Enseignement Supérieur: La bouteille à l’encre

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Le navire de l’enseignement supérieur malien menace de faire naufrage depuis bientôt quelques années. Les problèmes qui y sévissent, attendent toujours de recevoir des remèdes et, curieusement, grandissent en ampleur. Le constat qui s’impose n’a rien de reluisant : le statu quo n’est pas excellent; il est mauvais, lamentable.

Il n’est plus de grande importance de rappeler que la décision de la fermeture des universités et des grandes écoles au cours de l’année 2010-2011, qui a conduit à une année blanche (sauf dans quelques facultés), obéissait plus à un besoin de remettre de l’ordre dans le calendrier de la rentrée universitaire et de mettre du coup toutes les structures au même diapason. Une année blanche que les étudiants, impuissants, ont vécue dans l’espoir de voir la situation virer. Aujourd’hui, il n’est en rien exagéré de dire qu’on est, finalement, loin du résultat escompté, car toujours est-il que les mêmes problèmes refont surface au même moment et menacent encore de perturber sérieusement l’année universitaire.

La question qui se pose est désormais la suivante : tous les acteurs du monde de l’enseignement sont-ils animés par une volonté de fer, manifeste, de soigner ce secteur indispensable dans le développement du pays ? Difficile de répondre par l’affirmative quand on sait que dans cette crise, deux parties particulières peuvent être renvoyées dos à dos : il s’agit des syndicats d’enseignants et du gouvernement, qui entretiennent aujourd’hui une relation, apparemment, des plus tendues. Ils sont même déjà entrés dans une phase qui ressemble plus à un dialogue de sourds où les syndicats brandissent leurs revendications non satisfaites_ augmentation des salaires, transposition des assistants docteurs dans le corps des maîtres assistants, renouvellement des administrations des universités, remboursement des cotisations versées à la canam au titre de l’AMO…_ face à un gouvernement qui reste convaincu que ce combat est déplacé, car arrive à un moment où la priorité est donnée à la reconquête des régions occupées du Nord du pays. Encore une fois, ce qui interpelle le plus, c’est que les positions n’évoluent pas et on image mal comment on pourrait s’en sortir sans un accord global entre les différentes parties.

A la périphérie de cette situation confuse, impossible à supporter davantage, dans certaines facultés les administrations et les comités Aeem croisent le fer. Le grief des comités Aeem tient au fait qu’à leurs yeux, les administrations n’ont pas sérieusement  traité les réclamations et donc doivent revoir les résultats définitifs ou bien organiser une nouvelle session de rattrapage. Cette situation est celle qui prévaut à l’université des sciences juridiques et politiques et celle des lettres et des sciences humaines, et empêche la tenue des inscriptions des nouveaux bacheliers désireux d’étudier le droit. En outre, à la faculté des sciences et des techniques, les étudiants se méfient du système L-M-D comme de la lèpre… Voici donc fait le tour de quelques problèmes, qui, en gros, ne datent pas d’aujourd’hui et dont la résurgence est interpellateur à bien des égards. Le fait est que, dans l’enseignement supérieur malien, plus lourd est désormais le sentiment que « les grands maux ne reçoivent jamais les grands remèdes », mais plutôt sont déplacés et, partant, peuvent remonter à la surface à tout moment.

C’est un monde qui semble ne pas occuper une grande place dans les préoccupations des plus hautes autorités qui, comme nombre de maliens, sont d’avis qu’il n’en vaut plus la peine. Ils n’ont pas tout à fait tort, car il reste évident que l’enseignement supérieur reste gagné à la perfidie, aux salopéries et autres fumisteries. Un monde où le bon sens a cédé la place. Autant dire que peu sont-ils à garder un reste d’espoir dans l’enseignement supérieur.

Ainsi, difficile d’accepter que cette situation continue, pour finir par faire le lit d’une autre année blanche. Les autorités maliennes de transition doivent garder à l’esprit que la reconquête du Nord du pays est une chose, l’enseignement supérieur en est une autre. Il y a vraiment urgence à intervenir pour éviter une dégradation de la situation qui ne va arranger rien ni personne.

Boubacar Sangaré

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2 COMMENTAIRES

  1. Vous avez vu juste monsieur Sangaré.” la reconquête du Nord du pays est une chose, l’enseignement supérieur en est une autre”. Comme le dit un proverbe de chez nous “ce n’est pas parce qu’on est borgne qu’on ne doit pas se laver la figure le matin au reveil”

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