L’attribution de la gestion et de l’exploitation du terminal vraquier à l’entreprise française internationale, Necotrans qui a laissé en rade deux autres soumissionnaires, l’armateur belge Sea Invest et APMT, commence à révéler ses secrets. Loin d’être une ” nébuleuse “, encore moins un monstre à plusieurs têtes, la concession a été attribuée dans des conditions régulières. Au terme de plusieurs mois de discussions longues et parfois houleuses entre les autorités du Port de Dakar et l’équipe française. Les Afriques livre en détail les vérités qui entourent le contrat de concession. Enquête exclusive.
Necotrans a présenté la meilleure offre. Dans la short-list des soumissionnaires prétendants s’offrir le terminal vraquier situé au Mole 2 du port de Dakar, la société Necotrans, propriétaire de la société GETMA était en compétition avec deux autres armateurs spécialisés dans la logistique (le belge Sea Invest et APMT). Ces deux entreprises bien connues en Afrique ont manœuvré jusqu’à la fin du processus pour s’adjuger la manutention et le transport des pondéreux (houille, phosphate, …). Sans succès. Face aux exigences techniques pointues des autorités portuaires, qui ont fait de cette attribution du terminal vraquier un challenge fort pour changer le visage du port en reprofilant son hub grade l’offre technique et financière, présentée par la société française, Necotrans, a été retenue au finish. Selon les confidences d’une source autorisée contactée par Les Afriques, qui suit le dossier, la société Necotrans était la plus outillée à remporter le contrat de concession. « Necotrans a donné toutes les pièces à conviction avec un dossier technique et juridique béton pour nous convaincre contrairement aux deux autres concurrents ». En réalité, dans cette guerre des docks dans les eaux sénégalaises pour s’adjuger le contrat de concession du terminal vraquier, tout n’a pas été dit. Seuls quelques initiés, sont au parfum que Sea Invest et APMT, deux mammouths de la logistique internationale tiraient les ficelles dans l’ombre pour s’offrir ce contrat. Les autorités du PAD (Port Autonome de Dakar) sont restées zen et méticuleuses dans les dépouillements des offres, nous a révélé un officiel sénégalais.
Le long processus qui a abouti au closing de l’opération de mise en concession s’est révélé toutefois houleux, difficile entre les équipes du Port autonome de Dakar et de Necotrans dépêchée à Dakar. En quelque sorte, un véritable chemin de la croix pour la française, Necotrans. « Nos réunions dans la salle du conseil d’administration du Port de Dakar n’ont pas été faciles. Le directeur général du PAD, Dr Cheikh Kanté ne nous a pas fait de cadeau pendant nos discussions. Il tenait surtout à ce que l’état ne soit pas lésé et que ce terminal soit bien géré par une entreprise expérimentée et outillée », a confirmé une source autorisée du groupe Necotrans. Selon nos investigations, le port de Dakar s’est entouré de toutes les garanties avec l’aval de l’ARMP (Agence de Régulation des Marchés Publics), cette vigie procédurière pas du tout tendre avec les sociétés publiques dans ce genre de transactions, pour passer le marché. Necotrans, propriétaire de la société GETMA, qui a dépensé énormément d’argent s’est attaché les services du célèbre cabinet d’avocat français Fisher sis à Paris pour blinder les aspects juridiques et le cabinet allemand d’ingénierie, Inros Lackner, spécialisé dans le génie civil portuaire. Ce qui confirme que les conditions d’attribution du terminal vraquier sont correctes, régulières et transparentes, affirme notre source. La signature de la convention d’attribution du terminal vraquier au groupe Necotrans devra en principe intervenir fin novembre 2013.
Ticket d’entrée et investissements en milliards
Nos investigations nous ont permis de démêler l’écheveau et de comprendre que les projets proposés et les montants mis en jeu par les deux concurrents de GETMA, l’armateur belge Sea Invest et APMT sont en dessous des obligations financières fixées par les autorités portuaires sénégalaises. Une source est allée jusqu’à dire que l’offre émise par APMT est une humiliation voire une injure à l’encontre des intérêts du Sénégal pour ce qui est de la gestion d’une plateforme portuaire de cette envergure. Le groupe Necotrans devra libérer la bagatelle de 2 milliards sous forme de ticket d’entrée et mobiliser plus de 40 milliards Fcfa en termes d’investissements lourds (15 milliards en instance de décaissement dans la construction d’un nouveau quai et achats d’équipements neufs ) en vue de moderniser le système d’exploitation. La société GETMA, filiale locale de Necotrans ne doit pas d’arriérés au port de Dakar, contrairement aux entreprises de manutention locales qui y opèrent et qui trainent de lourds passifs jusqu’ici impayés, nous a soufflé un haut responsable de recouvrement très introduit au port. Un officiel du port, interrogé par Les Afriques, soutient que les sociétés qui s’agitent pour remettre en cause la l’égalité de l’attribution du contrat de concession à Necotrans ne se sont pas acquitté de leurs dettes vis à vis du PAD contractées sur les redevances domaniales, importantes sources de revenus et garanties pour l’autorité portuaire. « Necotrans est à jour au moment où je vous parle et ne nous doit aucun sou », précise notre interlocuteur. Le Port autonome de Dakar a dû éponger des dizaines de milliards f CFA que lui devaient des sociétés comme Somicoa, Thocomar, MTL, Transenne.
Un réseau d’intérêts à la manœuvre
Ici, tout le monde croit dur comme fer, que l’autorité portuaire fait les frais d’une campagne de dénigrement mise en musique par certaines entreprises qui tirent les ficelles dans l’ombre. Nos investigations nous ont permis de déceler un réseau d’intérêts sur l’axe Paris- Dakar dont l’entreprise consiste à saborder le contrat de concession attribué à Necotrans. Sans beaucoup se soucier des procédures et des informations qui blindent la mise en concession. Selon les dernières informations en notre possession, le chef de l’Etat, Macky Sall qui s’est saisi du dossier s’est dit rassuré de la transparence des procédures. Une spécialisation des moles.
Le port de Dakar qui n’est pas satisfait de son classement, derrière le Niger, port sec a engagé une politique hub gradment de sa plateforme et de grands chantiers en termes d’amélioration du dragage du chenal et de spécialisation des moles. L’environnement polluant et corrosif du terminal vraquier ” vampirisé ” avec des pieds de quais envasés et des déchets qui tombent dans le bassin, a poussé les autorités du PAD de passer à la vitesse supérieure pour la mise en concession rapide du terminal.
Au cours de notre enquête, qui nous a amenés à interroger une poignée de hauts responsables bien introduits dans les arcanes du port, on découvre autour de cette affaire un tissu d’amalgames et de contre-vérités. Affaire à suivre…
ENQUÊTE RÉALISÉE PAR ISMAEL AIDARA ( www.lesafriques.com)