Face à la crise scolaire : Adam Dicko propose une réforme du système éducatif !

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La crise scolaire est plus qu’inquiétante au Mali. Frappée par des mouvements de grèves depuis presque une décennie, l’école malienne vit une crise difficile. La crise sanitaire n’est qu’un trompe œil dans cette crise scolaire. Mais les personnes douées d’intelligence ne se trompent pas de cause de la crise. Parmi elles, la présidente de l’Ajcad, qui estime que la crise sanitaire touche moins l’école malienne. Pour elle, la crise scolaire malienne est loin d’être fille de la crise sanitaire.

La crise scolaire ne cesse de faire couler de l’encre et de la salive, surtout en ce temps de coronavirus. Si presque tous les regards sont tournés vers la pandémie, celui de la présidente de l’Ajcad reste sur le système éducatif et la mauvaise gestion de l’école par les autorités.

C’est dans un entretien qu’elle a bien voulu nous accorder qu’Adam Dicko, présidente de l’Association des jeunes pour la citoyenneté active et la démocratie, partage son analyse sur la crise scolaire.

Selon la présidente Dicko, avant le coronavirus, notre école était déjà dans une crise chronique de par son système. Une crise de longue date, rappelle-t-elle.  Adam Dicko, d’ajouter que depuis plusieurs années, on essaye juste de sauver l’année scolaire et non l’école malienne. C’est cette mauvaise gestion qui a amené l’école à ce stade, affirme la présidente de l’Ajcad.

La présidente de l’Ajcad pointe du doigt accusateur sur l’Etat de n’avoir pas joué suffisamment son rôle.  « Le véritable acteur qui ne joue pas son rôle, c’est d’abord l’Etat », dénonce-t-elle. Mme Dicko de rappeler que « l’éducation est un droit pour tous les enfants maliens. Ce droit constitutionnel ne devrait pas être violable. Et le garant de ce droit, c’est l’Etat avec comme premier responsable le président de la République », indique-t-elle. Mais force est de constater aujourd’hui qu’au Mali tous les enfants n’ont pas accès à l’éducation. A titre d’exemple, au nord comme au centre, des écoles sont fermées depuis plus de cinq ans.

Aux dires de Adam Dicko, la grève des enseignants n’a impacté que des écoles de Bamako et les villes du sud, sinon celles des zones de conflits y étaient déjà fermées sous le silence coupable des autorités. Une fermeture qui l’inquiète. « Le problème est qu’au Mali nous n’avons plus un système égalitaire. Nous avons un système à Bamako où les gens partent à l’école. Tantôt il y a des grèves et au centre du Mali où les gens ne font plus d’école », note-t-elle.

« Même dans ces grandes villes où les classes sont toujours ouvertes, beaucoup d’enfants n’arrivent pas à aller à l’’école, faute d’infrastructures », regrette Adam Dicko. A Bamako, il n’est pas rare de voir des enfants retourner à la maison le jour de la rentrée des classes par manque de places, argumente Dicko. De surcroit, les classes sont bondées. Dans les classes de la 1ère, 2ème ou 3ème année, l’effectif varie le plus souvent entre 160 et 180 par classe. Ce qui pousse les enseignants à scinder les classes en double vacation, révèle-t-elle.

S’agissant du cas du Centre, Adam Dicko dénonce l’injustice et l’inégalité des chances. « On le souhaite, le jour où il y aura l’école au centre et au nord, est ce que les enfants qui étaient en troisième année vont toujours revenir dans la même classe », s’interroge-t-elle. Ces enfants peuvent aller en compétition avec ceux de Bamako et des autres villes qui poursuivaient leurs études ? Pour elle, l’Etat est en train d’installer un système d’inégalité entre les futurs cadres.

A cela s’ajoute le problème des enseignants qui devient de plus en plus récurrent. « Avant on assistait à des grèves orchestrées par les élèves, mais aujourd’hui on assiste beaucoup plus à des grèves des enseignants », déplore-t-elle.  Du coup la tendance a complètement changé. Pire, ce sont des grèves à longue durée (de 2 à 5 mois) et on veut que les enfants sortent avec du niveau. Ce n’est pas possible, martèle-t-elle.

En ce qui concerne le niveau supérieur, Adam Dicko constate avec amertume que les étudiants se réfèrent encore à d’anciens cahiers dans les universités. « Au niveau supérieur, on voit que notre système est archaïque. Les étudiants en première année Droit par exemple se réfèrent toujours aux anciens cahiers de 1999. Et que ce sont les mêmes cours, les mêmes notions », affirme-t-elle. A en croire Dicko, l’innovation n’est pas possible dans ces conditions.

Aussi, « il y a une inadaptation dans les universités entre ce qui est enseigné et le marché de l’emploi», ajoute la présidente de l’Ajcad. « Ce sont des choses qui doivent faire objet de réforme pour que notre système éducatif puisse répondre aux besoins de marché de l’emploi, aux besoins d’opportunité économique et sociale », propose-t-elle. Le système éducatif doit être reformé aujourd’hui, c’est une urgence, insiste-t-elle.

Pour ce faire, elle demande à l’Etat de prendre ses responsabilités. « Même si on doit aller vers une année blanche pour sauver l’école malienne, il faut le faire». Mieux, elle demande au gouvernement d’engager une consultation large autour de notre système éducatif. Pour, dit-elle, aller vers des réformes structurelles. Des réformes qui ne concernent pas qu’une minorité, mais celles qui prennent en compte notre système éducatif et sanitaire, a conclu Adam Dicko.

Oumar SANOGO

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