Aujourd’hui, il est rare de suivre une émission ou un film à la télévision ou dans lequel les personnages ne consomment pas de grandes quantités d’alcool. Ces personnages, comme les acteurs des publicités sur l’alcool, sont présentés, à des degrés divers, comme puissant, sexy, cool, spontanés et drôles. La promotion à outrance de l’alcool et du sexe dans les médias classiques et conventionnels n’est-elle pas en train de briser l’avenir de notre jeunesse, surtout féminine ? Nos enfants ne sont-ils pas en train de suivre les valeurs prônées par l’économie de marché au détriment de nos valeurs socioculturelles?
Ces questions ont leur pesant d’or. D’autant plus que ce qui se passe aujourd’hui est davantage lié à la marche d’un monde décloisonné avec tous les travers propres au relâchement des ressorts identitaires qu’à la responsabilité exclusive d’un peuple donné. Les Occidentaux ne sont pas responsables du désastre. D’ailleurs, les mêmes problématiques préoccupent les autorités dans ces pays développés, où l’on parle de plus en plus d’interdiction pure et simple de la publicité sur l’alcool. A mon humble avis, il n’y a pas mille solutions. Il faut interdire la production et la consommation de l’alcool et de tous les autres produits stupéfiants au Mali. C’est possible ! Il y a des pays – notamment au Moyen-Orient – où l’alcool est interdit et là-bas, on ne ramasse pas d’ivrognes dans la rue, même s’il est vrai qu’aucune mesure restrictive dans le domaine des libertés n’est infaillible.
Un enfant grandit en se nourrissant de ce qui l’entoure car, il est d’une curiosité extrême. Cette curiosité nourrit son désir d’expérimentation et est là à dessein, pour lui permettre de se développer en apprenant. Voilà pourquoi le dicton “fais ce que je dis et pas ce que je fais” est une sentence qui marche peu avec un enfant. Nos ancêtres avaient compris certainement cela et se sont attachés à créer l’environnement propice à un bon apprentissage et souvent, il était requis de l’enfant d’observer dans le silence ses aînés. Il est important de bien peser ses mots lorsqu’on explique le monde à un enfant et surtout de se réjouir de sa curiosité insatiable et de la stimuler sans craindre d’être perturbé par ses questions, quelles qu’elles soient. On dit souvent : “il n’existe pas de mauvaises questions, mais des mauvaises réponses”. La télévision n’a jamais été, selon plusieurs observateurs, un outil d’éducation. Elle est un outil d’information, voire de désinformation, de propagande ou de divertissement ou d’abrutissement. Elle est comme un couteau à double tranchant. Nous pensons qu’elle n’est pas la cause de l’alcoolisation effrénée des jeunes. Cet alcoolisation entre dans un ensemble de comportements à risque des jeunes: sorties nocturnes, drogues, comportements sexuels à risque qui sont les symptômes d’un mal-être, ou d’une absence de repères engendrés par une absence de cadre et de règles clairement établies, expliquées et appliquées. Je pense que l’on devrait regarder en soi et à l’intérieur de notre pays ce qui ne va pas avant de s’en prendre si facilement aux autres, notamment l’Occident.
Les problèmes que l’on rencontre avec nos jeunes sont cependant universels. Il serait bon de savoir quels seraient les dénominateurs communs et les éléments différentiels entre un jeune ivoirien, malien, sénégalais ou, plus intéressant encore, rwandais.
En tout cas, deux solutions me viennent en tête en analysant cette dérive juvénile. La première est la diminution voire l’interdiction de l’importation de l’alcool. Ensuite, interdire l’accès des bars et autres maquis aux adolescents, en exigeant la présentation d’une pièce d’identité en cours de validation pour l’accès. Cette dernière solution n’est peut-être pas très efficace, mais elle peut dissuader les ados qui se cachent pour prendre de l’alcool.
En dehors de ces mesures coercitives, je ne vois pas comment notre société pourra échapper aux aléas de cette mode néfaste et attentatoire à nos valeurs sociétales.
Aliou Touré