Très rapidement un collectif regroupant les candidats au concours d’entrée à l’Ecole nationale d’administration (ENA) a vu le jour en début de semaine. En ligne de mire, les tentatives de tripatouillage des résultats du dernier concours. Ce collectif soutient l’ex-directeur de cette école, qui a jeté l’éponge la semaine dernière pour des raisons non encore précises. Mais déjà, des voix se lèvent pour dénoncer les pressions subies par l’ancien directeur de la part de personnes placées au-dessus de lui.
Impitoyables et opportunistes, des puissants perchés au sommet de l’appareil d’Etat ont réussi à faire partir le directeur de l’Ecole nationale d’administration, selon les membres du collectif. La lettre de démission du directeur n’est pas révélatrice de la pression que ses supérieurs exerçaient sur lui afin de faire passer leurs protégés au concours d’entrée dans l’ENA, une école qu’il voulait rendre élitiste.
En attendant que la vérité éclate au grand jour, on s’accorde à dire que l’ex-directeur de l’ENA a été victime d’un système de corruption bien huilé. Ce système est orchestré par des gens hauts placés dans le gouvernement et dans les institutions du pays. Ils ont des quotas dans chaque concours de recrutement dans la fonction publique de l’Etat et des collectivités. Le mécanisme est connu à travers les fameuses listes portant le nom d’un proche du président ou d’un ministre.
Celui qui ne fait pas leur affaire est viré simplement comme l’ex- directeur de l’ENA. Il est arrivé que ce népotisme soit dénoncé plusieurs fois en révélant le nom d’un député très influent du pays qui place ainsi ses fidèles. Même des recrutements sensibles comme ceux des soldats devant servir sous le drapeau national ont été affectés par cette pratique. D’ailleurs, plusieurs recrues de l’armée ayant succombé lors d’une formation militaire en 2017 étaient issus d’une de ces listes.
La même pratique est appliquée par d’autres personnes lors des concours d’entrée dans les écoles publiques secondaires spécialisées dans la formation professionnelle. Une série de personnalités bénéficie d’un quota favorable à des ministres, des directeurs de services et des chefs de programmes ou projets. On assiste également à un marchandage autour des postes à pourvoir dans ces établissements d’enseignement aboutissant généralement à un débouché rapide.
L’ENA n’échappe pas à ce marchandage chaque fois que le concours d’entrée est lancé par les autorités administratives. Certains candidats ou proches de candidats démarchent les administrateurs avec des millions de nos francs dans l’espoir de convaincre le directeur. En cas de refus, ce sont des menaces qui sont formulées contre lui.
En refusant ce népotisme des loups de la République, un fait devenu presque normal, l’ex-directeur de l’ENA s’est mis de nombreuses personnes sur le dos en haut lieu. Néanmoins, il est déjà entré dans l’histoire en devenant l’un des rares justes qui préfèrent « abdiquer» plutôt que transiger avec les principes de bonne moralité.
D.K