L’information a fait froid dans le dos, le dimanche dernier, la collision entre un car de transport et un minibus sur la route de Ségou a occasionné la mort de 25 passagers et fait 20 blessés graves. Comme d’habitude, certaines autorités se sont précipitées sur les lieux du drame et d’autres au chevet des rescapés. Et comme d’habitude, elles ne se sont pas gênées de faire la morale. C’est ainsi qu’on a pu entendre le ministre de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, le général Sadio Gassama, s’en prendre aux transporteurs dont les véhicules ne sont pas soumis à l’entretien. Il aurait fallu bien se nettoyer les oreilles pour entendre le ministre. Quand on sait que les drames de la route avec leur cortège de morts et de blessés sont du fait des incuries des autorités, il y a à se demander si en plus de compter les victimes, les autorités ne chercheraient pas à les culpabiliser.
Il n’est un secret pour personne, à commencer le ministre qui joue au scandalisé et au moralisateur, qu’il y a une connivence certaines entre certains agents de la sécurité et les transporteurs. Que ce soit au niveau du transport urbain ou au niveau du transport interurbain, cette connivence faite de bakchich et de passe-droits autorise la circulation à de véritables tombeaux roulants. Conséquence, les pauvres passagers qui n’ont pas d’autres choix sont les premières victimes. Il n’est un secret pour personne, y compris pour le ministre, que l’entretien technique s’effectue avec beaucoup de lâcheté. Avec des connaissances dans le circuit ou quelques billets de banque, on peut se procurer la vignette attestant que son véhicule est propre à la consommation. On se rappelle que lors de son plaidoyer pour la sécurité routière, le président de la République avait décrit par le menu la manière dont les usagers opèrent pour échapper à un contrôle technique rigoureux. Mais dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres, les autorités en charge de ce secteur privilégient la propagande. Dès que le président de la République parle d’un problème, les propagandistes sortent les tambours et les trompettes pour scander des slogans et puis plus rien.
Or la sécurité routière est chose trop sérieuse pour en faire un sujet de propagande. On continue de compter nos morts et nos blessés (rien que pour l’année dernier, on a comptabilisé plus de 573 tués et 8838 blessés sur la route, chiffre officiel). Que les autorités ne puissent faire diminuer le taux des accidents, ce n’est pas tolérable ; qu’elles ne puissent obtenir l’adhésion des usagers à la politique de la sécurité routière, cela n’est pas acceptable ; mais qu’en plus elles tentent de se défausser sur les victimes, là c’est vraiment le pompon.
Elhadj Tiégoum Boubèye Maïga