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L’école retrouvera-t-elle un jour sa valeur d’hier ? Elle souffre en tout cas aujourd’hui de mille maux. Parmi ceux-ci, la question morale n’est pas le moindre. C’est pourtant une question qui n’est pas souvent évoquée. Zakaria Abdallah Koné l’aborde ici à travers le drame des jeunes filles (ou dames) qu’on oblige au « droit de cuissage » faisant d’elles de futures mauvaises épouses, femmes infidèles au foyer, voire enseignantes complexées vacillant entre la susceptibilité la plus aigue et la férocité la moins pédagogiquement justifiable.
Tout comme le cultivateur choisit ses plus beaux grains pour les semences futures, la société a proposé ce qu’elle a de meilleur parmi ses hommes pour assumer cette tâche aussi noble que délicate. Mais en posant aujourd’hui un œil critique sur cette institution, le constat est amer : l’école est malade à tous les étages. Sa maladie est d’autant grave qu’elle devient de plus en chronique, et si un remède efficace n’est pas trouvé le plus tôt possible, le glas sonnera pour elle et pour la société entière avec .
En effet, notre système éducatif est victime de l’ablation volontaire d’une bonne partie du contenu définitionnel du concept d’éducation, et cela par la faut de la plupart des enseignants. Or, ce sont eux nos maîtres qui nous ont appris que le terme éducation recouvre deux dimensions fondamentales dont chacune est nécessaire mais insuffisante sans l’autre. d’une part, nous avons l’instruction, et de l’autre la morale.
L’instruction a pour mission d’assurer le savoir et le savoir-faire. Cette mission, une fois accomplie, nous pouvons avoir au bout du circuit des médecins, des ingénieurs, des économistes, des littéraires…Quant à la morale, elle prend en charge le savoir- être de l’enseigné. Et c’est elle qui est menacée, c’est elle qui, pour la majorité des enseignants aujourd’hui, ne fait plus partie de l’éducation. Selon cette conception des choses, le concept d’éducation se réduirait à celui d’instruction tout simplement. Si cette conception était la bonne, pourquoi continuerait-on à parler d’éducation nationale alors qu’il s’agit en réalité d’instruction nationale ?
Si nous attribuons cette conception des choses à une partie des enseignants, ce n’est pas que nous la tenons de leur pensée verbalement énoncée, nous la déduisons des actes qu’ils posent. Car le principe directeur de la morale, c’est l’illustration, une illustration non verbale ni théorique, mais pratique et quotidienne dans chaque geste et acte que pose l’enseignant aussi bien en classe qu’en dehors d’elle.
Un commerce honteux
Mais, que nous offre le spectacle de nos lycées et collèges ? Des tableaux hideux et moralement troublants, surtout la scène de nos jeunes filles.
En effet, il est maintenant quotidien de voir et d’entendre un professeur tenir un discours soutenu sur les dangers de l’avortement, animer un cours sur le déséquilibre social que peut créer la dépravation des mœurs et, juste après ce cours, se laisser surprendre avec la même sérénité d’esprit en train de proposer « l’amitié » à une de ses élèves. Vous nous répondrez peut-être en disant : quoi de plus normal ? Réaction compréhensible mais entendons-nous bien sur les termes. Ici, proposer, c’est sommer, intimer l’ordre de…et amitié signifie tout simplement concubinage. Cette sommation met nos jeunes filles devant un dilemme très profond et très accablant, surtout celles qui tiennent à poursuivre un idéal de pureté et de satisfaction divine. Répondre par oui ou par non ? Dans les deux cas, les conséquences sont lourdes à assumer.
Le « oui » l’amène du coup à remettre en cause, en premier lieu, l’enseignement que vient de lui dispenser son fameux professeur, auteur du dilemme. Ensuite, il l’entraîne au rejet systématique de tout son patrimoine historique de vertu, la conduisant, par ce même fait, à porter atteinte à toutes ses valeurs religieuses.
