Somalie, Zimbabwe, Guinée, Mauritanie, RDC, pour se limiter à ces ombres à un tableau qui est tout sauf celui de l’honneur. En fait, l’Afrique n’est pas seulement mal partie, elle est en train de mal arriver. Et au palmarès de la tristesse, l’année finissante se sera taillée une place de choix.
Certes, les champions de l’optimisme ne manqueront pas de rappeler que pris individuellement et comparés aux années noires, les pays africains ont presque tous fait des progrès concernant le nombre de conflits, les équilibres macro-économiques, l’accès aux services de base comme la santé et l’éducation ainsi que l’expression pluraliste. Mais cette aune est connue. Elle dégage un relent de racisme : un chef d’Etat africain qui n’est pas comme Mugabe est forcément un démocrate et un état subsaharien qui ne se suicide pas comme la Somalie est forcément émergent. Quel mépris ! Comme si le continent, plus que les autres, était, par hérédité, médiocre.
Alors que la condescendance occidentale vis-à-vis des dérives inacceptables de gouvernance, voire d’un projet de médiocratie relève d’une conspiration de…classe. Car, la vérité est dans les chiffres et ceux-ci sont d’une mortelle tristesse. D’abord, l’aide publique au développement, est nettement inférieure au transfert financier effectué vers les banques occidentales par les multinationales opérant sur le continent. Ce qui, au niveau global, dénote un plan contre l’émergence de classes moyennes africaines, les classes moyennes étant partout le moteur du bien-être collectif.
Ensuite, l’aide publique au développement consentie à l’Afrique est inférieure aux ressources transférées par la diaspora africaine vers le continent. Au grand dam des décideurs occidentaux, si l’on veut bien prendre le temps de mesurer les implications réelles des politiques anti émigration d’une Europe qui s’intègre contre les menaces extérieures. Pendant ce temps, l’Afrique se folklorise. Le Nigeria, géant distrait n’a toujours pas compris sa mission historique de locomotive. L’Afrique du Sud qui avait, de toute façon, à corriger sa vision de l’intégration africaine a démontré, en 2008, qu’elle peut être la proie de la xénophobie et des reflexes bananiers.
Le Maghreb, un des derniers bastions du monolithisme, doit résoudre un problème crucial de double loyauté à la fois à l’Union africaine et à l’Union pour la Méditerranée. Sur le continent, les élections se suivent et se ressemblent, sauf pour l’exception ghanéenne avec leur cortège de contestations plus ou moins sanglantes, leurs coûts exorbitants et leurs affligeantes conséquences sur l’image de l’Afrique. A la faveur du pluralisme, les remous liés à l’intégration nationale interpellent l’Etat dans ses formes et ses normes actuelles et donnent raison à ceux qui considèrent l’intégration africaine comme la première infrastructure à mettre en place.
Enfin, les coups d’Etat y ont encore cours arrêtant des processus démocratiques. Le tout dans un contexte mondial déprimé. Le marché, en effet, affronte sa plus sérieuse gueule de bois. Et sans y être préparée, l’Afrique dont la coupe est déjà trop pleine, trinquera encore. Mais seulement l’Afrique des peuples. Pas celle des paradis artificiels et des paradis fiscaux.