Écoles privées catholiques au Mali : Péril sur l’enseignement

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La décision de l’Etat de suspendre, à partir de décembre 2024, la subvention accordée à l’enseignement privé catholique, va mettre au chômage plus de 1600 enseignants, pères de familles. Les péripéties actuelles ont montré que beaucoup ignorent tout de l’enseignement catholique ou se limitent au “catholique”, la confondant avec une formation confessionnelle, malgré le fait que ces établissements sont courus.

Les évêques du Mali ont décidé que, si l’Etat se retire de la convention, les écoles catholiques seront fermées pendant l’année prochaine 2024-2025, le personnel licencié, soit 1613 enseignants dans les différents ordres d’enseignement. Un séisme.

L’Eglise a plusieurs écoles fondamentales : des écoles secondaires générales, des écoles professionnelles et des instituts d’enseignement supérieur. Qui demande l’arrêt des subventions ? A quelle fin ? Pourquoi l’Etat subventionnait ? Quel est l’apport des écoles privées catholiques au système éducatif Malien ? Mali-Tribune, votre bi-hebdomadaire préféré, a mené les investigations.

Ecoles privées catholique au Mali : Une histoire mouvementée

Les premières écoles privées catholiques ont ouvert leurs portes entre 1889 et 1904. Il s’agit de l’Ecole de Kita, créée le 15 mai 1889 par les Pères du Saint Esprit, celles créées par les Missionnaires d’Afrique (les Pères Blancs) : l’école de Tombouctou le 21 mai 1895 et l’école de Ségou le 12 janvier 1896.

“Les relations ont été tantôt cordiales tantôt hostiles, déjà, entre l’enseignement catholique au Soudan français et l’administration coloniale, à cause de l’évolution de la politique en France où les socialistes ont fait voter les lois scolaires et les textes subséquents. Ces lois rendront l’administration des écoles privées difficiles”, explique Nioumina Gabriel Berthé, ancien directeur national de l’enseignement catholique.

Ces lois scolaires en France conduiront à la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Les relations entre l’Eglise et l’Etat ne se dégèleront qu’avec la loi du 2 novembre 1941 du gouvernement de Vichy qui accorde des subventions aux écoles privées en France. Dans les colonies, en 1944, les écoles catholiques sont reconnues comme œuvres sociales, ce qui leur permit de bénéficier de subsides à partir de 1945.

De 1945 à 1972, l’enseignement catholique a connu un essor considérable avec la fin de la guerre. De nouvelles paroisses sont créées, qui presque toutes ouvrent leurs écoles. Par ailleurs, de nombreuses écoles sont créées ainsi que des écoles techniques et même une Ecole normale de formation des instituteurs à Sikasso. A l’indépendance du Mali, l’enseignement catholique va connaître quelques difficultés financières, mais son droit à l’existence ne sera jamais remis en question.

Selon Hyacinthe Koné, ancien directeur diocésain de l’Enseignement catholique de San, “L’école catholique en tant qu’œuvre d’Eglise au service de la communauté humaine tout entière éduque en fonction d’un projet éducatif dont l’homme est au cœur. Cet homme à éduquer est référé à Jésus, ‘Homme Parfait, Homme pleinement accompli en Qui toutes les valeurs humaines trouvent leur accomplissement et leur unité harmonieuse’. (Projet éducatif de l’enseignement catholique du Mali).

Il poursuit : “Dans ce sens, la mission de l’école catholique est de former l’homme dans toutes ses dimensions, d’adapter l’école aux réalités du milieu. Pour ce faire, elle cherche à : assurer la formation intellectuelle, morale et spirituelle des jeunes et des enfants ; éduquer les jeunes à l’amour et au service gratuit ; adapter son enseignement à l’apprenant et à l’environnement”.

“Les objectifs éducatifs que vise l’enseignement catholique au Mali sont : développer les savoirs, savoir-faire et savoir-être des enfants ; lier à travers son enseignement : Science, Foi et Culture ; développer les facultés physiques et les qualités morales des jeunes ; aider les élèves à développer leur personnalité ; aider les jeunes au respect des autres croyances et des autres races; apprendre aux enfants l’amour du travail bien fait, le sens de l’effort et le don de soi; former l’apprenant à son insertion socio-professionnelle et assurer à chance égale l’éducation à tous les enfants”.

