Editorial : La souris et la fausse couche

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Le sentiment général qui se dégage après la nomination de Modibo Sidibé à la Primature est un sentiment mitigé. Un sentiment largement relayé par la presse, toutes tendances confondues. « Sans surprise » est le titre qui revient le plus souvent à la Une des journaux et des radios. Sans qu’on exactement ce que cela renferme de satisfaction ou de déception. Ce qui n’est pas sans compliqué la tâche du nouveau Premier ministre qui sait désormais que sa seule nomination à la tête du gouvernement ne suffira pas à combler les Maliens qui parient depuis au moins deux ans sur le départ de son prédécesseur.

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rnPour beaucoup de Maliens, la montagne a accouché d’une souris. Ceux-ci ont l’impression que c’est la continuité dans le changement dans la mesure où ils estiment que le nouveau Premier ministre était suffisamment impliqué dans la gestion des affaires de l’Etat pour pouvoir y apporter une quelconque amélioration. Le jugement peut paraître sévère. Mais la vérité est que Modibo Sidibé est un pur produit du système qu’il est appelé à diriger. Certains, sans complaisance, rappellent que l’homme traîne une mauvaise image de son asociabilité supposée. Ainsi, il serait imbu de sa personne, regarde le monde de haut si ce n’est pas avec dédain ; il serait un intrigant et un manœuvrier qui aurait causé la perte de ses prédécesseurs pour pouvoir occuper le fauteuil primatorial ; il serait un grand manipulateur devant l’éternel parvenant à contrôler jusqu’à la respiration du président de la République. Il y a certainement un peu d’excès dans cette perception d’un homme à qui visiblement on prête beaucoup de pouvoirs, jusqu’au mythe.
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rnMais ces jugements, pour erronés qu’ils puissent paraître devraient baliser le chemin du nouveau Premier ministre. A lui de montrer son vrai visage, sa véritable personnalité et de briser la glace afin que les Maliens puissent se reconnaître en lui. Parce que loin d’être des détails, ce sont des qualités qu’ils devra promouvoir parce que complétant ses incontestables compétences. Oh, il ne viendrait à l’idée de personne de voir le Premier ministre « s’encanailler » rien que pour complaire à ses gouvernés. Mais, sans doute un peu d’effort pour montrer qu’il n’est pas le monstre froid et insensible que d’aucuns dépeignent avec une certaine délectation.

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A côté du sentiment mitigé des Maliens moyens, il y a cet autre jugement des hommes politiques. C’est une véritable charge à l’encontre du nouveau Premier ministre et de son mentor perché sur la colline. Les hommes politiques eux, ne parlent pas de la colline ayant accouché d’une souris, mais carrément de mépris et de dédain pour les partis politiques. Notamment pour la majorité ayant battu campagne pour ATT et qui se voit souffler la Primature par un inconnu des arènes politiques et qui plus est un policier de son état.
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rnLe Parena qui a sonné la charge à travers un communiqué rendu public dès la publication du décret de nomination de Modibo Sidibé craint la poursuite de la marginalisation des partis politiques et en appelle à tous les partis politiques pour un sursaut afin de réhabiliter le fait partisan et de mieux ancrer les principes démocratiques. La tonalité du Parena est juste un ton au-dessus du RPM qui a décidé d’inscrire ses actions dans l’opposition. De fait, contrairement à ses prédécesseurs, Modibo Sidibé aura affaire à une opposition combative avec l’espoir de rallier à sa cause le maximum de Maliens qui attendent depuis fort longtemps des lendemains meilleurs. Et comme le président ATT est à son dernier mandat, il est fort à parier que l’opposition ne rendra pas la tâche facile dans la perspective, lointaine certes, des élections de 2012.

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Face à une situation où l’état de grâce n’est pas de rigueur, le nouveau Premier ministre devra disposer d’une équipe gouvernementale à hauteur des attentes. Les hommes et les femmes qui composeront le gouvernement devront répondre aux critères définis par le président de la République lui-même : intégrité ; compétence, patriotisme. A ce niveau aucune complaisance ne sera permise et ATT, mieux que quiconque, le sait ; lui qui est à son dernier mandat. Toute autre considération pourrait donner l’impression que ce n’est pas d’une souris que la montagne a accouché mais qu’il y a eu carrément une fausse couche.

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Elhadj Tiégoum Boubèye Maïga

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 5 octobre 2007
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