Au Mali, les statistiques le montrent, les jeunes mineurs sont déjà sexuellement actifs. Peut-on restreindre leur sexualité par la loi ? Qu’en pensent les spécialistes ?
Les médias, la nucléarisation des familles, les occupations des deux parents, la prolifération des bars chinois ont « libéralisé » le sexe, et ouvert aux enfants, précocement, les possibilités de l’expérimenter, très souvent par curiosité. Du coup, le sexe, naguère interdit avant le mariage, se pratique avant le mariage. Avec des fortunes plus ou moins diverses.
Selon le juriste Moussa Bocoum, aucune loi ne restreint le champ de la sexualité. « Ce qui est regardé le plus souvent : c’est le consentement », affirme-t-il. « Et le consentement aussi ne peut pas être donné par une personne qui est incapable juridiquement : les personnes qui ne jouissent pas de leurs facultés mentales ou encore des personnes qui au regard de leur âge sont protégées par la loi par exemple les impubères et les personnes mineures ».
« Lorsqu’on couche avec quelqu’un sans son consentement, cela constitue en soi un délit, un crime. Cette qualification est doublée d’autres qualifications en fonction de l’état de la personne. S’il s’agit d’une personne mineure, on peut être poursuivi pour pédophilie. Il y a ainsi deux incriminations en même temps. Le fait de s’accoupler avec une personne saine d’esprit, qui a l’âge révolue (plus de 18 ans), là aussi s’il y’a absence de consentement il y’a viol », a-t-il expliqué.
Donc, ajoute M. Bocoum, pour les personnes impubères et mineurs on peut parler de viol, de détournement de mineur ou ce qu’on qualifier de pédophilie. Tout va dépendre du contexte.
Yacouba Fanè, lycéen confie : « J’ai un ami qui a déjà enceinté une camarade de classe. Moi, j’ai vraiment la chance d’avoir des parents qui sont attentifs et qui prennent le temps de m’expliquer beaucoup de choses concernant la sexualité ».
Mandi, étudiante, donne son avis sur la question. « Je crois que les cours d’éducation sexuelle serviront beaucoup à nous les jeunes filles. Lorsque l’on prend conscience des avantages et des risques de certaines choses, c’est déjà un plus ».
« Quand on ne peut pas s’opposer à la volonté de son fils de convoler en justes noces, on ne peut que lui souhaiter un heureux ménage », affirme le vieux Issa Coulibaly. « De même, aujourd’hui, il est illusoire pour n’importe quel parent de croire qu’il a une prise totale et entière sur ses enfants. Alors, la seule alternative demeure l’éducation », dit-il. « Il faut leur dire ce qui est bien, aux plans physique, physiologique, religieux, juridique pour les sensibiliser. Sinon, les enfants d’aujourd’hui, plus tu interdis, plus tu les incites à le faire ».
« Je pense qu’on peut restreindre l’activité sexuelle des jeunes tout en faisant une bonne éducation sexuelle, communiquer avec ces jeunes en famille et à l’école sur les risques de la sexualité précoce, les IST, les grossesses à risques », indique Mohamed gynécologue. Pour lui, si on dit clairement aux enfants pourquoi ils ne doivent pas être actifs sexuellement avant la puberté, ils sont capables de comprendre.
En dehors des textes juridiques, les spécialistes restent formels sur l’importance des cours d’éducation sexuelle ou des séances de causeries débats autour des thématiques sur le droit sexuel, l’éducation sexuelle, la santé de la reproduction…
Awa Samba Coulibaly témoigne que grâce à son travail d’animatrice à l’ONG CAEB, elle se sent très utile. « Au-delà de l’aspect rétribution, on contribue en tant qu’humain à servir des jeunes comme nous en les sensibilisant petit à petit et en les exhortant à se maitriser ou avoir les bonnes approches sur les réalités de leur vie sexuelle ».
Aminata Agaly Yattara
Ce reportage est publié avec le soutien de JDH et FIT en partenariat avec Wildaf