Dans ce paysage de gouvernance de Laji Burama, parsemé de divers scandales, s’il y a un département qui peut lever la tête, c’est bien celui de l’éducation nationale.
En effet, il y a quatre ans, l’école malienne était caractérisée par des grèves perlées dans le milieu enseignants et des sorties intempestives des élèves du secondaire. Les années scolaires étaient tronquées et les examens de fin d’année entachées d’irrégularités pour ne pas dire de fuites. Les écoles publiques étaient délaissées ou marginalisées au profit des écoles privées dont la plupart n’ont ni infrastructures adéquates, ni personnel enseignant qualifié. Ces écoles dont la plupart ne survivent que grâce aux frais de scolarité des élèves versés par le gouvernement. Même s’il n’y avait pas d’effectifs conséquents dans les lycées ou centres de formations étatiques, on orientait les élèves dans les structures privées. Certaines écoles privées, pour avoir la côte auprès des parents d’élèves naïfs, gonflaient les moyennes de classe. Ces moyennes comptant dans la moyenne d’admission à l’examen, il n’était pas rare de voir dans les établissements des notes ne reflétant pas la valeur réelle des apprenants. Bref, l’école comme à l’image de la société était transformée en un haut lieu de corruption.
On ne peut pas dire que tout ceci est dernière nous, mais le sillage ouvert par Madame Togola Jacqueline Nana et dans lequel s’est engouffré Kènèkuo Barthélémy Togo indique que nous sommes sur la bonne voie. Et que la persévérance dans l’effort du ministre et de son équipe, l’orientation et l’appui sans réserve de l’autorité suprême sont les gages d’un« retour aux valeurs du travail et au mérite » que le chef du département a souhaité, dans son message, à l’occasion de cette rentrée scolaire.
A chaque phase du développement d’un pays, l’autorité politique doit orienter le technicien. Ceci est surtout vital dans le domaine de l’éducation. C’est ainsi qu’est née la réforme de l’éducation de 1962. Cette réforme, à l’époque, a permis de réduire le temps d’apprentissage, le relèvement notable du taux de scolarisation etc.
Sous la 2ème république l’absence d’une orientation claire nous a poussés à tester des réformes toutes vouées à l’échec car fruits de réflexions venues d’ailleurs. La pratique a continué et continue encore sous la 3ème république.
La seule orientation politique que l’on peut relever sous la 3ème se résume en un slogan : « un village, une école ou un CED ». Cela a permis de booster la construction d’écoles. Aujourd’hui, il faut reconnaître qu’il existe très peu de villages de plus 500 habitants où il n’existe pas une structure d’apprentissage.
Le problème crucial de la lecture a été abordé.
Pourquoi le chef de l’Etat ne lancerait – il pas le slogan : « un élève, un livre pour le fondamental 1er cycle » ? Sachant qu’aujourd’hui les NTIC jouent un très grand rôle, pourquoi, le président ne dirait pas à son ministre : « un élève un ordinateur pour le 2ème cycle de l’enseignement fondamental et pour le secondaire ?»
Ces slogans sont des projets politiques dont la réalisation demande l’appui du président de la république. Rappelons que lorsque le président Félix Houphouët Boigny s’est rendu compte que les jeunes ivoiriens s’orientaient plutôt vers les études littéraires, il a relevé de façon substantielle la bourse des étudiants en sciences et des primes spéciales consistantes furent allouées aux professeurs des matières scientifiques. C’est ainsi qu’il a pompé des professeurs en sciences des pays francophones y compris la France vers son pays. En quelques années la tendance s’est inversée et aujourd’hui les scientifiques ivoiriens sont parmi les plus compétents en Afrique.
Concernant les langues nationales, nous citons le ministre :
« En matière de promotion et de valorisation des langues nationales, le Gouvernement a adopté, lors de sa session du Mercredi 14 septembre 2016, un projet de loi fixant les modalités de promotion et d’officialisation des langues nationales. Celui-ci s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la politique linguistique du Mali adoptée en décembre 2014. » C’est bien beau, le décret d’application est un acte éminemment politique qui dépasse le ministre et qui relève du président de la république. A quand ce décret ?
C’est dire que sans une orientation claire du politique, la bonne volonté et l’abnégation du technicien resteront vaines.
Malgré tous les clignotants en rouge, de cette gouvernance, remémorons-nous ce dicton de chez nous qui dit : « même si on ne veut pas du lièvre, il faut lui reconnaître ses longues oreilles ». Cet aphorisme pour reconnaître que dans le désastre de gouvernance sous laquelle nous vivons depuis trois ans, l’éducation nationale au moins sort la tête de l’eau et qu’elle est l’un des rares rayons lumineux qui éclairent cette obscure gouvernance.
Hamidou Ongoïba