La presse occidentale n’oublie jamais de le rappeler : la Russie et la Chine n’opposent leur véto que pour protéger la dictature. Il se dit depuis toujours que ce sont ces ex-républiques rouges depuis peu reconverties à la religion du bon de commande qui constituent l’obstacle à l’intervention musclée de l’Onu pour mettre fin à la souffrance du peuple en Côte d’Ivoire. Même chose depuis peu sur la Libye où l’on craint que les mesures d’exclusion de l’espace aérien préconisées par Londres et Washington pour mettre fin au bombardement des villes insurgées de la Tyrénaïque par l’aviation de Tripoli.
Naturellement, Chinois et Russes, sauf s’ils sont utilisés comme prétexte, ne prennent pas ces positions à cause de leur passion africaine. Les Africains meurent en Russie comme des mouches. Les populations russes vivent dans une dèche des plus noires alors que leurs oligargues siphonnent le pays. Quant à la Chine, c’est connu, le continent n’est pour elle qu’un marché à conquérir coûte que coûte, et le plus souvent à conquérir par la condescendance, la corruption, des dons fictifs et des marchés « compétitifs » qui sont autant de leurres. En fait, c’est parce qu’elles sont loin d’être des démocraties que ces pays siègent au sein du Conseil de Sécurité, rappelant ainsi l’impérieuse urgence de reformer cet outil primordial de la gouvernance mondiale.
La rue africaine est, bien entendu, généralement courte sur la question : elle prétend que l’Amérique peut bien agir en Côte d’Ivoire ou en Libye comme elle l’a fait en Irak, seule et dans le plus total mépris de l’Onu. Mais il ne devrait être question d’adhérer à cette politique de l’arrogance et du fait accompli. Aucun pas, fût-il hyperpuissant, ne doit fouler au pied le multilatéralisme.
Par conséquent, il s’agit pour nous citoyens africains d’avoir le courage d’interpeller la Russie et la Chine, de leur demander de choisir enfin les peuples et non les présidents. Il faut leur dire : attention, les dettes que nous avons contractées avec elle, sont remboursées par les nations et pas par les présidents. Il faut le dire très haut pour que l’entendent nos parlements, ceux qui ne sont pas gênés de rester une simple chambre d’enregistrement, comme ceux qui font l’effort d’être les véritables contrôleurs de l’Exécutif.
Adam Thiam
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