Editorial :Poulo : première bourde publique

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« A la Codem, nous nous battrons pour que le président ATT reste jusqu’en 2014 afin qu’il puisse faire les derniers réglages et organiser des élections libres et transparentes. » Sans ces malheureux propos tenus par l’honorable Housseyni A. Guindo dit Poulo dans un entretien à bâtons rompus chez notre confrère « Procès Verbal » (n° 120 du 11 avril 2011), la belle assurance donnée par le Président Amadou Toumani Touré, le 17 mars dernier lors de l’ouverture de la 11ème Journée des municipalités du Mali, de passer le témoin à son successeur élu avant midi le 8 juin 2012, aurait gardé dans les oreilles des Maliens toute la sincérité de sa mélodie. Parlotte pour le moins inconvenante en démocratie, la déclaration du président du parti de la quenouille ne tombe pas seulement comme un cheveu dans la soupe. Elle jure totalement avec le bon sens. Au moins pour quatre raisons.

Premièrement, Poulo prend à la fois à son compte les intentions perfides un temps attribuées faussement au président de l’Adéma-Pasj, Pr. Dioncounda Traoré, et les velléités de conservation du pouvoir dont ATT lui-même a cru devoir se défausser en prenant la nation entière à témoin. Si l’on veut bien le croire, le président de la République a signifié sans aucun nuage qu’il entend se retirer dignement du pouvoir puisque à un an du 8 juin 2012 il n’y a « aucun mandat à harmoniser ; nous sommes en démocratie, il n’y a pas autre chose à inventer. » Poulo prend donc le risque énorme de se vêtir des oripeaux de plus royaliste que le roi lui-même.

Deuxièmement, le contexte actuel de la gouvernance en Afrique hérissé de soubresauts plus ou moins dramatiques ou comiques çà et là et l’évolution politique au plan mondial incitent plutôt à la mesure, à la sagesse et à la clairvoyance. Sur ce point précis, le président de la Codem donne à croire qu’il a décidé de ramer à contre courant de l’histoire. Ce qui n’est ni un signe d’intelligence, ni une preuve de courage politique salutaire.

Troisièmement, nos compatriotes auraient été peu surpris si la fameuse déclaration était venue du Peds, parti politique dit présidentiel (ou des amis du Président) dont lui-même a naguère fustigé le manque de morale. Mais Ahmed Diané Séméga et ses amis, pourtant si bouillants et très peu disposés aux précautions oratoires, n’ont pas osé descendre trop bas au point d’annoncer une quelconque volonté de consacrer des luttes pour proroger de deux ans le mandat d’ATT.

Quatrièmement, c’est la Codem qui se trouvera prise dans de tels faisceaux de suspicions qu’on glosera durant des jours et des jours sur le degré de sa collision avec un ATT toujours sur un coup fourré contre la démocratie malienne. Là, et ce serait franchement triste, Poulo aura discrédité sa formation politique et, au plan personnel, dilapidé son aura, non sans perdre la force de frappe dont on peut légitimement le créditer. Hier perçu comme le nouvel enfant terrible de l’échiquier politique national, le jeune loup aux dents fort bien aiguisées doublé du tribun du peuple, Housseyni A. Guindo risque d’apparaître désormais comme le nouvel échantillon du politicien malien versatile, inconstant et de surcroît-détestable réputation pour un homme politique qui tient à sa personnalité- opportuniste de saison. On imagine la déception de ses fans à travers tout le Mali et hors de nos frontières.

Il reste à espérer que la Codem n’est pas du tout dans la logique proclamée par son président. Il reste à souhaiter que Poulo battra sa coulpe et rattrapera vite cette première bourde publique. Il reste à prier que l’opinion publique soit à son égard toute clémente en lui concédant l’erreur somme toute humaine.
Amadou N’Fa Diallo

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