Beaucoup trop de problèmes aujourd’hui au Mali, tous secteurs confondus (politique, économie, religion, social, sécurité et surtout existentiel) d’énormes défis à relever et des priorités qui se multiplient au fil du temps. De ce constat, aucun Malien sensé ne saurait dire le contraire. Comme pour paraphraser une fable africaine, et se rappeler au bon souvenir de nos lectures anciennes : La case de Birama brûle.
Dans le Mali d’aujourd’hui, la situation est difficile, périlleuse. Certains, comme à l’accoutumée, diront le contraire pour défendre leur bifteck, toute honte bue. Mais la réalité est là, implacable : le pays se fissure, il se consume, il se disloque. À l’image d’une bougie dont la cire fond anormalement, le Mali s’éteint inexorablement. Le Malien est désemparé et désespère de l’avenir.
De grâce, sortons un peu de la politique politicienne, du mensonge, de la flagornerie, de l’hypocrisie, ayons au moins le courage de dire les choses telles quelles sans détour, ni peur : le pays va mal !
Le déni, la fuite en avant, l’altération de la vérité et le « camouflage » qui sont la marque de fabrique des autorités actuelles, ne nous feront pas avancer. Reconnaître en toute honnêteté les difficultés et les affronter courageusement, telle devrait être la conduite à tenir, mais trois fois hélas !
Les difficultés sont si prégnantes, qu’on ne sait même plus par quel bout prendre. Tout est prioritaire au Mali, mais à mon humble avis, la priorité absolue qui mérite qu’on s’y penche très sérieusement et de toute urgence, a trait au « reformatage » en profondeur de l’homme Malien, préalable nécessaire et indispensable pour faire face aux autres défis qui nous attendent. Et Dieu seul sait qu’ils sont nombreux.
Le Mali d’aujourd’hui, c’est la mauvaise gouvernance, le kotèba politique, le népotisme, la corruption, l’impunité, l’irresponsabilité, le clanisme, l’amateurisme, le mensonge, la pauvreté, la gabegie, les surfacturations, les détournements de deniers publics à ciel ouvert, les violences sous toutes ses formes, l’insécurité avec son cortège de morts, le délitement du tissu social, les grèves syndicales, les conflits communautaires, et pour être dans l’air du temps, l’état désastreux de nos routes etc.
Mais le Mali d’aujourd’hui, c’est aussi qu’on le veuille ou non, l’effritement de nos valeurs morales et sociétales, le comportement immoral et amoral de certains de nos compatriotes, la perte de repères. Un sérieux problème qui se pose à nous et qui demande une reponse rapide, notre société étant fortement gangrenée.
– L’homme Malien dans ses travers ou l’effritement des valeurs morales.
Au commencement était l’homme, une vérité millénaire. Si on parle du Mali, il s’agit bien entendu, des hommes qui le composent, c’est à dire les Maliens. Sans Maliens point de Mali, donc si le Mali est malade aujourd’hui, si le Mali souffre, les Maliens y sont forcement pour quelque chose. Faisons donc notre introspection, sans se mentir pour une fois.
Je ne cesserai jamais de le répéter, le problème du Mali c’est en premier lieu les Maliens eux mêmes ! Cela peut ne pas plaire à tout le monde, mais il faut le dire sans fard. Le jour où le Malien changera dans le sens positif du terme, le Mali s’en porterait mieux ! Tel n’est pas le cas pour le moment, tout simplement parce que la vertu est devenue une denrée rare chez nous. Le mal a pris le pas sur le bien. L’honnêteté n’est plus magnifiée. La droiture est synonyme de lâcheté. La dignité est un bien lointain souvenir. La probité est à chercher ailleurs. Le respect est de l’ordre de l’archaïsme. Le mérite ne veut plus dire grand chose sous nos tropiques. Le patriotisme, la citoyenneté c’est pour celles et ceux qui y croient.
Le seul référentiel aujourd’hui c’est le lucre, le matériel et le m’as-tu vu (yèrè yira). Tout se résume à ça, et c’est ce déterminant qui a tout vicié ! Ainsi des comportements nouveaux ont fait leur apparition et ont mis le pays plus bas que terre. Les valeurs qui jadis faisaient notre fierté, notre gloriole ont presque disparu.
L’urgence aujourd’hui, c’est de revenir à ces fondamentaux pendant qu’il est encore temps.
La dignité est un joli mot pour ceux qui en connaissent le sens profond. Ayons de la dignité dans tout ce que nous faisons ! Cette valeur universelle est en « désuétude » chez nous. Or à mon humble avis, tout par de là.