Quant au « non », les conséquences sont, sur un plan pratique, plus difficiles à gérer. Car, dès l’affirmation de cette négation, elle doit s’attendre aux difficultés les plus diverses qui, certainement, l’entraîneront tôt ou tard à la porte, mettant ainsi fin à ses études. Dans la plupart des cas, on soumet la jeune âme qui « joue les dures » aux pressions d’une sournoise coalition qui comprend, par exemple, trois professeurs enseignant tous la même classe où se trouve leur pauvre victime. Sans pouvoir se l’expliquer objectivement, la jeune fille se retrouve dans un tourbillon indescriptible avec des zéros qui lui tombent comme par enchantement, et tout ce ballet se solde à la fin du semestre par des moyennes d’une médiocrité légendaire. N’ayant pas digéré sa défaite initiale qu’il prend sous l’angle du défi, le gentleman, comme dans un conte de fée, réapparaît pour d’abord admirer l’œuvre déjà accomplie (par lui et ses acolytes bien sûr) et ensuite réitérer la sommation : « si tu t’obstines dans ta position, ton sort est réglé ; si tu reviens sur ta décision, on peut toujours sauver ta situation ».
Dans un désarroi pareil, désemparée, la pauvre victime ne semble plus avoir le choix, elle cède. Et cela est naturellement suivi d’une flambée de ses moyennes dans certaines matières (celles du professeur en question et de ses acolytes) qui peuvent passer du 5 au 14, sans transition. Dans les deux situations, ni l’une ni l’autre notes ne reflètent la valeur objective de l’élève concernée.
En clignant l’œil du côté de nos grandes écoles, la réalité est plus déconcertante. Le droit de « cuissage » est devenu un devoir académique fondamental et le moyen le plus sûr pour atteindre le bout du tunnel. Le doctorat n’a malheureusement pas suffi pour faire prendre conscience à cette fraction d’enseignants, de loin la plus importante, que même à ce niveau on est à la fois éducateur et facteur d’éducation et que la façon la plus active qu’on puisse donner aux élèves est celle par laquelle l’enseignant a été façonné positivement.
Alors, quelles sont les implications de ce comportement de nos « maîtres à penser » ?
La première et la plus immédiate, ce sont les fuites constantes aux examens (chaque année) ; ce qui fait que les évaluations sont désormais au profit des élèves et étudiantes qui ont payé le prix exigé, les opportunistes qui ont pu assister au raffinage « du pétrole » et ceux qui, par l’entremise d’amis ou frères, ont pu bénéficier du produit fini. Le mérite est mort, vive l’esprit de facilité, de tricherie, et des cartels dans les salles d’examens !
Sur le plan social et professionnel, il est cause de bien de frictions entre professeurs : les classes étant communes, les choix peuvent l’être également. d’où des télescopages fréquents car, souvent, il peut se trouver « deux ou trois prétendants pour une concubine ». Il est aussi généralement à la base de beaucoup de problèmes entre les professeurs et les élèves, « petits prétentieux », qui osent roder autour de ce que les maîtres considèrent comme leur chasse gardée. De ces différents chocs, beaucoup d’élèves laissent leurs plumes.
Au plan pédagogique, les conséquences sont plus dramatiques.
Au niveau de la jeune fille, on ne vient pas seulement de poser de simples actes de fornication ou d’adultère. Mais on vient surtout d’initier par contrainte (donc par viol) une âme innocente à la science de la tromperie, de la duperie, de l’exploitation de son corps pour assouvir ses besoins, n’importe lesquels. Bref, on vient de produire une mauvaise femme, inadaptée et infidèle au foyer futur ou présent.
Ensuite, au niveau général, on retrouve des jeunes filles qui traversent tout le système jusqu’à la licence, maîtrise, le cap…sans jamais rien mériter et retourner à leur tour à l’enseignement. Etant l’ombre de leurs diplômes, elles sont obligées de développer un complexe qui vacille entre la susceptibilité la plus aigue et la férocité la moins pédagogiquement justifiable. Et, généralement, ce sont les mêmes qui sont à la base de ce système honteux qui crient au scandale : « le niveau de notre enseignement baisse ».La plaie de l’école est là, toute béante, pansons-la au lieu de distribuer des capotes gratuitement.
Sida au secours !
Peut-être la peur du très célèbre syndrome viendra-t-elle à bout du fléau ? Cela serait véritablement salutaire dès lors que la société tolère cette tare grave des enseignants. Sinon, après le sacrifice de la morale et de la dignité d’enseignant sur l’autel des instincts vils, attendons-nous à un suicide collectif. Car le sida est un soldat intrépides et redoutable, il utilise la technique de la terre brûlée, il frappe dans le tas et personne n’est épargné, même pas les innocents, encore moins les pervers, fussent-il licenciés ou même docteurs.
Zakaria Abdallah Koné
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