiers faisaient pendant les vacances qui s’achèvent.
Selon d’autres sources d’informations, deux groupes seraient formés pour gérer les orientations: l’un à Kita et l’autre à Sikasso. Il parait que c’est pour éviter les interférences dans le travail des commissions d’orientation. Mais il n’est pas invraisemblable que ce soit un besoin de perdiem de déplacement qui soit la cause véritable de la déconcentration de ces commissions d’orientation hors de Bamako. L’on rappelle que chaque membre de ces commissions déplacé aura droit à vingt-mille francs par jour (20 000F CFA/jour). Pendant ce temps, les vrais acteurs de l’enseignement que sont les enseignants n’ont toujours droit qu’à quatre- mille francs par jour (4000 F CFA/jour). On dit simplement que les responsables de l’Education, loin d’être au service de l’école malienne, celle-ci est et demeure leur vache à lait.
– Le colmatage dans la gestion des revendications syndicales est désormais le mode privilégié de gestion des affaires scolaires en République du Mali. Rappelons à ce niveau que pour limiter les dégâts de la grève de non évaluation des enseignants relevant des collectivités (ils sont aujourd’hui plus de 60% du total des enseignants en fonction), le département en charge de l’Etat a instruit aux chefs d’établissements publics d’organiser des cours de rémédiation dans leurs écoles et cela en mettant les fonctionnaires de l’Etat à profit pour un taux horaire de 2000 FCFA.
Les cours se sont étendus sur trois mois (mars, avril, mai). Mais selon bien d’informations, les enseignants n’ont pas toujours eu les fruits de leur labeur. Aux dernières nouvelles, ceux de la rive gauche de Bamako c’est maintenant chose faite.
Pour ce qui est de l’Académie d’enseignement de la rive droite, le régisseur n’étant pas parti récupérer à temps les dus des enseignants concernés, les fonds auraient été reversés au Trésor public sans autre forme de procès. Le régisseur au lieu d’être sanctionné pour cette faute, en sera très certainement récompensé.
Il faut simplement dire que depuis la chute du régime de Modibo Keïta, l’école malienne a entrepris sa descente aux enfers. Force est de reconnaître que Moussa Traoré vaut mieux que ces ‘’démocrates’’ qui nous gouvernent, depuis 1991, hélas !
En réalité, la santé de l’école malienne est au plus bas aujourd’hui. Mais il faut rappeler que ces ‘’démocrates’’ qui sont aujourd’hui la plaie de cette école ont été formés par l’argent du contribuable malien. C’est encore cet argent que lesdits ‘’démocrates’’ utilisent pour envoyer leurs enfants dans les somptueuses universités à travers le monde. Quel cambriolage organisé du bien public ?
En effet, il n’est plus un secret pour personne au Mali que la rentrée scolaire 2017-2018 enregistre incontestablement des ratés majeurs. A présent, il faut des hommes crédibles pour sauver le système éducatif malien de sa faillite chronique pour l’honneur et pour le bonheur du Mali.
Fodé KEITA
L’école malienne est comme toutes les autres écoles. Les maliens apprennent comme tous les autres. Le Mali va mal et l’école avec. Tout le monde se cherche. Dans un pays ou on cherche à manger, on ne peut pas faire une école performante. Les maliens sont dans un rêve.
Dans un pays ou l’imam du quartier est plus important que le médecin, on ne peut s’attendre à ce que les enfants puissent faire des opérations.
Avec peu de moyens on fait peu de choses. La vraie arme, la vraie armée est inévitablement le cerveau.
Ce qui m’a surtout fait mal, c’est une émission de RFI sur l’école Africaine la semaine passée. L’analyste de ce jour faisait des comparaisons sur l’assimilation des enfants africains à ceux des enfants d’ailleurs à travers les résultats de la méthodologie de formation scolaire appliquée. C’est la comparaison des élèves d’une classe primaire du Japon à ceux du Mali en les posant une même opération arithmétique, qui m’a surtout intéressée. Le taux de réussir de l’opération des Japonais est de 99% contre 7% pour les Maliens. On ne peut même pas parler de catastrophe ici. L’école malienne devait faire peau neuve depuis la reforme de 1968, tout juste après le coup d’état contre le Président Modibo KEÏTA. Nous étudions en français, langue étrangère que nous ne maitrisons pas, elle n’est pas notre langue maternelle. Nous voulons être bien formés comme dans les autres francophones, commençons à adopter leur système scolaire, qu’ils n’ont jamais abandonnés et que nous avons laissés au profit de la réforme de 1962. 10 ans de scolarité pour les autres au primaire (CP1, CP2-CE1, CE2-CM1, CM2 premier Cycle / 6ème, 5ème, 4ème, 3ème pour le second Cycle) contre 9 ans de scolarité pour l’école malienne (1ère année, 2ème, 3ème, 4ème, 5ème, 6ème / 7ème, 8ème, 9ème). Une année de perdu dans la formation d’un enfant est difficilement rattrapable. Sans compter les effets néfastes des 4 grandes influences sur l’enfant présentement et la démission des parents. Cette histoire d’école malienne est l’affaire de tout le monde. Car un pays avec l’éducation au rabais est un pays sans avenir certain. DU COURAGE POUR NOUS TOUS.
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