Démocratie :Ou islam «modéré»

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En Tunisie, le parti Ennahda, qualifié de parti islamiste modéré  sort vainqueur des premières élections libres Dimanche 23 Octobre. Après des dizaines de milliers de morts et la chute de Mouammar Kadhafi avec le soutien des démocraties du monde entier, la première décision importante du Comité national de transition (CNT) est de rétablir la Charia (ou la loi islamique) en Lybie, la charia que les pays démocratiques considèrent comme la pire des dictatures. Sans doute…cela paraît mal engagé, ce n’est pas ainsi que les occidentaux veulent que les libyens rentrent  dans l’histoire, la leur. L’annonce de l’instauration de la charia par Mustapha Abdeljalil avant même toute élection,  a provoqué une grande vibration qui a diffusé des frissons au sein des acteurs. Bien rapide, car en Libye, l’intervention occidentale avait comme prétexte, de se débarrasser d’un dictateur sans tenir compte de la légitimité de ses révolutionnaires  et sans exiger en contrepartie autre chose que le pétrole.

Le nouvel homme fort de la Libye fut manifestement prié par ses partenaires occidentaux de corriger le tir. Le lendemain, il précisait : « Nous sommes des musulmans modérés. » Ajoutant cependant que « la charia, à l’appui d’un verset du Coran, autorise la polygamie ».

La Tunisie parle d’islamistes modérés, la Libye des musulmans modérés, que peut-on dire du mot modéré »?

Modéré dans le dictionnaire français veut dire: raisonnable, bas, modique

Dans la «charia», les imams (dignitaires religieux) et les oulémas (juristes de la loi musulmane) ont leur position grâce à la loi de la charia et non par la volonté du peuple. La charia étant considérée comme la représentation de la volonté divine, elle est  donc supérieure à la démocratie. Dans ce texte, nous ne trouvons aucun agissement conforme à la raison, peu de valeur, ou  encore à l’infériorité, tous les ingrédients qui puissent rendre le mot «modéré» son sens. Les «oulémas», disposent d’un pouvoir absolu qui, au nom de la loi divine, peuvent dicter, sans jamais être contestés, n’importe quelle ordonnance affectant directement la vie familiale, la société ou l’État.     Cela dit, «démocratie» et «charia» sont deux concepts totalement paradoxaux. D’autant plus que dans une  démocratie, les élections libres servent justement à permettre le changement de dirigeants, des choix de sociétés et de lois. Elle est l’expression de la volonté populaire. Rien de tel dans la charia. Par conséquent, il est difficile de vouloir établir un état «démocratique et doté d’une constitution basée sur les lois de la charia». On parle de deux choses totalement contradictoires et incompatibles. La  Libye actuelle est bien  loin d’être  un gouvernement démocratique.

On pouvait donc comprendre le malaise d’Alain Juppé, le ministre français des affaires étrangères, déclarant, à propos de la sortie de M. Abdeljalil, que la France serait «vigilante». «Nous avons des lignes rouges : l’alternance politique, les droits de l’homme, l’égalité hommes-femmes. (…) La polygamie n’est pas la conception que nous nous faisons de la dignité de la femme», ajoutait-il.

Malaise, il y a. Les pays occidentaux ont salué les révolutions, et se sont engagés aux côtés des rebelles Libyens. Les droits des femmes sont-ils en péril après tant d’espoirs?

Récemment, des prix Nobel de la paix ont été décernés pour la liberté à cinq militants du printemps arabe. Les lauréats ont été salués pour avoir «risqué leur vie pour obtenir la démocratie, les droits fondamentaux et la dignité pour tous». Nous doutons fort que leur risque ne soit  vain.

UN NON-SENS

«Islamiste modéré» est un oxymore (deux mots qui se contredisent), au même titre que «cigarettes légères» ou «drogue douce». Ce n’est pas cohérant du tout.

Ce qui s’est passé en Tunisie pose une question épineuse: devrait-on permettre à des partis islamiques  de prendre part à des élections démocratiques ?

N’est-ce pas un non-sens ?

Il est trop tôt pour juger définitivement de la suite en Libye…, mais l’attitude française a été brouillonne dans cette histoire.

Reste à espérer que les Libyens  ne laisseront  pas leur printemps arabe devenir un hiver obscur.            

 

L’avenir nous le dira.

Par   Neïmatou  Naillé Coulibaly


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