Un petit regard sur l’espace politico public avec des comportements qui donnent à vomir, un tour dans nos différents services, un examen du comportement social du Malien dans son quotidien, et vous aurez la tableau synoptique des tares de notre société dans toute sa laideur : Bienvenue au Gondwana du célèbre humoriste Mamane.
Le Mali est dans un état de déliquescence morale avancée qu’il faille résorber. Tous les segments de la société sont atteints, et ce qui est marrant c’est que ça ne choque visiblement pas. Ça aussi c’est un problème.
Si une situation anormale, contraire aux bonnes mœurs, à nos valeurs ancestrales, à l’ordre public établi, n’émeut personne, n’appelle pas une condamnation ou une réprobation sociale, cela va sans dire qu’on a touché le fond.
De grâce Indignons-nous au moins pour notre propre dignité ! Refusons certains comportements dégradants et avilissants pour notre honneur, notre fierté.
Le Malien, aussi bien jeunes et vieux, hommes et femmes, doit se remettre en question. Se dire que demain n’est pas la fin du monde, et d’agir incessamment avec dignité et honneur dans ses actes de tous les jours.
– Epousons les vraies valeurs
Quand on intègre certains principes comme substrat dans notre quotidien, il est certain que les valeurs d’honnêteté, de droiture, de probité, de respect, de conscience, de responsabilité, de morale, de solidarité, de fierté, d’altruisme, de tolérance, de résilience trouveront une place dans notre « vivre ensemble » et tout le monde sera gagnant.
L’exemple d’un pays comme le japon ou même l’Allemagne est anecdotique et pédagogique en même temps. La construction aussi bien « physique », économique, politique etc. d’un pays, d’une nation est tributaire de son assise morale, du respect des valeurs authentiques et fondamentales.
Le constat est que l’Etat du Mali est défaillant et peine à apporter les vraies solutions. Comme un navire en détresse, avec le risque d’un chavirement à tout instant, le Mali avance cahin caha.
« L’éducation c’est la famille qui la donne ; l’instruction c’est l’Etat qui la doit » dixit Victor HUGO. Avec la donne actuelle au Mali, un changement de paradigme s’impose.
Au sein de la cellule familiale. Les parents doivent se ressaisir. Ils doivent jouer pleinement leur rôle d’éducateur en transmettant les vraies valeurs d’éducation et de morale à leurs progénitures. Être parent d’enfant, est synonyme de responsabilités. Le devenir de l’enfant, sa construction morale est une obligation naturelle ! L’échec d’un enfant est en partie celui du parent aussi. Donc les parents ne sauraient se dérober de ce qui constitue véritablement leur responsabilité.
L’Etat à travers l’école et d’autres de ses structures, brille par son incapacité. Il est grand temps de siffler la fin de la récréation. Trop c’est trop ! Par son inertie, son incurie, on est entrain d’enterrer toute une génération. En a t- il conscience ? L’Etat du Mali est interpellé !
Les enfants ou jeunes du Mali pour leur part, doivent comprendre et être réceptifs à tout ce qui contribue positivement à leur formation morale et intellectuelle. Il y va de leur avenir et de l’avenir du pays. Toute éducation commence avec la vie.
Au risque de se répéter ; la répétition étant d’ailleurs pédagogique, le respect de soi et de l’autre, le travail, les règles du vivre ensemble, l’ordre, la loi, la citoyenneté, le patriotisme, l’honnêteté, le mérite, le courage, la droiture etc. sont des principes et valeurs que les apprenants doivent nécessairement et absolument intégrer dans leur structuration.
Le modèle asiatique dont la sève nourricière procède de la magnificence des qualités morales humaines et éthiques de l’individu, est là pour nous le rappeler et doit nous servir d’exemple. Les nations les plus avancées aujourd’hui, sont celles qui ont compris très tôt que sans l’éducation toute idée de progrès est vouée à l’échec. Alors retroussons nos manches !
Un Mali vertueux, un Mali debout, un Mali fier est bien possible. Il suffit juste que les Maliens s’en donnent les moyens.
Makan DIALLO
Docteur en Droit Privé
Avocat aux Barreaux du Mali et de Paris
Chargé de Cours à l’UCAO et à l’IHEM.
Merci Docteur, le mot qui m’a beaucoup plu que les autres est “reformater”. Tant qu’un nouveau type de malien n’est pas fabriqué, je ne crois pas à un Mali meilleur.
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