Le parc taxi de Bamako et des autres grandes villes de notre pays devrait subir un changement radical avec le projet pour le renouvellement du parc taxi du Mali. Qui avait été lancé en novembre 2009 avec une prévision de 1000 nouveaux taxis. Mais la montagne accoucha d’une souris. Parce que le projet a connu diverses fortunes qui ont conduit les acteurs (bénéficiaires et coopérative) devant les tribunaux. Conséquence, le parc taxi a doublé, entre temps, passant de 4000 en 2009 à plus de 7000 en 2015, mais il est resté vétuste et vieillissant.
Le projet pour le renouvellement du parc taxi du Mali avait plusieurs objectifs dont, entre autres, la réduction du chômage, la rénovation du parc taxi, l’émergence de nouveaux propriétaires. Au-delà, ce projet avait un but social car il offrait à des chefs de famille la possibilité de prendre en charge leurs besoins quotidiens. L’opération taxi avait également une dimension environnementale. A Bamako, le projet prévoyait le renouvellement du parc taxi de la place du Point G. Les vieilles carcasses devraient être remplacées par des véhicules neufs.
Mais à l’heure du bilan, c’est la grosse déception. Les acteurs se rejettent la responsabilité de la mauvaise gestion du projet. Qui n’existe plus qu’à travers une dizaine voire une vingtaine sur les centaines de taxis neuf mis sur les routes de Bamako, Sikasso, Ségou et Kayes. « L’Opération taxi » du Mali, en ce moment des ailes. Les bénéficiaires sont au chômage. Les banques réclament leur argent. Les véhicules sont pour la plus part en panne et entassés dans des garages. La coopérative des chauffeurs et conducteurs du Mali et le groupement des chauffeurs bénéficiaires sont devant les tribunaux. Beaucoup d’entre eux ont été entendu par le Pôle économique et financier à qui l’enquête a été confiée.
Certains de ces bénéficiaires imputent l’échec de « l’Opération taxi » au président de la Coopérative des chauffeurs et conducteurs du Mali, Aliou Guissé, dont la « mal gérance » aurait provoqué l’arrêt de la presque totalité des taxis. Daouda Bagayoko, un des bénéficiaires, se plaint de l’arrêt de son taxi, depuis plus de 3 ans. Pour lui, la coopérative n’a pas respecté sa part du contrat. « Notre problème est surtout une mauvaise gestion, les difficultés d’entretien des voitures, les garages parallèles qui ne sont pas qualifiés, contrairement à ce qui est prévu dans l’accord. Il était prévu que la réparation des véhicules soit faite par les concessionnaires… », a affirmé M. Bagayoko.
Aussi, Siaka Koné s’étonne du harcèlement dont il est victime. « J’ai été convoqué au Pôle Economique, et j’ai apporté la preuve que j’ai versé 6 509 000 FCFA sur les 8 000 000 FCFA que coûte ma voiture. Alors qu’on leur a dit que nous ne faisons pas des versements… », a indiqué M. Koné.
Des surfacturations…
Quant à M. Mariko, un autre bénéficiaire, il explique que les responsables de la coopérative ont tout simplement procédé à des surfacturations pour créer des problèmes aux chauffeurs bénéficiaires. « Des pièces de rechanges de 2000 FCFA sont souvent facturées à 15000 FCFA… », affirme-t-il, en précisant également que les chauffeurs n’ont jamais bénéficié des avantages prévus par les accords, notamment l’INPS, les assurances Vie, et autres salaires. Les ayants droits d’un de leurs membres, n’ont rien perçu après la mort du chauffeur, Mambé Sacko, décédé en pleine activité. Et cela, malgré les promesses que la coopérative aurait faites à sa famille, le jour de son enterrement. C’est compte tenu de tous ces manquements que le groupement des chauffeurs a initié certaines actions contre la coopérative dont une action en justice et l’interpellation à l’EID du département de tutelle de l’Agence nationale de promotion de l’Emploi (ANPE). Qui était le garant de « l’Opération taxi » financée par la BIM s.a.
Joint par nos soins, Aliou Guissé, fraichement réélu à la tête de la Coopérative des chauffeurs et conducteurs de taxis du Mali, affirme ne pas vouloir se prononcer tant que le dossier est pendant devant les tribunaux. Au-delà, il dit disposer déjà d’une stratégie pour relancer « l’opération taxi ».
Un projet ambitieux !
Lancé en novembre 2009, le projet « Renouvellement du parc taxi » avait démarré avec la BRS Mali pour un financement de 500 taxis et la garantie de l’ANPE, en partenariat avec autres banques comme la BIM. Qui avait dégagé une ligne de crédit pour 500 autres.
Le projet « Renouvellement du parc taxi » regroupe plusieurs acteurs dont le rôle de chacun est défini dans une convention signée par toutes les parties pour la réussite du projet. La coopérative des chauffeurs et conducteurs de taxis du Mali est le porteur du projet tandis que l’ANPE joue le rôle de garant. Les banques mettent à disposition une ligne de crédit pour l’achat des véhicules et assurent le recouvrement des recettes. Quant aux bénéficiaires, ils se doivent de respecter leurs obligations contractuelles en versant quotidiennement les recettes qui varient entre 8000 et 11000 FCFA, selon que le véhicule est essence ou gasoil. Les crédits, qui eux aussi vont de 7 millions TTC (toute taxe comprise) pour un véhicule essence à 9, 5 millions TTC de FCFA pour un diesel, doivent être remboursés dans un délai de 40 mois.
La convention exigeait aussi de la coopérative que tous les bénéficiaires soient répertoriés à l’ANPE comme demandeurs d’emploi et inscrits à l’INPS (Institut national de prévoyance sociale) pour leur sécurité sociale. Le projet devait même s’étendre aux capitales régionales, notamment Sikasso, Kayes, Ségou et Mopti.
Idrissa Maïga