Depuis son désenclavement à la faveur de la réalisation de la route bitumée Sévaré-Gao en 1994, plusieurs opérateurs de transport interurbain de Bamako desservent quotidiennement la ville de Gao. Parmi ces compagnies, il y en a une que les populations de Gao considéraient comme étant leur patrimoine propre mais qui est objet de toutes les récriminations ces derniers temps. Il s’agit de BINKE TRANSPORT propriété du richissime homme d’affaire Sidi Mohamed Thera dit Binké.
Il faut dire que cette compagnie dont les employés sont constitués à 90 % de jeunes de Gao, offre de conditions plutôt moins rigoureuses de voyage sur la ligne Gao-Bamako. Mais ce qu’il est à notre avis malhonnête, de ne pas fustiger ce sont les pertes courantes de bagages, l’état vétuste du parc et les pratiques malsaines à l’intérieur des bus sur la route. Souvent avec la bénédiction des employés permanents de cette compagnie. En effet, ces bus ou disons le tout net, ces cercueils roulants, pour la plupart en mauvais état, toujours en panne sur la route, sont littéralement surchargés avec des passagers récupérés sur la route et qui payent chers souvent leur voyage si ce ne sont pas dans les allées ou les dessous des sièges que des produits de fraudes ou de contrebandes sont cachés dans l’inconfort total des passagers, contraints de se recroqueviller et de tenir leurs langues pour ne pas essuyer les insultes des chauffeurs et apprentis du bus dont la qualité humaine principale demeure pourtant la discourtoisie. Mais ce qui frise l’inconcevable, c’est que ce trafic ignoble qui met en insécurité tous les passagers se déroule au nez et à la barbe des agents de l’ordre qui se contentent des strapontins qui leurs sont versés par les chauffeurs et leur racket contre les supposés immigrants. Dans trois bus de la compagnie que nous avions emprunté le mois dernier, en aller et retour sur l’axe Gao-Bamako, il nous a été donné de constater que l’intérieur des bus de cette compagnie est comme totalement interdit aux agents. Pas un seul contrôle n’a été effectué en dehors du poste de Wabaria où les agents s’empressent d’occuper les bus, non pas pour vérifier l’identité des passagers ou leurs conditions de voyage mais pour traquer les supposés aventuriers qu’ils livrent ensuite à leurs complices d’un autre commerce éhonté afin de les dépouiller du dernier sou qu’ils possèdent avant de les abandonner à leur triste sort dans le désert du Sahara malien. Ce qui de toute évidence ternit l’image de notre pays aux yeux de nos frères africains en transit dans notre région. Les autres victimes des rackets de ses individus payés par le contribuable malien pour les sécuriser, sont ceux de nos compatriotes qui, par mégarde voyagent sans pièce d’identité. Mais à ce niveau aussi, si vous réclamez une quittance du trésor public pour votre contravention ce sont des coups que vous recevez pour votre audace ou dans le meilleur des cas des insanités dont vous vous souviendrez toute votre vie. Des pratiques de ce genre font légion sur nos routes et sont malheureusement à l’origine des hécatombes que nous enregistrons sur nos routes. Tout le monde se souvient de cet accident meurtrier à bord d’un des bus de BINKE TRANS de cette compagnie qui a plongé le pays entier dans l’émoi pour avoir couté la vie en 2006 à plusieurs élèves et étudiants qui rentraient des vacances pour participer à la session de rattrapage et dont certains n’ont pu jusqu’à ce jour être identifiés. Le courroux du chef de l’Etat à la suite de la tragédie et ses remontrances à l’égard des agents chargés de la sécurité routière pour une exécution honnête de leur tâche semble visiblement très loin. Aujourd’hui, il est plus que jamais urgent que les autorités soient plus regardant sur ces compagnies de transport qui, au nom d’une « combinazion » qui saute à l’œil nu sur nos postes de contrôle, rackettent, humilient, mutilent et tuent sans le moindre regret. A l’heure de la concurrence, il s’agit plus de prouver les lénifiants slogans qui paradent sur les abords de cette compagnie de transport que de transformer « le plaisir de voyager » en drame sans fin.
Issa Maiga