
Hier et avant-hier, le tout-puissant ministre français des Affaires étrangères, Alain Jupé s’est successivement rendu à Cotonou, Ouagadougou et à Bamako, officiellement pour porter la voix de la France aux différents chefs d’Etat rencontrés dans les règlements des conflits du Darfour (Soudan), du Nord-Mali et les tensions liées à la présidentielle sénégalaise. Mais c’est surtout la question de la rébellion touareg qui a dominé l’ordre du jour dans ses différents périples. Sommes-nous toujours dans une logique néo-colonialiste de paternalisme de la France à l’égard de ses anciennes colonies ? Que peut apporter cette visite de plus ? Selon des indiscrétions à Bamako, Jupé, en plus des inquiétudes officielles de la France par rapport aux conséquences humanitaires du conflit, à intimé aux autorités maliennes l’ordre d’ouvrir immédiatement des négociations avec les rebelles en insistant sur les spécificités et la compréhension de l’irrédentisme touareg. Mais la France est-elle bien placée pour apporter sa médiation (et quelle médiation !) dans la recherche de solutions à la crise inopportune et incompréhensible au septentrion ?
Oui, si c’est pour reconnaître sa part de responsabilité, en cessant d’héberger les représentants de la rébellion connue sous la bannière du « Mnla », qui jusque-là bénéficient d’une couverture médiatique sans pareille dans l’Hexagone avec les statuts de réfugiés politiques. La France en suggérants aux autorités maliennes un cessez-le feu immédiat et l’ouverture de négociations oublie-t-elle que le Mali est entré dans l’ère démocratique depuis déjà vingt-et- un ans (depuis 26 mars 1991) et que par conséquent, il dispose d’instruments démocratiques dont tous les citoyens et toutes les communautés peuvent se servir dans le respect stricte de sa Constitution. Comparaison n’est pas raison. Mais si nous transposions la rébellion au Nord du pays aux différentes guerres de libération de la Corse ou du Pays Basque, n’aurions-nous pas raison ? La France n’assimile-t-elle pas les dirigeants de ces mouvements de libération à de terroristes et leurs opérations militaires au terrorisme ? Pourquoi voudrait-elle donc que nos autorités prennent langue avec nos terroristes alors qu’elle n’en fait pas de même chez elle même ?
La France a eu et a certainement des velléités hégémoniques sur le Sahara en général et le Sahara malien en particulier, et sa position actuelle ne reflète que son empressement à vouloir créer une patrie pour l’ensemble des Touareg.
Elle avait donc initié la création, dans les années cinquante, de l’OERS (Organisation des Etas Riverains du Sahara) qui n’a pu voir concrètement le jour et depuis les différents gouvernements n’ont cessé de raviver l’irrédentisme touareg au Sahara. Le Sahara malien contiendrait assez de ressources énergétiques et d’innombrables nappes aquifères, mais surtout serait une zone stratégique par excellence. Sinon comment comprendre que les autorités françaises aient pu recevoir les représentants de cette rébellion au Quai d’Orsay, c'est-à-dire au ministère français des Affaires étrangères dont le premier locataire n’est autre que Jupé.
Où étaient donc les représentants officiels du Mali en France ? Etait-ce un mépris ? En tout cas le ministre français des Affaires étrangères avait même renchéri dans ses provocations et son mépris de toutes les règles de politesse diplomatique lorsqu’il affirmait, en substance, que les rebelles ont remporté des victoires et qu’il faut donc que le gouvernement malien négocie avec ceux-ci (c’était au début de la rébellion). Aussi depuis la crise, les officiels français ne cessent-elles de recommander à nos autorités de ne pas favoriser l’amalgame au sujet des populations blanches. Il urge donc que nos autorités apprennent à dialoguer d’égal à égal avec la France, fût-elle l’ancienne puissance colonisatrice, pour la sauvegarde de l’intégrité, la souveraineté de notre pays et l’unité de son peuple multicolore et multiethnique. Le Mali et les autres pays africains ne doivent-ils pas cesser d’être traités tels des territoires d’Outre-mer ?
ParGaoussou M. Traoré