ATT à propos de l’affaire du Boeing rempli de cocaïne : « Nous avons porté plainte à plusieurs niveaux, au niveau des Nations Unies, de l’ASECNA, de l’Interpol, et jusqu’à ce jour, personne n’arrive à nous dire d’où vient l’avion »

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« Personne n’est jamais venu me demander si je dois rester ou partir. Je pense que c’est un problème qui me concerne moi-même et c’est moi qui dois réfléchir. Il ne faut pas oublier que je sais partir !… J’ai sauvé la vie d’un homme (Pierre Camatte) qui a décidé de travailler au Mali… C’est un hôte. Chez nous l’hospitalité est sacrée. Quelles que soient les difficultés que j’allais rencontrer, il fallait que je sauve Pierre ».

 

Il a quitté le pouvoir une première fois de son plein gré. C’était en 1992. Vingt ans après, en 2012, le président de
la République, Amadou Toumani Touré va récidiver. A la différence de Tandja Mamadou et de tant d’autres, il ne modifiera pas la constitution pour s’accrocher au pouvoir. Cette décision, ATT l’a faite acter dès le 19 avril par une commission de juristes. Aujourd’hui, pour la première fois, il s’en explique. Le président s’est confié sur l’affaire Camatte sur les Ondes de la Radio France Internationale.

 

M. le président, vous avez vécu des moments difficiles dans ces derniers mois, on pense notamment à l’affaire Pierre Camatte, le Français qui avait été pris en otage dans le nord de votre pays, et vous dites souvent  que cette affaire vous a donné des insomnies, pourquoi ?

 

ATT : D’abord vous savez que nous avons une bande sahélo-saharienne qui s’étend à des kilomètres carré, depuis
la Mauritanie jusqu’au Darfour. Nous avons également une somme de menace. Qu’il s’agisse de vol, de trafic de cigarettes, des passeurs, des salafistes, des terroristes etc. C’est un espace extrêmement grand et le Mali seul a 650.000 km2 de cet espace. Le Mali a des difficultés car nous sommes otages et victimes. Nous sommes également au centre du dispositif et nous devenons à la limite une zone de transit, ce qui fait que nous sommes dans une position extrêmement difficile. Pour le cas de Pierre  Camatte, j’étais devant un dilemme, en tout cas ça été l’une des décisions  les plus difficile que j’ai prise en tant président de la République. Nous avons capturé dans le désert 4 salafistes et ces derniers quittaient un pays pour un autre en transitant par le Mali et l’armée les a capturés. Ces 4 salafistes n’avaient posé aucun acte terroriste sur le territoire du Mali et cela ne les dispensait pas de ce qu’ils avaient posés ailleurs. Il y avait deux Algériens, un Mauritanien et un Burkinabé. Et de l’autre, Pierre Camatte qui vit en milieu touareg qui était là pour se battre dans le cadre du jumelage de la recherche de médicaments contre le Paludisme, a été  enlevé. Quelle était l’exigence des preneurs d’otages ? Echanger Camatte contre les 4 salafistes qui ont été jugés pour port d’armes et promenades dans le désert sans visa. Après le jugement,  nous avons pris la décision nécessaire. Que fallait-il faire ? Retenir les autres et mettre la vie d’un homme en danger ? Entre deux  mauvaises solutions, j’ai abandonné la pire et j’ai retenu la mauvaise et je suis tout fait heureux de dire que cette mauvaise solution est la bonne. Imaginez-vous les Maliens qui sont en France, combien sont-ils ?  Quel est le regard que leurs voisins français auront sur eux  avant de leur dire que leur président  pour se montrer dur,  a refusé de relâcher  4 terroristes jugés  et a préféré voir exécuter Pierre Camatte. Et puis c’était le même groupe qui avait exécuté l’anglais, donc il y avait un risque énorme.   

M. le président vous avez le sentiment qu’en faisant ce geste vous avez sauvé la vie de Camatte ?

ATT : parfaitement et j’en suis convaincu,  Pas seulement Camatte, mais j’ai sauvé la vie d’un homme. Et d’autres part, j’ai répondu à une tradition malienne, ce n’est pas parce qu’il est français ou Camatte, mais aussi et surtout il est notre hôte. Il  a décidé de travailler au Mali et à contribuer à notre développement. Chez nous, l’hospitalité est sacrée et en aucune manière et  quelques soient les difficultés rencontrées après, il fallait bien que sauve sa vie.

 

Ces difficultés justement ont fait l’objet de réactions de colère de vos voisins de l’Algérie de

la Mauritanie qui ont rappelé leurs ambassadeurs, où en est-on aujourd’hui ?

 ATT : Le président mauritanien est un cadet et je pense qu’il n y a vraiment pas de problème.

On a dit que vous avez été trop faible dans cette affaire

 

ATT : Je pense même que laisser Pierre se faire tuer, ça ne prouvait pas non plus que je suis fort. Et je pense aussi que si non avait laissé Pierre mourir, on serait dans une situation autre.

 

 M. le président, au mois de novembre dernier, les trafiquants de drogue ont fait atterrir au nord de Gao un Boeing rempli de cocaïne et apparemment vous avez été choqué par cette affaire. Est-ce que cela veut dire qu’il y a des complicités peut-être à l’état major des armées, est-ce que vous avez pris des mesures pour que cela ne puisse se reproduire ?

 

ATT : D’abord, j’ai été choqué parce que je ne comprends pas l’attitude de la communauté internationale car personne ne savait d’où venait cet avion et qu’est ce qu’il contenait. Nous avons porté plainte à plusieurs niveaux, au niveau des Nations Unies, de l’ASECNA, de l’Interpol, et jusqu’à ce jour,  personne n’arrive à nous dire d’où vient l’avion. Ce qui est certain, c’est que la  bande Sahélo-saharienne dans son ensemble, voire l’Afrique de l’ouest, devient de plus en plus une zone de transit.

 

N’y a-t-il des complices au sein de l’Etat malien pour permettre à ces trafiquants de faire atterrir un avion sur son territoire ?

 

Dans tous les cas auprès de là  nous avons six aéroports et s’il y avait des complices à un niveau élevé, au lieu d’aller m’enfoncer inutilement sur le sable pour décoller, j’aurai préféré me poser sur aéroport aménagé. Je pense que c’est une organisation à dimension universelle je suis et certain que les sommes qui sont brassées sont importantes et des complicités peuvent se trouver partout.

 

 

Source RFI

 

 

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