Edito : « Ô rage, ô désespoir… ».

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Ce cri de colère de Corneille sied bien aujourd’hui aux peuples africains qui fêtent, pour la plus part, leur Cinquantenaire. Cinquante ans d’Indépendance, vous dites ! Cinquante années de calvaire plutôt pour les vaillants peuples de Samory, Moro Naba

A coups de faux fuyants, ils ont été menés, ces peuples, par le bout du nez. Par qui, demanderez-vous ? Par ses non moins vaillants fils. Patriotes, valets et/ou francs tireurs. Justement, parlant de francs tireurs, ils sont légion en politique. Incapables d’imaginer et de mettre en œuvre de véritables politiques de développement dans la durée. Le temps de leur mandat, leur spécialité, mener le peuple en… pirogue . Même pas en bateau ! Pas sur le Niger, le Nil ou le Congo, mais en plein océan. Faire le bilan, on s’en fout. On préfère boire, manger, danser. Pour mieux gouverner, ces politiques nous ressortent grands projets et grands mots sans que les grands maux ne soient réellement jugulés.

Tenez, au Mali par exemple, remontons  les trente dernières années. Pour combattre la corruption, on se souvient de la mise en place par les autorités de l’époque, de la fameuse Commission contre la Corruption et l’Enrichissement Illicite pilotée par un certain Joseph Mara. La Commission n’y allait pas, comme le disait l’humoriste, avec le dos de la main morte: arrestations, saisies de biens meubles et immeubles et  mainmise sur des comptes en banque… Elle a récupéré des sommes colossales sur des cadres ayant détourné les deniers publics. Pendant que le peuple était accroché aux infos, cette Commission a mystérieusement disparu. Sans rendre compte encore moins laisser des traces. Le Cinquantenaire n’est-il pas le moment propice d’oser en « causer » ?

Autre constat : à la veille de la CAN 2002, les boissons sucrées de type Fanta Orange (Fanta noire serait idéal) et autres, ont été majorées de la modique somme de 25 francs CFA passant de 175 à 200 FCFA. Cela, pour appuyer l’initiative, salutaire, il faut le dire, d’impulsion et de réalisation du projet de société, cher aux autorités de l’époque. Le peuple, consentait. Mais, voila, le Cameroun a emporté sa coupe et il y a 9 ans que c’est fini. Et nous, nous n’avons toujours pas notre coupe pour boire… évaluer le résultat de cette campagne nationale de solidarité. On devrait revenir à la norme initiale de 175 FCFA pour le prix de la boisson sucrée. Pourquoi ne pas saisir le Cinquantenaire pour oser en « causer », histoire de faire le bilan sur la destination des 25 francs CFA ? Si ça se trouvait, le décompte pourrait être fait à partir du 1er avril 2002. Le montant “récupéré” pourrait constituer un Fonds solidaire d’appui à l’emploi des jeunes. Histoire de réduire le taux de l’immigration à notre façon sans le concours de Schengen.

 

Autre point de débats, si nous osons: la gestion faite de l’école et de l’agriculture dans nos pays. Pour l’école malienne, passons en attendant et la diffusion du rapport du Forum sur l’Education ; et le jour où nos enfants et petits enfants, avec un avenir hypothéqué à la suite de notre gestion faite du domaine,  nous prendrons par le collet.

Osons aborder le sujet agricole.  Sur les trente dernières années, le domaine est plus que vacillant. D’un côté, l’Etat avec ses différentes stratégies incantatoires, saute du “Dunkafa” à la souveraineté alimentaire en passant par «consommer malien » pour finir par l’adoption d’une loi d’orientation agricole. Nous avons connu les Opérations Arachide, et quoi encore ! Sans succès ! Aucune n’a fait dans la durée et encore moins fait profiter les producteurs. De l’autre côté, ces productrices et producteurs, acteurs principaux du secteur, responsabilisés sans pour autant être suffisamment organisés et bien préparés, sont à la merci de la dernière trouvaille : les exonérations accordées à des particuliers pour l’importation de denrées alimentaires, anéantissant leurs efforts de participation au développement socio-économique et culturel du pays. Si nous osons causer, le particulier à qui l’Etat accorde ces exos, n’est qu’un commerçant et demeure toujours un commerçant, c’est-à-dire, celui qui cherche à vendre pour tirer profit. Il n’a pas besoin des beaux yeux du producteur pour monter le prix du kilo de riz à 450 francs CFA (demandez aux habitants de Kayes) riz qu’il a importé de Thaïlande, du Pakistan où justement, ce sont des producteurs de ces bleds qui se sont mis sous le soleil pour cultiver et produire avec la complicité de leur Etat !

Et si nous osons débattre, il se trouve que ces paysans d’ailleurs ne sont pas plus « nantis » par la nature que les nôtres : eaux, terres (Office du Niger), savoir faire et… jeunes bras valides. Il ne manque qu’une politique. Une vraie politique agricole qui mette au centre la productrice et le producteur. Est-ce trop demander ?

Oser débattre franc, c’est oser vaincre. La pirogue du silence continue de glisser sur l’océan de rage et de désespoir. Cruel Cinquantenaire !

Alors, chers concitoyens, fêtez le passé « glorieux », dormez sur ce «présent  laurier stressant » et réveillez-vous avec « avenir certain » de 50 autres années de recul ! Amen.

 

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