Alexis Kalambry

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Présence géographique :

De Kayes à Kidal

L’enseignement catholique est implanté à tous les niveaux : de la maternelle à l’enseignement supérieur. L’Eglise a plus de 100 établissements rien qu’au niveau de l’enseignement fondamental. A cela, on peut ajouter une université, des établissements préscolaires, de l’enseignement secondaire général, de l’enseignement technique et professionnel, des établissements supérieurs. S’y ajoutent encore plus de 10 centres d’alphabétisation, une vingtaine de centres d’apprentissage…

Selon Hyacinthe Koné, “l’Eglise a de tout temps été attentive aux plus pauvres, aux déshérités et aux laissés-pour-compte. C’est en raison de cela qu’elle implantera ses écoles partout au Mali en milieu rural comme en milieu urbain. Elle a même touché les zones reculées où l’Etat n’a pas pu aller, dans le souci d’apporter à tous l’éducation et l’instruction sans exclusive”.

Les groupes cibles sont les enfants et les jeunes sans distinction d’origine sociale, d’ethnie, de sexe et de religion.

Alexis Kalambry

 

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Conventions :

Ce qui était convenu

 La première Convention est celle du 20 février 1969 relue en septembre 2008, qui détermine les rapports entre la Conférence épiscopale et le personnel enseignant dans les écoles privées catholiques du Mali. La deuxième Convention est celle du 8 août 1972 qui réglemente les rapports entre l’Eglise et l’Etat en matière d’éducation.

Le 8 août 1972, l’Etat du Mali a signé une convention avec la Conférence épiscopale du Mali pour baliser les contours de la gestion des écoles privées catholiques. La convention de 1972 a été signée par le ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, Yaya Bakayoko, et le président de la Conférence épiscopale du Mali, Monseigneur Luc Sangaré, alors archevêque de Bamako.

La convention qui comprend 5 titres et 32 articles, exclut de son champ les jardins d’enfants, les écoles de catéchisme et les établissements destinés à la formation des ministres du culte.

“Par cette convention, l’enseignement privé catholique, service d’intérêt général, tout en conservant son organisation spécifique, place ses ordres d’enseignement sous l’autorité du ministre de l’Education nationale. Les charges de l’enseignement privé catholique sont partagées entre le gouvernement de la République du Mali et les autorités de l’enseignement privé catholique. L’enseignement privé catholique est respectueux de la liberté de conscience. Il accueille dans ses établissements tous, sans distinction aucune et veille à imprégner la jeunesse qui lui est confiée d’un esprit de compréhension mutuelle, de fraternité universelle dans le sentiment d’une commune appartenance à une même patrie”, précise la convention.

Les articles 13 et suivants ajoutent que les établissements privés catholiques sont soumis au contrôle permanent du gouvernement, sur le plan pédagogique, administratif, sanitaire et financier. L’enseignement privé catholique n’est pas autorisé à délivrer des diplômes. Ses élèves sont soumis aux mêmes examens que ceux de l’enseignement public, c’est-à-dire aux examens officiels. Les maîtres de l’enseignement privé catholique doivent subir les mêmes examens professionnels que leurs collègues de l’enseignement public, participent comme leurs collègues de l’enseignement public, aux travaux des commissions d’examens.

Le titre IV, en son article 20 précise que “l’enseignement privé catholique reçoit régulièrement une aide financière et, dans la mesure du possible, en personne, une contribution du gouvernement pour son fonctionnement. Dans un esprit d’aide à l’enseignement privé catholique, le ministère de l’Education nationale peut affecter du personnel dans des établissements de l’enseignement privé catholique, après avis du directeur dudit enseignement et sans préjudice du personnel qui sera recruté et payé par les soins de l’enseignement privé catholique”.

En plus, la convention affirme que les bourses octroyées par l’aide extérieure publique ou privée à l’enseignement privé catholique sont mises à la disposition de la Commission nationale des bourses et d’orientation, comme un apport à la Contribution nationale pour la prise en charge des études de l’ensemble des élèves maliens, sans discrimination.

“L’aide du gouvernement accordée pour le fonctionnement sera consacrée exclusivement à assurer aux maîtres de l’enseignement privé catholique, à diplôme ou qualification professionnelle et ancienneté égales, un traitement équivalent à celui de leurs homologues de l’enseignement public. Cette aide sera égale au moins à 80 % du traitement des maîtres enseignant dans des classes dont la majorité des élèves présentent une scolarité normale conformément aux dispositions en vigueur”.

