Fais avec ta tête et tu seras à l’abri des surprises, c’est Confucius qui le disait et le propos a été repris dans tous les manuels de stratégie guerrière, des siècles et des siècles. Il faut croire que le principe a de beaux jours devant lui, en particulier au Mali. En effet, il faut le rappeler à nos dirigeants : gouverner, conduire la Nation, diriger le peuple est une question plus de mental, d’analyse, de calcul, d’opportunité que de cœur. Faussement, l’on avait pensé que c’est le siège du génie, en réalité chaque fois qu’il s’est trouvé investissant le domaine des choses concrètes, la gestion du quotidien et de la projection dans l’avenir, il a faussé tous les attentes et perverti les démarches. Parce que le cœur c’est cette chose versatile qui épouse de l’humeur et enfante le rêve.
Le débat en cours à l’Assemblée Nationale autour de la Déclaration de Politique Générale de la nouvelle Premier ministre va devoir, pour un pan essentiel, son contenu à la part que s’arroge le cœur. Depuis près de six mois, des voix autorisées s’élèvent pour obtenir du chef de l’Etat l’abandon de la réforme constitutionnelle qui malgré son importance n’a pas de temps d’être entreprise avec la rigueur nécessaire à un si grand dossier .Toute la classe politique , à l’ unisson recommandait que l’on consacre les quelques heures qui restent de la présente mandature a réussir les élections de 2012.
Mais plus on tire la sonnette d’alarme plus ATT baisse le volume pour ne pas l’entendre. Plus la démonstration lui est faite par ses propres services des difficultés liées à la mise en œuvre de ce qui devient chaque jour son grand dessein, plus dans un style qui lui est désormais connu, l’emporte pièce , il balaie tout d’un revers et par des pirouettes verbales s’agrippe à son idée. C’est que Att a fait de sa réforme constitutionnelle une condition sine qua non à l’avancée du pays, une question personnelle, alors que plus que lui c’est du Mali qu’il s’agit. Il écoute attentivement son cœur en particulier la petite voix qui conduit à l’erreur. Il relègue dans un coin obscur l’analyse froide dépassionnée et rigoureuse du technicien courageux qui ose lui dire la vérité, celle qui deviendra historique quand on aura constaté dans un an l’échec d’une entreprise que l’on a menée plus au trot que sur la pointe des pieds.
Oui, Il faut rêver le pays Maliba, les yeux fermés ou pas, en tracer les moindres sillons, évaluer l’ensemble de l’édifice puis le matin venu, confronter le rêve à la réalité, à la réalité du terrain. Gouverner c’est comme manger un plat chaud, il faut de la patience et de l’astuce. Car, après tout, à quoi bon se hâter quand le successeur convaincu de la médiocrité du travail accompli débarque tout simplement ce que l’on a plus réalisé avec un cœur trompeur qu’avec la lucidité terne mais efficace suggérée par les contradicteurs.
S.El Moctar Kounta