Une formidable opportunité pour l’Afrique du cercle vertueux. Mais un cauchemar pour l’Afrique du cercle vicieux et pour le monde. Telles étaient l’espérance et la hantise d’Alpha Oumar Konaré à l’Union africaine quand il entretenait ses tribunes successives sur la démographie du continent.
Qui avait, hier, la forte probabilité de donner à la planète son septième milliard de pensionnaire. En tout cas, l’Afrique c’est aujourd’hui un milliard d’habitants qui seront trois milliards dans un demi-siècle. Plus significatif, le Nigéria sera la troisième puissance démographique au monde. Si les tendances actuelles continuent. Mais si toutes les tendances actuelles continuent, les cinquante prochaines années du continent ressembleront au cinquantenaire sortant. La natalité débridée côtoierait la misère crasse parce que le taux de croissance démographique neutraliserait un taux de croissance économique qui peine à atteindre les 5% quand celle des continents gagnants est à deux chiffres.
La mauvaise gouvernance laissera la spirale inflationniste élever le seuil de pauvreté absolue à plus de 5 dollars et faire de nos villes d’énormes cités-mouroirs où les gangs feraient la loi avec la complicité assumée de ce qu’on appelle, non sans courage, les forces de l’ordre. Les mécanismes traditionnels de solidarité déjà mis à mal s’effondreraient totalement et ce qu’il reste de la précieuse institution familiale avec. Le courant démocratique, de plus en plus faible depuis 1990, sauf là où l’Occident décide que trop c’est trop, vulgarisera partout des caricatures d’élections, d’institutions et de morale publique. La charité internationale finance déjà nos malades du sida, du palu et nos femmes enceintes. La mentalité d’assistant qui est devenue la nôtre lui demandera sans doute davantage, au nom des objectifs du développement du millénaire.
Un éditorial écrit par Cassandre ? Oui mais qui sait que rien de tout cela n’est une fatalité. L’Afrique peut se repositionner pour gagner toutes ses batailles. Il s’agit cependant de l’Afrique sincère de la vraie démocratie et de la bonne gouvernance. Pas celle du camouflage et des losers. C’est-à-dire l’Afrique d’aujourd’hui. Et là ce n’est pas Cassandre qui parle.
Adam Thiam