Alexis Kalambry

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4 COMMENTAIRES

  1. Dans ce cas, transformons les écoles catholiques en publiques , l’Etat doit construire le maximum d’écoles publiques pour arrêter les subventions, l’Etat souffre et les promoteurs sont milliardaires. j’en veux à l’Etat à travers le Ministère de l’enseignement au Mali. Ce Ministère n’a aucune vision pour sortir l’école malienne de cette situation pitoyable comparativement à celle des pays voisins comme la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Bénin etc. Sachant bien les premiers responsables vont envoyer leurs enfants à l’extérieur pour étudier dans les meilleures conditions, le reste n’est plus leur problème. Il y a trop d’injustice au Mali . Tout le problème du Mali c’est les gouvernants qui ne donnent pas le bon exemple ou bien ils pensent que les gens n’ont pas l’œil sur eux. Il est grand temps de se ressaisir pour éviter le chao à notre Maliba. Chaque responsable doit donner le bon exemple.

  2. TAIS-TOI SALE BAT…..RD DE FANGA ZANGA BIRAMA MOUSSA NE VIENT PAS NOUS RACONTER DES CONNERIES

    TOUTE MA JEUNESSE AU MALI J’AI ÉTUDIÉ A L ÉCOLE CATHOLIQUE. JAMAIS EU AUCUN PROBLÈMES.
    LES PROFS ET LES ÉLÈVES ÉTAIENT DES CATHOLIQUES ET DES MUSULMANS PAUVRES OU AISÉS. LES COURS ÉTAIENT LES MÊMES QUE DANS LES LYCÉES PUBLICS. ON NE NOUS A JAMAIS OBLIGÉS A ALLER A L ÉGLISE. LES COURS DE CATÉCHISME ET DONNES UNIQUEMENT AUX ÉLÈVES CHRÉTIENS

    CERISES SUR LES GÂTEAUX LES FOURNITURES ET LES COURS ÉTAIENT GRATUITS A CETTE ÉPOQUE-là

    ET A LA FIN DE L ANNÉE SCOLAIRE LES MEILLEURS ÉLÈVES AVAIENT DES CADEAUX

    • Au regard de ton faible niveau intellectuel et de ton langage ordurier sur ce forum, un individu qui ne sert pas le Mali mais la France coloniale, tu es la preuve que la décision de l’Etat de ne plus subventionner cette école est une bonne décision.

      Il faut en finir avec les subventions publiques des écoles catholiques et des écoles islamiques pour se concentrer sur le renforcement en quantité et en qualité de l’école publique gratuite pour tous basée particulièrement sur les langues nationales africaines.

      Le “Mali Kura” est impossible sur une réforme en profondeur du système public d’enseignement au Mali.

  3. “Écoles privées catholiques au Mali : Péril sur l’enseignement”

    Je crois que l’Etat du Mali ne doit financer ni l’école catholique ni l’école islamique.

    J’espère donc que la nouvelle mesure de l’Etat du Mali s’étend aussi à l’école islamique.

    L’Etat du Mali ne doit financer et promouvoir que l’école publique gratuite pour tous pour donner un enseignement de qualité au maximum de Maliens.

    L’Etat du Mali doit offrir aux jeunes une bonne culture générale et des filières professionnalisantes qui mènent à des emplois dont le pays a besoin maintenant et demain.

    Cet enseignement de qualité doit désormais au Mali être donné dans les langues nationales africaines.
    La place de la langue française doit être considérablement réduite dans l’enseignement public malien en faveur des langues nationales africaines et d’autres langues de circulation internationale comme l’anglais, le chinois, le russe.

    Il faut absolument sortir de l’idée coloniale selon laquelle il n’est pas possible d’acquérir le savoir et de s’épanouir professionnellement en dehors par exemple de la langue française.

    Le savoir est universel. Il faut simplement imposer aux jeunes écoliers la maîtrise de l’alphabet officiel transcrivant les langues nationales africaines du Mali et lancer une politique publique massive de traduction dans les langues nationales africaines de l’immense savoir contenu dans notre culture africaine vivante et dans des ouvrages des plus grandes langues du monde.

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