Editorial : Le remède qui tue le malade

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Autant le dire tout net : ceux qui pariaient sur un probable embrasement de la Guinée contre un retour de la paix définitive en Côte d’Ivoire ont tout faux. En regardant le parcours électoral de ces deux pays, on aperçoit à l’œil nu les deux courbes se croiser.

 

La Guinée a commencé son processus dans le désordre et les tueries pour le terminer par un final aussi inespéré qu’inattendu avec des hommes politiques qui acceptent de mettre le pays, exsangue il est vrai, au dessus de leurs ambitions personnelles. La Côte d’Ivoire elle, a débuté ses élections dans la fête pour la terminer dans le chaos et les tueries. Les élections qui devaient être le remède à tous les maux que ce grand pays trimballe dans le sillage de la mort d’Houphoët Boigny se sont avérées être mortelles pour le malade.

 

Au moment où nous écrivons ces lignes, personne ne sait quelle trajectoire prendra la crispation née de la fin du second tour qui a vu la victoire d’Alassane Ouattara et le hold-up du président sortant Laurent Gbagbo. On peut juste remarquer que la Côte d’Ivoire se retrouve avec deux présidents ayant tous deux prêté serment, deux Premiers ministres et deux gouvernements. La communauté internationale dans son ensemble supplie Laurent Gbagbo d’accepter sa défaite en remisant ses ambitions qu’aucune légitimité ne fonde désormais. Tout porte à croire, au regard de la posture prise par le président sortant, que la situation risque de durer encore quelques temps. En effet, comme l’a écrit notre confrère « Libération », Laurent Gbagbo a adopté la stratégie qui lui a permis de rester au pouvoir c’est-à-dire celle du hérisson. Il s’est recroquevillé sur lui-même, faisant le dos rond, en attendant que la bourrasque passe. Sauf que cette fois-ci, en plus d’avoir la majorité des Ivoiriens contre lui (il a obtenu 48,9% des voix et plus de 60% du territoire n’est pas sous son contrôle), il doit combattre le monde entier. Il peut continuer à crâner en boudant les appels à la raison d’Obama, en refusant de prendre les appels téléphoniques de Sarkozy, en faisant le sourd et le muet face aux condamnations qui déferlent de partout (la prise de position ferme de la CEDEAO lui ôte l’argument que ce sont les Blancs qui veulent sa peau), Laurent Gbagbo sait en son for intérieur qu’il est dans une impasse. Qu’il soit l’otage des faucons de son entourage est probable mais ce sont des faucons qu’il a personnellement dressés. A Abidjan, on a coutume de dire que « cabri mort n’a pas peur de couteau ». Mais « cabri mort » aimerait être bien dépecé.

 

Elhadj Tiégoum Boubèye Maïga

 

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