Edito : Sale guerre pour l’Otan, guerre juste pour Kadhafi

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Trois mois et deux mille frappes plus tard, Kadhafi est toujours là. Réduit à raser les murs et passer d’un bunker à l’autre. C’est, en soi,  une demi-défaite pour ce bédouin qui snobait le lustre des palaces pour bivouaquer à la belle étoile où qu’il se rendît. Mais, plus les bombes pleuvent sur sa résidence, plus Kadhafi s’accroche. Ce à quoi il s’accroche ce n’est plus son pouvoir qui  n’en est vraiment plus un. Il a aussi, sans doute, perdu l’illusion d’une main amie qui le sortira de la mauvaise passe où il se trouve. Car les forts qu’il croyait être ses amis depuis qu’il est devenu plus fréquentable, sont ses bourreaux du jour alors que ses amis faibles ne sont pas forts, qu’il s’agisse du Mali, du Tchad ou du Niger.

D’ailleurs, l’Afrique le lâche. Le Sénégal, l’ami d’antan, n’a pas fait dans la dentelle : pour lui, c’est  le Cnt, point barre. Zuma n’était allé chez le Guide que pour lui offrir l’hospitalité à Capetown, ce qui n’est qu’une traduction pudique de l’ultimatum de Paris, Londres et Washington.  L’Algérie se montre vocale contre les raids sur Tripoli, mais elle gèle les avoirs libyens sur son sol en application, se défend-elle, d’une décision onusienne. Le Gabon ne récuse pas ouvertement Kadhafi mais pour Ali Bongo -qui lui doit indirectement son prénom musulman-, la messe semble dite.  La Mauritanie, et c’est la pépite du mois, qui dirigeait le panel de l’Ua sur la crise libyenne, paraît elle aussi avoir viré sa cuti depuis vingt quatre heures.

Ses sympathisants le fuient mais Kadhafi, lui, ne bougera pas d’un iota. Et il l’a dit. Il mise sur trois scénarios : Premier scénario : une guerre longue qui usera et ruinera l’Otan. Mais celle-ci a compris le manège et elle  met  le turbo pour qu’il « dégage ». Deuxième scénario : que le temps aidant, le monde se convainque que le régime de Tripoli fait plus face à une expédition punitive avec les horreurs du Ténéré et de Lockerbie en filigrane que d’une révolution jasmin.

Ce pari n’est pas loin d’être gagné, car même chez les « démocrates » authentiques le malaise grandit devant les événements de Libye. Troisième scénario et le plus probable : mourir s’il n’y a pas d’autre choix, mais mourir dans son pays et en résistant. La bonne vieille recette du martyre. Avec un effet probable: sur le continent, la mort du Guide mettra les dirigeants en difficulté devant leurs peuples. Et elle pourrait, contre toute attente, réarmer le discours un peu blasé du mouvement jihadiste contre l’Occident dont le mouvement social, les consciences de la gauche ultra et quelques francs-tireurs -lobbyistes ou avocats- crient, depuis peu, à l’agression coloniale en Libye. C’est vraiment une sale guerre, de quelque côté que l’on se situe.
Adam Thiam

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