Depuis le 19 mars passé, le syndicat national de l’enseignement supérieur (SNESUP) a récidivé en entamant une nouvelle grève illimitée. Le syndicat revendique 5 points.
Il s’agit, entre autres, de la relecture totale des lois N°98-067 et N°00-60 portant respectivement statuts du personnel enseignant de l’enseignement supérieur et des chercheurs en vue de l’alignement des salaires sur ceux de la sous région, la mise en place de la nouvelle hiérarchie (Assistant, Maitre de conférence, professeur) ; la détaxation immédiate des primes sur les salaires des enseignants du supérieur et des chercheurs par la relecture des ordonnances N°10-045/P-RM et N°10-046/P-RM ; la prise en compte immédiate des omissions par le paiement de la compensation financière ; L’arrêt immédiat du prélèvement arbitraire sur les salaires de l’enseignement supérieur et de la recherche au titre de l’AMO et les reversements des retenues opérées et l’intégration à la fonction publique des contractuels en charge des budgets autonomes des structures de l’enseignement supérieur et de recherche.
Face à cette situation qui paralyse l’ensemble des facultés et grandes écoles et notre système d’enseignement supérieur déjà agonisé, compromettant l’avenir de milliers de jeunes et le devenir de la nation toute entière, certaines questions méritent d’être posées : La revendication syndicale rime t’elle forcement avec le blocage de tout un secteur aussi fragile que celui de l’enseignement supérieur ? Abandonner le travail, déserter les amphis et jeter des milliers de jeunes à l’abattoir au motif que le gouvernement n’a pas respecté son engagement et que des doléances n’ont pas été satisfaites sont-elles des actions légitimes de la part de nos enseignants ?
Je crois que les enseignants ont le droit de réclamer des meilleures conditions de travail et de vie. Je ne les en veut point quand ils arguent le fait que le gouvernement n’ait pas respecté tous ses engagements. Mais en ce qui concerne la position radicale et la dimension politique qu’ils adoptent face à cette grève, je ne saurais aucunement les cautionner. Les conséquences de la grève illimitée de l’année dernière sont toujours d’actualité. Certaines structures comme la FMPOS, la FAST, la FSEG et le CESB peinent toujours soit à terminer leur année académique 2009-2010, soit entamer celle 2010-2011, soit retrouver leurs marques. Bon nombres d’étudiants ont échoué et le comble non parce qu’ils n’avaient pas le niveau, mais car ils ont été victimes d’une situation de fait.
Le gouvernement, selon le SNESUP, aurait failli à ses engagements. Mais, qu’en est-il des étudiants. Auront-ils aussi failli à leur engagement ou du moins sont ils responsables des actes posées par le gouvernement ? Le SNESUP prétend engager un bras de fer avec les plus hautes autorités, mais au bout du rouleau qui est ce qui récoltent les pots cassés de cet état de fait ? Certainement les étudiants et la nation malienne car tandis que le gouvernement, lui, continue ses activités, beaucoup de nos professeurs grévistes, eux, vaquent à d’autres occupations et arrivent à joindre les deux bouts à travers des consultations, contrats de prestation, cours qu’ils donnent dans d’autres universités privées et plein d’autres boulots que leur emploi du temps les permets.
Un enseignant proche du SNESUP m’a confié ceci « nous n’allons pas revenir en arrière cette année. Même s’il faut que nous allions à une année blanche pour obtenir gain de cause, nous le ferons et peu importe les conséquences… ». Un autre professeur dans la même discussion enchaine « C’est une question de dignité et de conviction. Les militants du SNEC nous ont trahi en croyant que nous n’arriverons pas, mais nous allons les prouver que nous y arriverons avec ou sans eux (…) nous prouverons à tous les maliens qu’ATT a échoué dans son mandat… ».
Dans cette grève dans laquelle la passion semble prendre le dessus sur la raison, force est de reconnaitre que le SNESUP ne compte pas aussitôt lâcher prise et que les étudiants ont encore beaucoup de temps a passé à la maison.
Il ne s’agit pas pour moi, à travers cet éditorial, de prendre position vis-à-vis du gouvernement. Loin de là, mon objectif est d’amener mon lectorat à comprendre que quelque soit la légitimité des revendications du SNESUP, ce sont les étudiants qui sont entrain de souffrir de leur absence. Le but de cet article n’est pas de faire le procès de qui que ce soit, mais plutôt de lancer un cri de cœur à nos enseignants les invitant à mieux cerner l’impact de leur acte sur les étudiants et le Mali. Je veux, à travers ma plume, faire un plaidoyer en faveur de tous ces étudiants, meurtris dans le plus profond de leur âme, qui ne demande qu’à étudier.
L’expérience vécue l’année dernière prouve de la manière la plus inéluctable que la grève illimitée n’est et ne saurait être la solution à ce problème. J’invite les enseignants et le gouvernement à privilégier le dialogue, la collaboration et l’intérêt national : conditions sine qua non pour la résolution de nos problèmes et la construction de l’école malienne. Mes liens de proximité sont si effectifs avec les enseignants que je me vois dans l’obligation de leur lancer ce cri de cœur afin qu’ils voient plus la souffrance des étudiants que le laxisme de l’Etat.
Quoi que l’on fasse ou l’on dise, des actions ont été posées pour l’amélioration de leurs conditions de vie si les plus grands défis restent à relever, toujours est-il qu’il faut croire et se donner les moyens, tous ensemble, d’y parvenir dans le consensus, la vérité et surtout l’exercice de leur fonction.
FOUSSEYNI MAIGA