Pour se rendre à l’évidence de l’effectivité du Droit à l’éducation au Mali, la commission nationale des droits de l’homme a levé un coin de voile sur la question. C’était, au Centre Djoliba, à la faveur d’une conférence débat animée par Me Brahima Koné, président de l’Union Interafricaine des Droits de l’Homme. Il était entouré par Me Allassane Diallo, Conseiller au ministère de l’éducation et de Me Chaka Keita, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Mali comme modérateur.
Les participants ont débattu du problème de l’école malienne et sont arrivés à la conclusion selon laquelle, l’éducation au Mali est loin d’être effective : « L’école Malienne est malade pour ne pas dire en crise et chacun de nous doit œuvrer pour remédier à ce problème », a déclaré Chaka Keita, le modérateur de la conférence et non moins bâtonnier de l’ordre des avocats du Mali.
Les maux dont souffre l’école malienne sont d’ordre personnel et sont plutôt au détriment de la nation : mauvaise qualité des enseignants; non respect des engagements de l’Etat malien des traités et autres conventions internationales dont il est signataire; nombre limité d’instituts de formations professionnelles, non maîtrise de l’effectif des élèves etc.
Des enseignants n’ont pas le niveau intellectuel pour enseigner
« J’ai participé à un cours de la 6eme année en matière de biologie, et je vous assure que l’enseignant a passé plus d’une heure de temps en cherchant à expliquer aux enfants l’appareil digestif de l’homme. J’ai dû intervenir et les enfants ont compris en mois de 10 minutes» témoigne un participant à la conférence.
« Aujourd’hui, les enseignants viennent en attendant un autre job. Ils ne prennent pas leur travail au sérieux. Ils échangent des notes de classe avec de l’argent. Certaines institutrices se voient attribuer des promotions d’une année à une autre. Les directeurs de certaines écoles n’hésitent pas à amener une jeune fille institutrice du premier cycle au second à cause des rapports extra professionnels qu’elle entretien avec ce dernier. Auparavant, l’enseignant était le model de la cité » affirme une vieille enseignante.
Conséquences du fléau :
Taux net de scolarisation dans le primaire (pourcentage d’enfants âgés de 7 à 12 ans scolarisés) : 61%, soit 68% pour les garçons, 53.9% pour les filles) ;
Nombre d’enfants âgés de 7 a 12 ans non scolarisés 891 225 : dont 532 687 (60%) de filles et 358 538 (40%) de garçons ; Taux net de scolarisation dans le secondaire (pourcentage d’enfants âgés de 13 à 15 ans scolarisés) 7% (8.2% de garçons, et 5.8% de filles)
Pourcentage d’adultes au Mali sachant lire et écrire : 23%. Nombre d’enseignants par élèves (pour le primaire) 1 pour 51 en moyenne, ou 1 pour 64 dans les écoles publiques (excède parfois les 1 pour 100).
Si l’on comptabilise uniquement les enseignants ayant suivi une formation, 1 pour 105 en moyenne et 1 pour 81 dans les écoles publiques.
Nombre d’enseignants supplémentaires nécessaires pour assurer l’éducation primaire universelle : 27.250 enseignants, voire 45.350 enseignants si l’on compte ceux déjà en poste mais n’ayant suivi une formation.
« A la lumière de ces données, l’accès à l’éducation pour tous les enfants maliens d’ici à 2015, conformément aux OMD (Objectifs du Millénaire pour le Développement), demeure un rêve qui tarde à se concrétiser » a martelé le conférencier Me Brahima Koné, président de l’Union Interafricaine des Droits de l’Homme.
Selon le conseiller du ministre de l’éducation, Me Alassane Diallo, le gouvernement est en train de s’investir et le résultat ne tardera pas à venir.
En tout cas l’arbre ne cache pas la forêt. « L’Etat n’a pas les moyens de prendre en charge l’ensemble de ses élèves malgré les 252 millions investis rien que pour l’année 2011. Raison pour laquelle le Mali noue des partenariats avec les bailleurs de fonds lesquels exigent certaines conditions qui mettent le Mali dos au mur » a laissé entendre le représentant du ministère.
En tout cas, l’objectif de la conférence a été atteint. « La commission nationale des droits de l’homme veut voire réellement l’effectivité du droit de l’éducation au Mali et nous sommes édifiés sur le sujet » a conclu la présidente de la commission nationale des droits de l’homme, Mme Kadidia Sangaré Coulibaly.
Baba Ahmed