Adam THIAM, un moine inoxydable du journalisme africain contemporain, s’en est allé.
Le monde de la presse africaine est en deuil. Une de ses figures les plus emblématiques vient de tirer sa révérence. Il s’agit du brillant journaliste malien et analyste politique émérite Adam THIAM. Il nous a quittés. Sans bruit. Dans la grandeur et la générosité de son cœur et de cette lourde encyclopédie ambulante de faire du bon journalisme en Afrique, au delà de son si cher Mali natal. Adam THIAM est une institution médiatique labellisée. Évoquer seulement son nom dans les chaumières de Bamako et dans plusieurs capitales du continent africain suffisait pour s’apercevoir de ce brillant sujet, d’un esprit altruiste anti-salomonien et rop attaché au journalisme dogmatique. Adam était d’une générosité extrême. Il la savait partager avec son univers proche, peu lointain et lointain. Un cœur d’or qui ne trichait pas. Notre relation confraternelle était frappée du sceau de la chaleur humaine et du respect mutuel. Dans nos pérégrinations à travers l’Afrique, l’Europe et l’Asie d’homme de presse, Adam, l’orthodoxie en bandoulière avait ce don inouï de reconnaître le talent caché ou qui sautait à l’œil de ses confrères. En 2000, il me fit la remarque en marge d’une conférence internationale à Bamako. ‘’ Je lis beaucoup tes articles mais surtout des enquêtes exclusives‘’. D’un avenant débordant, sa main dans la mienne, pour une première rencontre, l’icône Adam THIAM m’avait déjà mis dans son cœur et son carnet d’adresses si riche. Quelques minutes après, bien réseauté, il balança tout de go avec beaucoup d’humour: ‘On m’a dit que tu as bossé à La Lettre du Continent sous Antoine Glaser. Ça se savait peu. Seuls les initiés tuyautés étaient au parfum des visiteurs assidus de la Rue Montmartre ou des Grands Boulevards ( 2ème arrondissement parisien où est établi le siège de cette publication confidentielle. ‘’Tu sais, je complimente rarement mes confrères, pour éviter qu’ils prennent la grosse tête’’. Adam était un moine dans l’exercice du métier de journaliste et était d’un coefficient d’intelligence élevé. Nos chemins se croisent en 2006 grâce au gigantesque projet de création d’un journal panafricain LES AFRIQUES où je m’occupais des Grandes Enquêtes dans la région ouest-africaine. Adam avait été approché par une autre icône de la presse africaine, le Sénégalais Cherif ElValide SEYE, rappelé à DIEU en 2014. Cherif ElValide, qui a écrit les plus belles pages du célèbre quotidien SUD QUOTIDIEN, une publication de référence. Adam y pigera à cadence séquentielle sous un pseudo. Nous formions une belle équipe avec des journalistes de renom tels que Adama WADE, Dominique Flaux, Cherif ElValide SEYE, Walid Kefi. À la même période, Adam était la plume chouchoutée au Sahel du magazine Jeune Afrique avec Cherif Ouazani. Adam était devenu une institution, nous le rappelions plus haut. Dans l’aréopage des hommes de médias en Afrique, il était une voix autorisée. Presque un passage obligé des confrères qui prenaient de ses nouvelles en séjour en terre malienne. Nous étions proches. La chaleur de nos rapports s’est intensifiée dans l’ombre du Président nigérien ISSOUFOU MAHAMADOU. Nous partagions cet engagement constant et historique à accompagner le Président ISSOUFOU avant sa prise du pouvoir et durant ses deux mandatures. Il faisait partie des invités de marque de l’homme fort de Niamey, lequel prenait soin bien de lui. Mais, surtout, la fertilité croisée de nos échanges sur des questions de géopolitique du Sahel. En 2015, alors que je me trouvais à l’hôtel GAWEYE de Niamey, la garde rapprochée du palais est venue le chercher. Direction: Dandaji, le village d’Issoufou ( région de Tahoua). Il y passa quelques jours avant de me retrouver à l’hôtel. Il savait bien mes rapports avec certains dignitaires du régime d’Issoufou. Ses amis l’étaient aussi pour moi. De Dakar à Addis Abeba, Adam faisait partie des journalistes les plus connectés. Notre estime réciproque prenait de la voilure au fil des années. Au détour d’un bon riz au poisson sénégalais dans un des quartiers du centre ville de Niamey, sur mon invitation, on refaisait le monde et parlions beaucoup des défis et de l’avenir du journalisme africain. Petite confidence: Dans les tuyaux, nous avions caressé l’ambition de créer un magazine panafricain de première main Afrique 24 Heures calqué au format et contenus exclusifs sur un modèle économique bâti sur des abonnements cryptés. Hélas, les contraintes professionnelles du moment nous éloigneront de ce projet futuriste, tant rêvé par des amis décideurs communs. Le ministre Igor Diarra me le rappelait il y’a quelques mois en ces termes. ‘’Mon voeu le plus cher est que tous les grands noms de la presse ouest-africaine se retrouvent autour d’un grand journal pour l’Afrique’’. Adam lisait tout et du tout. Mais, avait du respect pour les brillants journalistes. Faire du bon journalisme et bien écrire, c’était du Adam.. Tout craché. Il me le rendait bien.
Sa mort nous a endeuillés. Une Triste nouvelle. Comme on dit: le destin est impénétrable. Adam était un ami et confident de toujours. Confidentiel Afrique est une partie de lui. Nous le savions. Adam était à la quête de l’info stratégique et pas à la portée du public. Nous parlions très souvent de mes enquêtes exclusives aussi bien quand j’étais au journal Les Afriques qu’à Confidentiel Afrique.
Mon dernier passage à Bamako, il m’a fait l’honneur de passer à table autour d’un plat copieux du To à la sauce d’arachide dans une convivialité familiale aux côtés de sa gentille épouse, sa fille Rakia et de son éternel ami et confident Amadou DIA. Je n’oublie pas son fils Jaffar.
Confidentiel Afrique présente ses sincères condoléances à toute sa famille, ses proches et à la presse malienne.
Par Ismael AIDARA, Directeur Éditorial de Confidentiel Afrique