Après plus de six (06) mois de crise qui a sérieusement paralysé notre école et face à la détermination des enseignants à aller jusqu’à obtenir satisfaction de leur exigence et face au risque de synchronisation de cette crise aux autres malaises sociaux qui font soulever aujourd’hui le peuple contre son régime, le président Ibrahim Boubacar Keïta a fini par capituler devant les syndicats en instruisant au gouvernement l’application immédiate et complète de l’article 39 pour lequel ils se battent.
Au terme d’une année scolaire 2018- 2019, sérieusement hypothéquée par la grève des enseignants et sauvée in-extremis par certaine médiation, l’on n’aurait jamais imaginé un tel scénario arrivé à notre école d’aussitôt. Mais, hélas, c’était sans compter sur la mauvaise foi de nos gouvernants pour lesquels l’école est le dernier des soucis. Et pourtant, depuis l’accord conclu entre le gouvernement et l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) sur l’augmentation de la valeur indiciaire, aux dires des syndicats, de nombreuses démarches ont été entamées auprès de toutes les couches sociales et tous les acteurs impliqués dans la question de l’école afin d’attirer leur attention sur les dispositions de l’article 39 de la Loi N°0017 portant Statut général des fonctionnaires.
Selon cet article «Toute majoration ou rémunération intervenu au niveau du statut général des fonctionnaires s’applique de plein droit au statut particulier des enseignants de l’enseignement secondaire, fondamental et de l’éducation préscolaire et spéciale». Selon eux, s’ils avaient été entendus et que chacun s’était assumé, nous n’allions pas être là à faire vivre à nos pauvres enfants, l’un des cauchemars les plus atroces de leur vie.
Mais, hélas aucune des médiations ni de négociation n’a permis de faire fléchir l’un des deux camps. Pendant que les syndicats endurcissaient leur position par la multiplication des grèves, le gouvernement lui, il s’enfonçait dans des tergiversations en procédant par des stratagèmes pour contre carrer le mouvement au lieu d’y faire face pour résoudre, justifiant son obstination à ne pas appliquer une loi de la République du Mali par le manque de moyens de l’État. Entre temps, c’est l’avenir de toute une génération qui se trouve hypothéqué.
Si nous ne pouvons pas dire que c’est le Mouvement du 5 juin 2020 organisé par le Rassemblement des forces démocratiques (M5-RFP) qui a permis de décrisper la situation, nous pouvons qu’à même affirmer qu’il fut l’élément catalyseur qui a permis au président Ibrahim Boubacar Keïta de se réveiller de son long sommeil dogmatique, de comprendre enfin qu’il tient en main le sort de la nation à travers l’école. C’est ce qui ressort de ses propos tenus devant les représentants des confessions religieuses reçus en marge de son adresse à la nation du 14 juin 2020, soit une semaine après le meeting du M5-RFP «J’ai le devoir de sauver l’école malienne et je la sauverai, inchalla».
Et comme pour lier l’acte à la parole, il décida de mettre fin à cette crise scolaire en accordant aux enseignants ce qu’ils réclamaient, depuis lors, cela devant les forces vives de la nation qu’il avait reçues, le 17 juin 2020 «J’ai décidé de mettre fin à la grève des enseignants en instruisant au gouvernement l’application immédiate et complète de l’article 39». Faut-il l’applaudir ? Nous disons non, au contraire, nous devons en plaindre. Que temps perdu, que d’humiliation subie par ceux-là qui sont chargés de notre avenir que sont nos enfants, pour quelque qui aurait dû être réglée sans tambour ni trompette car une loi peut être dure, mais elle reste une loi et elle s’impose à tous gouvernés aussi bien que gouvernants.
Par ailleurs, si avec ce recul forcé du gouvernement, les syndicats d’enseignant peuvent se réjouir de voir leur exigence satisfaite, et si le gouvernement malgré tout, peut aussi se sentir soulagé de voir la voie désormais libre pour sauver l’année scolaire comme à l’accoutumée, qu’en est- il du sort de ces pauvres élèves dont le seul tort fut d’être élèves au mauvais moment?
Nous n’avions pas fini avec les conséquences de l’année scolaire précédente aussi tricotée, en déclarant cette année scolaire normale, il est évident que les nouveaux candidats aux différents examens affronteront les épreuves avec très peu chance de réussir pour n’avoir pas appris grande chose. Or en cas d’échec, ce sont leurs scolarités qui porteront le coût et pire ceux qui sont à leur dernière chance risqueront de se voir exclure pour épuisement de scolarité.
De ce fait, nous pensons que déclarer l’année scolaire 2019-2020, une année normale pénaliserait d’avantages nos enfants qui n’ont que trop souffert de cette crise qui n’en était pas une. Donc, nous estimons qu’en la déclarant année facultative cela pourra aider à réparer un peu cette injustice dont ils sont victimes.
Daouda DOUMBIA