Pour manifester la volonté des plus hautes du pays pour que le train voyageur ne s’arrête plus, Moulaye Hamed Boubacar, ministre des Transports et du Désenclavement, a effectué un voyage par train de Bamako à Kayes les 12 au 13 février 2018 en compagnie d’une forte délégation de membres de son cabinet, de responsables de DBF et de journalistes. Dans l’entretien qui suit, le ministre nous parle du bien-fondé de cette démarche.
“Je suis très heureux d’être avec vous. C’est un grand honneur pour lequel il faut encore vous remercier. Il est préférable de tenir cet entretien ici. J’aurais aimé peut-être le faire à Kayes, mais, à bord du train, c’est encore mieux. L’objet de ce voyage, c’est constater qu’effectivement le train voyageur a repris pour de bon et ceci entre en droite ligne dans le Programme d’urgences sociales du président de la République Ibrahim Boubacar Kéita dans lequel il a précisé un certain nombre de points. Lors du 1er conseil des ministres de l’actuel gouvernement, il avait souligné dans son message quatre points essentiels que sont : la paix, la sécurité, l’énergie et l’eau et le désenclavement. Il se trouve que je suis en charge des Transports et du Désenclavement, le désenclavement intérieur et extérieur ; le désenclavement est aérien, terrestre et fluvial, il est aussi ferroviaire et c’est le cas aujourd’hui.
Nous sommes en train de voyager entre Bamako-Kayes pour prouver que désormais c’est une possibilité de faire le tronçon par la voie ferroviaire et comme vous le savez tous, le train c’est d’abord et avant tout dans la culture de notre pays et particulièrement dans la culture des ressortissants de la région de Kayes.
Pour la petite histoire, dans les années 1960, lorsqu’un enfant naissait à Kayes, on avait toujours souhaité sinon prié pour qu’il devienne cheminot tellement que le train est ancré dans leur culture et ceci est de Dakar-Niger, qui a été conçu le siècle dernier pour rallier le port de Dakar au port de Koulikoro, et c’est ça le Dakar-Niger donc de Dakar à Koulikoro.
Oui, aujourd’hui y a des petites difficultés par rapport à Koulikoro mais désormais il n’y a plus de difficultés pour faire Bamako-Kayes. Je suis satisfait évidemment parce que nous sommes en train de voyager en sécurité, il faut améliorer, certes, il faut continuer à travailler pour faire en sorte qu’on soit dans les meilleurs conditions de voyage à bord du train. Donc pour en trouver, il faut multiplier les locomotives, il faut multiplier les voitures mais il faut savoir qu’aujourd’hui ce que nous avons nous permet quand même d’assurer aux usagers le minimum pour qu’ils fassent le déplacement. Ça nous permet également de faire revivre toutes ces bonnes dames, tous ces jeunes-hommes qui génèrent des ressources économiques, ils étaient tous heureux et partout où nous sommes passé, c’était la fête.
C’est pour dire que le train est culturel et permet le lien social et surtout économique. Nous n’allons pas nous limiter qu’au train voyageur, il faut dire que le DBF est là pour assurer certes le voyage, le déplacement des usagers mais aussi et surtout pour assurer l’approvisionnement de notre pays parce que vous n’êtes pas sans savoir qu’aujourd’hui plus de 65 % de diverses marchandises entrent au Mali à partir de différents ports, notamment de Dakar. Et le port de Dakar est aussi le port du Mali. J’aime le dire, le port de Dakar comme celui d’Abidjan n’appartiennent pas qu’à ces deux pays, c’est des ports aussi qui nous appartiennent. Vous êtes d’accord avec moi aussi que les rails, donc le train, sont un élément intégrateur certain et pour qui sait l’objectif de l’Uémoa, de la Cédéao et même de l’UA aujourd’hui qui est une intégration effective.
Voilà pourquoi un des soucis majeurs sinon une des priorités du président de la République est le désenclavement et surtout le train. Pour celui qui le comprend nous avons besoin de ce train aujourd’hui tant les voitures voyageuses, tant les wagons également pour le transport des marchandises ; donc chers amis de la presse, nous avons besoin de vous pour nous aider à sensibiliser, à informer parce que nous sommes aussi en pourparlers avec les partenaires, vous voyez dans ce voyage déjà il y a des partenaires qui m’accompagnent donc je tiens aussi à vous dire qu’il y a deux semaines j’étais à Paris pour discuter de DBF. Et je suis invité dans deux semaines au Sénégal avec mon homologue du Sénégal pour voir comment accélérer les choses et que tous ces projets soient une réalité. Parce que c’est une situation qu’il faut gérer le plus rapidement possible parce que qu’il faut le dire, les moyens de transports pour notre pays c’est vital, parce que nous sommes quand même un pays continental.
