L’éducation et la santé sont deux secteurs clés du développement d’un pays. Ils agissent directement sur ce que l’on appelle le capital humain lequel permet effectivement à un pays comme le nôtre de progresser. Même si ce sont des secteurs improductifs, ils sont indispensables pour le développement de la nation entière.
Il est logiquement admis qu’une population qui a bénéficié du savoir, développé des compétences dans divers domaines, en bonne santé est un facteur d’accroissement de la richesse nationale.
L’éducation et la santé sont donc deux politiques stratégiques à mettre en œuvre pour tout gouvernant qui souhaite l’essor de son pays et le bien-être de son peuple, ce n’est pas pour rien que ces deux secteurs représentent en moyenne 40% du budget national.
Or, la qualité des services malgré un investissement colossal, n’est pas à hauteur de souhait. Depuis 20 ans, le niveau général de l’instruction a baissé au Mali. Il est apparu une cassure entre une minorité très diplômée ayant eu accès à des études de qualité et une majorité délaissée. Ici, il n’y a pas de distinction entre ceux qui ont eu un parcours à l’extérieur du pays et ceux qui y sont restés. Ce critère bien qu’appréciable ne saurait être déterminant.
Idem pour le système de santé où il y a là aussi eu une cassure entre ceux qui ont accès aux meilleures soins et la majorité qui est peu ou pas prise en charge du tout, dans des centres où la qualité des soins est médiocres, du fait de l’insuffisance de formation des personnels de santé ou de l’absence d’infrastructures.
Le décrochage est lié à deux évènements et une fausse bonne idée qui s’avère aujourd’hui être une erreur stratégique majeure. Tout d’abord il y a eu la dévaluation du Franc CFA dans les années 90 qui a beaucoup affaibli nos États, puis les politiques d’ajustements structurelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international.
Ces politiques avaient principalement pour objectifs de réduire le train de vie de l’État, de faire des économies çà et là. C’est ainsi qu’on a dans un premier temps taillé dans les dépenses militaires, avant de commettre une erreur terrible, celle de prôner la libéralisation à tout va du secteur de l’éducation et de la santé.
Face à la démographie galopante et les faibles moyens de l’État, cette libéralisation pouvait paraitre logique, mais dépendait amplement de la bonne foi des promoteurs privés et de l’administration.
Le monstre a fini par échapper à son créateur, en multipliant les centres de santé et les écoles privés, nous avons dilué les problèmes, sans les résoudre, nous avons permis l’émergence de mafias dans le système éducatif qui inondent le marché de l’emploi de jeunes peu ou mal formés, ayant pour beaucoup bénéficié de largesses pour obtenir un diplôme.
La promotion des cliniques privées par des médecins d’hôpitaux publics, a détruit le système de santé public, et crée deux classes de malades, une minoritaire ayant accès à toutes les commodités et une majoritaire n’ayant pas les moyens de se soigner convenablement.
Le lien est fait, entre ceux bénéficiant d’une bonne éducation, et de bons services de santé, la minorité nantie, et ceux ne bénéficiant pas des meilleurs soins et des meilleures conditions d’éducation.
Si cette position procède du raccourci, il n’en demeure pas moins que ce constat cruel est proche de la réalité et s’accentue encore plus lorsque l’on oppose zone rurale et zone urbaine.
Cela étant dit, ce n’est pas tant la libéralisation qui est en question, que la moralité des acteurs et notamment des acteurs étatiques devant d’une part, s’assurer que les populations bénéficient des meilleurs services sociaux publics possibles, et d’autres part scrupuleusement contrôler les structures privées.
Encore une fois, on en revient à la bonne gouvernance, et au refus d’une administration gangrenée par la corruption d’assumer son rôle, pour le bien-être des maliens.
L’injustice sociale qui découle de cette situation combinée à une démographie galopante, nous conduit droit dans le mur et vers une implosion sociale. Il apparait plus que nécessaire pour les gouvernants de mettre en place une politique de la santé et de l’éducation capable de réduire les écarts actuels et de gommer les différences. Cela demande bien sûr du temps et beaucoup de courage, mais avons- nous le choix? Reformer ou disparaitre il faut choisir, et ne pas choisir c’est déjà choisir.
Salif Diallo