Editorial : Kadhafi l’humaniste et le tyran

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En Afrique on ne se réjouit pas de la mort d’un ennemi. Soit ! Le tyran Kadhafi aurait été battu à mort par son peuple en colère. Colère contre une dictature qui a duré quarante deux ans (1969).Comme un roi Mouammar Kadhafi a régné en Libye sans partage. Aussi controversé, Mouammar Kadhafi a fait tuer des innocents.

Par des assassinats dits terroristes, par des bombardements dits impérialistes. Le libyen Mouammar Kadhafi se prévaut de la révolution des peuples du Tiers Monde contre l’impérialisme, en particulier américain. En quoi le régime de Kadhafi gênait-il pour que le monde entier, ou presque conspire contre lui ? Par ce que sa révolution s’inspirait de la terreur, affirment certains observateurs.

On a beaucoup dit et écrit sur la Jamahiriya et son inspirateur. Ce pays est souvent présenté comme un immense camp d’entraînement pour terroristes dont Kadhafi fut l’organisateur. Au lendemain de son arrivée au pouvoir, le leader libyen n’a certes pas caché les principes qui l’inspiraient : unir le monde arabe et rendre l’Afrique aux Africains.

Cette vision des choses, il luttera avec acharnement pour la concrétiser, fut-ce par la force, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de son pays. Mieux, il a fait siennes les causes des peuples déshérités, des Palestiniens aux Irlandais du Nord, en passant par les Arméniens, les Basques, les Saharaouis…

Tripoli était devenu un centre de gravité pour tous les opposants réels ou présumés. Kadhafi était leur  bailleur de fonds prodigue, voire un fournisseur d’armes. Parmi ses proches, il y avait le Palestinien Abou Nidal qui, après avoir navigué entre Beyrouth, Damas et Bagdad, a fini par trouver refuge à Tripoli. Cette alliance avec l’homme le plus dangereux du monde ne pouvait qu’irriter à l’extrême les pays occidentaux.

Abou Nidal en Libye cela signifiait combattre l’impérialisme partout ou il se trouvait. Pour cela Kadhafi avait installé dans son pays et ailleurs des structures adéquates. La manne pétrolière l’y a aidée. Et, pour mieux se consacrer à la réalisation de sa vision, il s’était déchargé de ses fonctions administratives en 1977, laissant aux Comités  populaires la direction de l’Etat. De toute façon, il ne craignait pas qu’un autre prenne sa place. L’Etat des masses qu’il a mis en place ne permettait pas à l’armée ou toute autre force paramilitaire d’imposer sa loi.

D’une part une grande partie de la population était armée, ce qui répondait à l’idée du peuple en armes. D’autre part, Kadhafi avait crée les comités révolutionnaires, devenus un véritable Etat dans un Etat. Le Guide s’était embarqué dans une aventure personnelle dangereuse et menait une mauvaise politique pour la Libye, pour le Maghreb, pour l’Afrique et pour le monde arabe.

Kadhafi n’avait pas d’amis mais des intérêts. Pour cela un diplomate raconte : «Les Libyens viennent toujours proposer leur coopération avec trois équipes : les idéologues, qui cherchent d’abord à placer leur salade ; si vous les approuver, les techniciens vous demandent ce dont vous avez besoin ; les comptables n’ont qu’à payer.» Celui qui mordait à son hameçon était avalé. Il recrutait ses mercenaires parmi les pauvres gosses tchadiens, tunisiens, maliens, nigériens, à qui il payait 1000 dollars par mois. C’est regrettable que l’humaniste et le tyran soient battus à mort par son propre peuple en colère. La situation en Libye est aujourd’hui mouvante et contradictoire, mais elle est surtout difficile à maîtriser par un Conseil National de Transition (CNT) qui n’a pas toujours les moyens de sa volonté politique.

 

Comment remettre la Libye sur la voie de la démocratie dans ce pays, où les ficelles des Finances publiques étaient tirées par le Guide ? 

 

 

Amy SANOGO

 

 


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