Il est très important pour nous qu’aujourd’hui le train puisse marcher c’est vrai cela est une vérité mais il faut aussi que les routes soient bonnes et praticables mais je vais finir par ceci, j’ai entendu deux déclarations aujourd’hui avant de vous remettre la parole, un vieux nous a dit je crois que c’était à Néguéla que “les rails pour la région de Kayes sont comme le Nil pour l’Egypte”. C’est extrêmement important. Et une dame à côté de lui nous a dit tout de suite qu’”un seul wagon vaut mieux que dix camions ou cents camions”. Pour vous dire que non seulement ça nous transporte et ça transporte nos bagages et nos marchandises mais ça permet également de mener des activités qui génèrent des ressources donc une amélioration de nos conditions de vie, la création de richesses, etc. Et au-delà, nous avons beaucoup d’autres projets par rapport au train voyageur.
Quel est le bien-fondé de cette démarche, le fait de quitter Bamako pour Kayes avec des journalistes ? Quel est l’objectif ?
Le but recherché c’est d’abord un témoignage, on ne peut avoir meilleur témoin que la presse, c’est elle qui informe et sensibilise. Parce que beaucoup de choses avaient été racontées. Mais j’avais quand même promis en son temps lors de ma nomination que le train va siffler et n’arrêtera plus de siffler. Donc il faudrait quand même témoigner et aujourd’hui c’est pour éclairer la lanterne de toutes nos populations tant au Mali qu’au Sénégal qu’effectivement ceci est une réalité, voilà ce que nous recherchons. Que vous compreniez qu’effectivement nous avons dit et nous sommes en train de le faire et nous allons continuer.
Est-ce que cette reprise va prendre en compte le cas des arriérés de salaires ?
Très bonne question, effectivement qu’il y avait des arriérés de salaires qui étaient vraiment liés au fait qu’il n’y avait pas d’activités, maintenant s’il y a de l’activité et que les choses se passent normalement, l’activité elle-même va générer des ressources et pouvoir gérer cette situation c’est tout à fait normal. Je pense que ceci est une étape dans ce sens. Je ne dis pas tout a été payé, mais l’Etat a un peu subventionné et les gens ont eu un peu de souffle, ça veut dire nous avons commencé à trouver des solutions mais en ce qui concerne la gestion, nous allons être très rigoureux, il faut que cela soit très clair.
Dans tous les cas, l’Etat a conscience qu’on ne peut pas demander de résultat sans mettre dans les meilleures conditions psychologiques de travail. Ça veut dire quoi ? On gagne parce qu’on fournit un effort, nous en avons conscience et le département ne ménagera aucun effort pour que dans les plus brefs délais on puisse arriver à bout de ce problème.
Est-ce que vous confirmez que le train ne va plus s’arrêter ?
Je crois que le train ne va plus s’arrêter vu l’engagement que j’ai constaté. L’engagement du personnel, l’engagement de l’équipement et l’engagement des plus hautes autorités, le fait que ça soit une priorité parmi les priorités, je crois que le train ne va plus s’arrêter.
Que pensez-vous des conductrices ?
Là j’avoue que vous me faites la chair de poule parce que ce matin je me suis retrouvé à côté des deux conductrices, c’est une grande première et j’ai même entendu que ces conductrices ont été recensées et je pense qu’en mars prochain on reparlera de ces conductrices, elles sont braves et depuis ce matin nous sommes entre leurs mains et je sais qu’elles ont été correctement choisies.
Un dernier message à la population ?
Je veux d’abord demander à la population d’aider à encadrer, à accompagner. Je venais tout de suite de dire que la gestion ne sera plus comme avant et cette population, il faut le dire quelque part, elle a été complice de la mauvaise gestion par le passé parce les arrangements et autres désormais cela ne marchera plus.
Le train va voyager avec des voyageurs qui ont payé. Aujourd’hui, le prix il est à 7000 F CFA pour aller à Kayes mais, cela, faites attention, c’est lié à la subvention. Il faut que la population comprenne que le train est la propriété de tout le monde et pour cela il faut que tout le monde contribue au maintien de l’ordre et au bon fonctionnement.
A.TOURE