L’Association Karamba Touré (AKT), qui s’est fixé comme ambition première l’éveil mental et intellectuel des populations vis-à-vis de la science, de la culture et la société pour un vrai développement durable, a présenté, le 19 septembre dernier, ses «Malles scientifiques» dédiées, l’une au corps et à la santé et l’autre à l’eau, au sol et aux plantes. Ces précieux outils didactiques serviront désormais de support privilégié à des séances d’animation en direction des jeunes et des adultes, en français comme dans nos langues nationales, afin de permettre aussi à «ceux qui n’ont pas été à l’école d’accéder à la science et au savoir».
ruit d’un travail de longue haleine – il a débuté depuis une douzaine d’années – le programme «Malles scientifiques» ne s’intéresse pas, et ce n’est pas le moindre de ses attraits, qu’aux personnes non scolarisées.
Pour preuve, le lancement officiel et la présentation des malles inaugurait une session de formation d’animateurs, qui utiliseront ce matériel innovant pour former des élèves dans les salles de classes de vingt-quatre établissements scolaires, mais aussi dans des Centres d’éducation pour le développement (CED), qui accueillent des auditeurs jamais scolarisés, déscolarisés ou alphabétisés en langues nationales.
Après le mot de bienvenue du Président de l’AKT, Bakary Konimba Traoré, ex-ministre de l’Education Nationale et témoin du tout début de l’initiative, ce sera au tour de Mme Thérèse Touré, veuve de Karamba (l’apprenant en langue malinké) Touré de faire la genèse de la composante malles scientifiques d’AKT. Ce projet est né d’une collaboration entre la célèbre Cité des Sciences de la Villette (à Paris) et des associations engagées dans la vulgarisation et l’accès du plus grand nombre aux connaissances scientifiques.
Pendant douze ans, le projet a été mis sur pied, remanié et peaufiné. Les premières malles ont été expérimentées en 1995, avec une évaluation de leur qualité en 1999. En 2000, à sa création, l’Association Karamba Touré a pris le relais de ses soeurs françaises pour conduire le programme au Mali. La première présentation publique des malles eut lieu en 2003 à Sirakoro Megentana (non loin de Bamako), devant feu le Pr Mamadou Lamine Traoré qui, ministre de l’Education Nationale à l’époque, fut tellement enthousiasmé qu’il souhaita que chaque école malienne en possède. Mais, pour cela, encore fallait-il en disposer.
Grâce à un partenariat avec l’AFD, (Agence françaisede développement), l’IRD (Institut de recherches pour le développement) et un cabinet français spécialisé en vulgarisation scientique, l’AKT peut enfin aujourd’hui équiper en malles scientifiques certaines académies d’enseignement de notre pays et former des animateurs scientifiques à leur utilisation, tant en milieu scolaire que dans d’autres conditions, en français et en langues nationales.
Autre prouesse, cette association est la seule à avoir réussi un transfert technologique majeur, en faisant confectionner les malles et une bonne partie de leur contenu par des artisans et entreprises locaux. Ferrailleurs, maroquiniers, sculpteurs, dessinateurs, ébénistes et autres corps de métiers ont ainsi apporté leur pierre, par leur savoir-faire, à l’édifice. La couleur de chacune des malles est, en soi-même, tout un symbole. Quelle meilleure couleur que la rouge, celle du sang, pouvait être choisie pour la malle «Corps et santé». Quant à la couleur bleue, qui fait penser aussi bien au ciel qu’à l’eau, elle orne la malle «Eau, sol et plantes».
Comme l’on peut s’en rendre compte sur la photo ci-dessus, les pictogrammes et autres ressources iconographiques ont largement été mis à contribution. D’abord pour permettre aux formateurs utilisateurs des malles de trouver aisément les supports d’animation dont ils ont besoin, ensuite comme aides visuels, par exemple des posters, pour les apprenants. Ainsi, pour ce qui concerne la malle «Eau, sol, plantes», les pictogrammes bleus se rapportent à l’eau, les verts aux plantes et les oranges foncés au sol.
En plus de ce matériel purement didactique, qui permet d’expliquer en images la petite et la grande circulation sanguines, les pathologies les plus répandues (modes de transmission, symptômes, prévention) ou le cycle de l’eau, la croissance des plantes et la désertification, chaque malle est dotée d’un kit pour les expériences, avec, excusez du peu, microscope et loupe binoculaire, et d’un tiroir documentaire.
Celui-ci renferme, outre le guide de l’animateur, des dictionnaires et autres ouvrages didactiques, des livres richement illustrés, de bandes dessinées, toutes choses qui permettent aux apprenants de poursuivre la leçon après le cours, de mieux se documenter, d’obtenir le maximum de réponses aux nombreuses questions qu’ils ne manqueront de se poser et, surtout, de satisfaire la curiosité que ces séances visent à éveiller en eux.
C’est dire que, puisque l’expérimentation à large échelle de ces deux malles va durer jusqu’au mois de juin prochain, soit le temps de l’année scolaire, il est à espérer que la généralisation de leur usage sera le choix opéré par les évaluateurs du programme, à la fin de cette première phase. Car il ne nous a pas été souvent donné de voir ce type de matériel, de très bonne qualité, être fabriqué pour l’essentiel dans un pays pauvre. Ensuite parce que le programme s’est fixé comme contrainte, dès ses débuts, de répondre à une question lancinante: comment vulgariser les connaissances scientifiques en prenant en compte les caractéristiques de nos populations et en faisant appel à des «éveilleurs de conscience» qui ne soient pas des scientifiques purs et durs?
AKT a tout simplement bien répondu. En choisissant tout d’abord des thèmes liés aux réalités locales, puis en réfléchissant sur une utilisation du matériel en plusieurs langues, et, enfin, en prévoyant des activités post formation (comme un inventaire des ressources végétales autour d’un village, en guise d’exercice pratique). Il fallait tout simplement y penser et le résultat, ces malles scientifiques, est on ne peut plus réussi, adéquat et intéressant.
Ramata DIAOURE
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