En dépit des efforts déployés pour donner un meilleur visage à l’aéroport international de Bamako Sénou, il n’en demeure pas moins que des questions de sécurité se posent. Des pratiques peu orthodoxes et surtout dangereuses en matières de navigation aérienne y ont toujours cours.
Le sommet Afrique-France que notre pays a abrité le mois de décembre dernier a été l’occasion de booster l’aéroport international de Bamako Sénou. Quelques centaines de millions alloués à l’occasion lui avaient en effet permis de changer un peu de visage, concernant en tout cas les structures d’accueil et les infrastructures de stationnement. Mais auparavant, des efforts, quoique peu insignifiants comparativement à ceux consentis au niveau d’autres aéroports internationaux du continent, avaient été déployés. Ceci en terme d’acquisition de nouveaux équipements mais également de fiabilité des prévisions météorologiques. Relativement à ce dernier point, l’on retiendra d’ailleurs la construction, sur l’espace aéroportuaire, d’un joyau abritant la direction nationale de la météorologie avec ses services techniques. Autant dire que l’aéroport de Bamako, sans faire des pas de géant comme attendu, commence tout de même à bouger dans le sens d’une plus grande modernisation de ses services.
Toutefois, ce tableau qui donne à espérer des lendemains meilleurs se trouve assombri par le comportement de certains agents, parce que peu regardants sur les consignes de sécurité ou gagnés par la gangrène de la corruption. De fait, de quoi s’agit-il ? Selon des témoignages concordants, c’est au niveau du pesé des bagages que des légèretés sont constatées. L’on apprend de ce fait que certains passagers ayant des excédents de poids négocient avec les agents et obtiennent que ne soient pas mentionnés les poids supplémentaires. Les mêmes passagers, dans nombre de cas, poursuivent nos sources, rentrent à bord de l’appareil devant les transporter avec également des bagages qui sont tout sauf des bagages à main eu égard à leur volume.
Dans ces conditions, l’on se retrouve alors devant une situation où le volume de bagage déclaré et enregistré est bien souvent inférieur à celui que transporte l’appareil. En transport routier, on parlerait de surcharge, mais d’autant plus périlleuse que les chances de survie en cas d’accident sont plus élevées sur terre que dans les airs. Une faute d’autant plus lourde qu’en matière de navigation aérienne, s’il y a un principe avec lequel on ne transige point, c’est bien celui de la sécurité. Du reste, ce n’est pas par hasard que les avions sont obligés de se poser sur une ligne d’atterrissage au centre quand bien même la piste est large à suffisance. Aussi, en dérogeant au principe sacro-saint de la précision en la matière, l’on crée toutes les conditions d’insécurité exposant par la même occasion des vies innocentes.
Selon nos investigations, la pratique en cours est mue par deux considérations principales. La première et la plus répandue dans notre pays, c’est celle qui porte sur le népotisme. Il s’agit de fermer les yeux ou intercéder auprès de collègues de service pour que le surplus de poids de parents, amis et connaissances ne soit pas déclaré. Quant à l’autre motivation, elle reposerait sur des considérations d’ordre pécuniaire. A ce niveau, apprend-on, la pratique consiste à ne pas déclarer les surplus de poids, qui cependant au lieu de passer pour pertes et profits, sera récupéré par les agents impliqués, lesquels les taxeront à un prix moins élevé que celui de l’aéroport pour leur propre bénéfice. Ainsi, autant le passager qui paie moins qu’il ne devait que l’agent qui a un « sourafen » tirent leur profit de ce commerce lucratif mais dangereux.
L’on ne saurait dire que cette pratique est véritablement ignorée des compagnies aériennes transitant par Bamako qui pointent un doigt accusateur vers les anciens agents de la défunte compagnie «Air Afrique ». Pour elles, ces agents qui font prévaloir leur expertise, et cela de bon droit, pèchent malheureusement par défaut de rigueur comme l’attestent les pratiques en cours dont certains d’entre eux sont accusés. Aussi, indiquent les mêmes sources, les compagnies, conscientes du peu de fiabilité des données qui leur sont communiquées relativement aux poids à l’embarcation, prévoient généralement une marge de sécurité qui fait que même si le poids déclaré est inférieur à celui embarqué à bord, il y a équilibre heureusement pour la sécurité des passagers.
En définitive, si l’on parle de plus en plus de problème de sécurité au niveau des compagnies africaines, force est d’admettre que les responsabilités sont partagées. Parce qu’autant les appareils sont en cause, autant l’assistance en escale laisse souvent à désirer. Dans ces conditions, comment parler de concurrence déloyale, de monopole du ciel, alors que nous ne faisons pas d’effort pour fournir les conditions de sécurité requises. Là également, c’est une responsabilité partagée.
Par Bertin DAKOUO
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