L’Université des Lettres et des Sciences Humaines de Bamako (ULSHB) a organisé le vendredi 10 mars 2017, une conférence-débat sur le thème intitulé ‘’Conflits intercommunautaires autour des ressources naturelles dans la zone de Ké-Macina : acteurs, enjeux et perspectives de solutions’’. Elle était animée par l’enseignant- chercheur, Docteur Boureima TOURE.
Au Mali, les sujets d’intérêts nationaux sont généralement traités par des chercheurs étrangers, à tel point qu’on se demande si les universitaires disposent toujours de capacités d’analyse et de proposition leur permettant de se prononcer. Ainsi, cette initiative scientifique sur la préoccupation actuelle de toute la nation constitue une contribution dans la résolution des conflits sociétaux au Mali.
Cette rencontre a enregistré la présence des personnalités telles que l’ancien ministre de l’administration territoriale, Ousmane SY, l’ancienne gouverneur, Mme Sy Kadiatou SOW, des députés, les autorités universitaires et des chercheurs venant de divers horizons.
« Depuis le 19ème siècle, la zone de Ké-Macina constitue le principal point de passage des animaux transhumants de la région du Delta central du Niger. Elle joue encore ce rôle stratégique en dépit des changements multiples qu’elle a connus. C’est pourquoi, dans cette région, les conflits intercommunautaires autour des ressources ne peuvent pas être seulement perçus sous l’angle de la dynamique actuelle mais doivent être aussi envisagés dans une approche à la fois diachronique et synchronique», a indiqué le conférencier.
Selon lui, les conflits se constituent autour des pistes pastoraux, les gites d’étapes, les points d’eau d’abreuvement des animaux, les zones de pâturage, le retour précoce des animaux transhumants et la divagation des animaux. Il précise également que du règne de Sékou Amadou (royaume peul) à l’Etat colonial, en passant par les pères de l’indépendance à nos jours, chaque gouvernant a adopté une approche en fonction de sa politique pour régler les conflits.
Le Dr. TOURE affirme aussi que depuis quelques décennies, le problème se situe sur la personnalité des juges et de leurs méthodes dans la gestion des conflits. Les mécanismes de résolutions traditionnelles étant de nos jours inefficaces. A cela s’ajoute l’arrivée des grands investisseurs fonciers dans les années 2000 dont les ambitions portent sur des milliers d’hectares, au grand dam des éleveurs dont les couloirs de transhumance se rétrécissent au fil des années. Ce qui pose la problématique même de l’avenir de la question pastorale dans la région.
Par ailleurs, il réfute la thèse de tout conflit ethnique dans cette partie de la région de Ségou. « Pendant mes 5 ans de recherche dans cette zone, j’ai conclu qu’il n’existe pas de problème ethnique. Je précise également que 84 % des conflits opposent les agriculteurs aux éleveurs et 16% entre éleveurs eux-mêmes. Et aujourd’hui, 70% des bétails appartiennent aux administrateurs et aux paysans et non aux peulhs ».
Comme perspectives de solutions, il propose : la matérialisation des pistes de transhumance ; la préservation des gites d’étape ; le surcreusement des mares, notamment celles situées dans la commune de Monimpébougou ; la création des zones de pâturage au niveau de l’ensemble des communes concernées par les conflits ; le renforcement de la coopération entre les agriculteurs et les éleveurs dans le cadre du passage des animaux. Etc.
En clôture de la rencontre, les responsables de l’université ont pris l’engagement d’organiser désormais une conférence par mois sur des sujets essentiels du pays.
Mamadou dit M’Baré FOFANA