Edito : Afrique-France, XXVIIè sommet et après ?

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Nos hôtes sont retournés chez eux, les lampions sont éteints. Le Sommet s’est tenu. Il a été un succès ; d’où, des raisons de se réjouir et plus d’un en est satisfait. Le premier est le président de la République. Ce Sommet, il l’a voulu, a tout mis en œuvre pour sa réussite. Rien ne fut négligé et, au jour J, « il ne manquait pas un bouton de guêtre ». Il a reçu l’Afrique et la France : des chefs d’État, des chefs de gouvernement, des délégations, dont celle du patronat français plus que jamais intéressé par le marché que nous représentons. Mais aussi, des représentants d’institutions africaines et internationales. Il peut en conclure : « Le Mali est de retour. »

Le second est le président de la République Française. Nul n’ignore qu’en France, en ces jours-ci, les derniers de son quinquennat, il vit des instants bien moroses sous les ors et entre les lambris de l’Élysées, pratiquement abandonné un parti socialiste qui, plutôt que d’œuvrer à lui assurer un second mandant, a choisi de le soumettre à l’humiliante épreuve des primaires. Les quelque quarante-huit heures, passées au bord du Djoliba ont dû lui faire oublier la poisse vécue dans la grisaille parisienne. Être entouré de ces représentants venus de divers pays d’une Afrique à la traîne a dû lui redonner l’illusion d’être un des Grands avec qui compter comme au bon vieux temps de l’URSS, Nikita Kroutchev ou Léonide Brejnev au milieu de leurs satellites.

Car, ne l’oublions pas : tous les pays colonisateurs ont décolonisé, sauf la France. Le voudrait-elle qu’elle ne le pourrait car, sans l’Afrique Noire francophone, la France perdrait énormément de son prestige sur la scène internationale. Et c’est pour cette raison que, quoi qu’on en dise, ce Sommet dégage des relents de néocolonialisme et d’impérialisme, de paternalisme. La France partenaire de l’Afrique, le partenariat entre le cavalier et sa monture. Nous, Maliens, sommes bien placés pour le savoir. Car, qui nous empêche de recouvrer l’intégrité de notre territoire ? Qui fait planer sur nos têtes la menace de la dislocation de notre pays ?

Voilà pourquoi, en ce lendemain des grandes et solennelles retrouvailles, nous nous réveillons, renouant avec nos amertumes, notre déception.

Certains de nos compatriotes ont pris les armes contre la République et ont voulu s’en séparer, avec la bénédiction de qui l’on connaît. Ils ont échoué dans leur tentative, mais ont provoqué l’invasion de notre pays par des hommes d’un autre âge. Nous avons espéré nous relever de nos déconfitures et avons apposé notre signature au bas d’un document reconnaissant l’unité de notre peuple et l’intégrité de notre territoire.

Le Sommet aurait comblé nos attentes si, au nom du partenariat, la France avait fait ce qu’elle est seule à pouvoir faire : panser les plaies qu’elle a contribuées à ouvrir et dont nous continuons de souffrir. Au contraire, nous avons déroulé le tapis rouge pour François Hollande, l’avons accueilli avec plus d’un égard. Il est venu, il a vu, il est reparti, nous laissant avec un pays amputé  des 3/4 de sa superficie, des compatriotes contraints à l’exil, à l’intérieur comme à l’extérieur de nos frontières, des populations entières privées de services sociaux de base, tenaillées par l’angoisse.

Il ne s’agit pas de s’élever contre la grand-messe franco-africaine. Il s’agit d’être conscient de son fondement, de ses visées. D’autres Sommets existent. Ils rassemblent, autour de pays comme la Chine et le Japon, l’Afrique. Mais ils diffèrent fondamentalement avec les Sommets Afrique-France ou France-Afrique. Ils n’ont, comme objectif, que le partenariat où chacun trouve son compte. Les Sommets réunissant Français et Africains prolongent des liens de dépendance, même si tout est fait pour nier cette évidence. C’est la raison pour laquelle nul n’en voit les retombées après leur tenue.

La Rédaction

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