Nous nous acheminons vers le 29 juillet, inéluctablement. La date est connue de tous et l’événement attendu : la consultation devant permettre le renouvellement du mandat premier magistrat de la République. L’assurance en a été donnée : l’élection aura lieu. Voilà pour la certitude. A côté d’elle, que d’incertitudes !
D’abord, qui va voter ? Le peuple, bien sûr, est-on tenté de répondre. Seulement, le peuple ne se trouve pas dans les mêmes dispositions que l’on soit du Nord ou du Sud. L’insécurité fait planer le doute sur la participation de certaines localités au vote. Le gouvernement a promis la sécurisation du Centre et le retour de l’administration dans ces localités. Une action d’envergure des forces armées a été signalée, le 8 mars, non loin de Dialloubé, contre les terroristes. Cependant, il existe comme le revers de la médaille avec les nouvelles en provenance de Kikara (cercle de Douentza) et de Djenné : au vu et au su de tout le monde, en plein jour, des actions planifiées et exécutées en toute tranquillité : là, le second cycle d’une école fondamentale, ici, un chantier occupé à la construction d’un barrage, livrés aux flammes. Ce n’est pas seulement l’insécurité qui s’oppose à la tenue du vote dans ces circonscriptions ; c’est également le sentiment tirant sa substance dans cette interrogation : « A quoi bon » ?
Dans ce qu’il est convenu d’appeler le Nord, la CMA et la Plateforme ont annoncé leur incapacité à respecter leurs engagements pour la mise en œuvre des dispositions de l’Accord d’Alger, reconnaissant n’exercer aucun pouvoir sur les régions qu’elles contrôlent. N’est-ce pas l’occasion pour ceux qui nous tiennent sous tutelle d’autoriser, enfin, le redéploiement de nos forces armées et de sécurité dans ces régions, tant il est vrai que la nature a horreur du vide ? Une première erreur d’appréciation de la part de François Hollande a permis au MNLA de se remettre en selle. Une seconde erreur d’appréciation serait de continuer à croire que les autorités intérimaires pourraient fonctionner à souhait sans, au préalable, l’effectivité du DDR.
A Bamako, c’est plutôt l’expectative. Tout se passe comme si chacun préfère donner le temps au temps. Des candidats se sont déclarés, certes ; mais ils n’appartiennent à aucun des grands partis traditionnels. Les responsables, au sein des grands états majors, jaugent la situation, se rencontrent, se concertent, souvent dans la plus grande discrétion, la tendance étant à la constitution d’un front pour l’alternance. Le Premier ministre œuvre à serrer les rangs autour de la candidature du président sortant. Son action semble laisser indifférent bon nombre des alliés majeurs de la CMP et des alibis ne manquent pas pour ne pas prendre position.
La situation, à l’approche du 29 juillet, est-elle foncièrement différente de celle que nous avons connue en 2013 quand François Hollande, intransigeant sur la date, nous a imposé les consultations des 28 juillet et 11 août ? A la suite du coup d’Etat du 22 mars 2012, l’Etat s’était effondré. Il était à rebâtir. Cela n’a pas, semble-t-il, été suffisamment perçu. Nous sommes allés aux urnes comme en temps normal. Le président élu a conduit son mandat comme en temps normal. Alors que l’heure était à l’union sacrée pour refaire, ensemble, « la maison Mali ».
Nos politiques doivent se le rappeler. Triompher et conduire les affaires de l’Etat comme en temps normal, seraient maintenir notre pays sous tutelle. Tant que le président élu n’associera pas de manière efficace les forces vives de la nation à la gestion des affaires, se faisant épauler par elles, il sera toujours à la merci du Conseil de Sécurité et des Puissances d’Argent à l’affût pour démembrer le Mali. C’est le lieu de rappeler ces deux adages bamanans : lorsque le mur se fend, le margouillat se loge dedans ; si vous vous divisez, l’ennemi triomphera de vous.
LA REDACTION