Le président de l’Observatoire National de la Démocratie en Guinée aura eu la formule heureuse en prévenant, à juste raison, que le père de la démocratie guinéenne ne sera pas le gagnant du scrutin d’hier mais celui qui aura accepté la défaite. Seule cette humilité rend possible l’objectif rappelé samedi par Sékouba Konaté : la confiance dans l’avenir et l’union de tous les fils de la nation. L’emphase, hélas, ne peut plus grand-chose même en Guinée où est peut-être née la bonne vieille palabre africaine.
Ce n’est pas que ce pays est incapable de sursaut. Il le peut. D’ailleurs, tant mieux pour lui et pour ses voisins inquiets que nous sommes, il a jusque-là déjoué nos pronostics pessimistes en se remettant sur les pieds chaque fois qu’il a réalisé qu’il marchait dangereusement sur la tête. Mais l’élection africaine c’est une série d’étapes toutes critiques de l’élaboration du fichier électoral aux aspects logistiques en passant par la tenue du scrutin, la proclamation des résultats et l’acceptation de ceux-ci. Donc, si la journée de vote s’est plus ou moins bien passée, le plus dur reste à venir à la Guinée.
C’est très platoniquement ceci : que Cellou Dalein Diallo et Alpha Condé reproduisent leur accolade devant leurs compatriotes, l’Afrique et le monde, le jour où les résultats tomberont. Le cas échéant, la poignée de mains changerait tout pour la Guinée qui sera alors sortie de ce que Jean Marie Doré, lui-même, a appelé la « tradition des régimes d’exception ».
Mais plus la proclamation des résultats tardera, plus le risque de contestation grandira et plus le feu s’approchera de la mèche que nous redoutons tant. Car la Guinée métisse a déjà montré ses lignes de fracture. Elle ne souffre pas du syndrome binaire Tutsi-Hutu comme certains le pensent mais de calculs risqués pour faire de l’ethnie et de la région les marchepieds qu’elles ne peuvent pas être.
Adam Thiam