Edito inter / Deauville et les Ben Laden à venir

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Deauville est encore loin du monde promis par Sarkozy le candidat de la rupture et Obama le président lyrique de l’Amérique post-raciale. Le premier donne c’est vrai, l’impression qu’il se sent mal dans un Conseil de sécurité qui n’est que le forum fermé des vainqueurs de 1945 et plaide pour une réforme de l’Onu qui tienne compte des pays émergents et du poids de l’Afrique demain.

Il a engagé également les forces françaises dans l’épilogue d’une tragédie qui, au-delà de la Côte d’Ivoire, affectait la sous région ouest africaine et quoiqu’en on dise, c’était pour défendre le droit. Mais peut-on oublier que sous la présidence française, il obtint de Taubira un rapport salutaire sur les Accords de partenariat économique et qu’il n’en parla plus jamais ? Peut-on oublier qu’au lieu du pont entre l’Europe et l’Afrique, il s’est battu pour le mur qu’est l’Union pour la Méditerranée? Sarkozy, l’hôte de Deauville est l’enfant des autoroutes de l’information. Il n’est pas, et l’histoire ne le retiendra pas comme tel, l’apôtre d’un monde plus juste et plus solidaire.

Et Obama le rejoindra dans cette bulle crevée par la froide analyse de leurs comportements respectifs. Sur la Libye un peu : car il devient de plus en plus clair qu’il y avait erreur sur la marchandise, que pour fantasque qu’il soit, Kadhafi avait pu faire de la Libye un pays prospère dont le revenu annuel moyen n’a rien à voir avec celui de la Tunisie ou de l’Egypte.

La mal vie qui sous tend le printemps arabe ne s’applique pas par conséquent à cet eldorado pétrolier. Pour ce qui est de la démocratie et de la justice, engager les mirages et les F15 pour les promouvoir est une douce musique à nos oreilles. Mais pas quand l’exception est faite pour la Chine liberticide ou la Birmanie où « Total » fait la loi. Sur la Palestine, le double standard plus criard fonde l’amertume de tous ceux qui défendent les principes de la morale et de l’éthique. Il y a cinquante ans, le défi était de reconnaître Israël. Aujourd’hui, c’est la Palestine spoliée qui se bat pour la reconnaissance.

La remettre dans ses frontières de 1967 ne devrait pas être un exploit mais un préalable. Et même là, l’Amérique d’Obama se rétracte après l’effet de manche. Offrir Ben Laden aux requins n’est pas la condition de la paix du monde. Celle-ci passe l’humilité d’un Occident qui humilie les deux tiers de la planète, le prive du juste salaire de son labeur, donne la carotte à ses rares chouchous et sort le bâton contre tous les autres. A cet égard, Deauville comme les forums à venir qui perpétuent l’ordre des nantis est la continuation de la violence et le berceau d’autres Ben Laden. Et inviter Alpha Condé, Mahamadou Issoufi ou Alassane Ouattara n’y changera rien

Adam Thiam

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