Edito / Côte d’Ivoire : Le bal des vautours

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Cinquante-unième élément onusien décédé en Côte d’Ivoire depuis 2004, c’est une courte maladie, précise l’Onuci, qui a emporté hier le Sénégalais Abou Madi Diallo. La précision vaut son pesant d’or. Mais elle ne saurait cacher l’évidence : la folie meurtrière s’est de nouveau emparée de la Côte d’Ivoire, la ramenant à ses terribles frayeurs d’antan que le scrutin du 28 novembre 2010 -c’était le but de tout l’exercice- était pourtant censé conjurer pour de bon.

Or il n’en est rien : le même peuple s’entredéchire. Ses femmes, comme le 26 février dernier ont crié leur ras-le bol à travers un concert de casseroles qui n’eut pas de spectateurs à l’internationale parce que les maîtres du monde se soucient plus du pipeline libyen que du cacao ivoirien. Les coupures sélectives d’eau et d’électricité reviennent consacrant l’innommable : le délit de région ou de résidence. L’armée qui se républicanisait retourne à son statut de milice presqu’ethnique et les milices véritablement ethniques ou régionales gagnent en légitimité.

Et ainsi l’une des économies les plus enviées de l’époque tombe dans un système D qu’on ne trouvait plus qu’au Zaîre de Mobutu à son déclin. La Côte d’Ivoire rechute, elle meurt, on la tue. Et tout ce qu’on lui offre c’est un linceul offert par l’Union africaine à cinq présidents dont le contrat a été prorogé et qui sera encore prorogé, personne n’étant pressé, il semble, du retour de la grande Côte d’Ivoire. Tragique, car il est devenu clair comme de l’eau de roche que la solution ne viendra pas du Conseil de sécurité.

 Les intérêts sud africains défendus avec une ignominie de vautour sont plus audibles que les sanglots des femmes violées. La doctrine de l’Elysée, hélas nous n’avons pas d’autre grille de lecture, ce n’est pas la généreuse devise de France mais les analyses de risque produites par Bolloré ou Bouygues. Mais au-delà de la Côte d’Ivoire, c’est chacun d’entre nous qu’on laisse assassiner. La Cedeao a un impératif historique, c’est de reprendre la main et de restituer ce pays à son destin trahi par la boulimie du pouvoir. Force doit rester au peuple ivoirien réunifié. Tout le reste est négociable. Car ne nous y trompons-plus: le salut ne viendra ni de Pretoria, ni de Paris, ni de Washington.

Adam Thiam

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