L’utilisation de certaines parties des sites archéologiques comme champs de culture ou dépotoirs d’ordures constitue une des causes de ce danger.
La ville de Djenné et ses îlots classés patrimoine de l’humanité par l’UNESCO depuis 1988, se trouvent dans un système enchevêtré de points et de sources d’eau, constitué par le Bani (4 km à l’Est de la ville), le Niger (35 km, au nord), leurs bras et de nombreuses mares qui alimentant une multitude de cuvettes et de marécages. La population de Djenné, reflète la diversité ethnique qui caractérise le Delta. Estimée à 20 000 habitants, la population actuelle de la ville de Djenné est composée de : Bozo et Somono, pêcheurs ; Peuls éleveurs ; Marka commerçants ; Songhay, Buwa et Bamanan cultivateurs et/ou commerçants. La fondation de Djenné remonte très loin dans le temps. Les versions relatives à sa fondation sont nombreuses. Elles sont rapportées par les sources orales et écrites surtout par les chroniqueurs ou lettrés arabes dont le plus connu est le Tarikh es Soudan rédigé en 1655 par Abderramane es Sadi. L’auteur du Tarikh es Soudan, Abderramane es Sadi, (un soninké ayant vécu à Djenné), Djenné, aurait été fondée selon lui vers l’an 800 par une population animiste.
Les premiers habitants connus de Djenné sont les Bozos auxquels sont venus s’ajouter des Marka du clan Nono, originaires de Dia, village du cercle de Ténenkou, les premiers immigrants du Delta intérieur du Niger. Selon la tradition orale, la fondation de la ville est marquée du sceau de l’idolâtrie. Génies tutélaires et sacrifices humains y sont associés. Pour la prospérité de la nouvelle ville, bâtie sur un site coupé en quatre îlots par deux marigots, les devins sollicitaient le sacrifice d’une jeune fille vierge de l’ethnie bozo. C’est ainsi que le choix fut porté sur Pama Kayantao, fille de Modi Kayantao de Djera, village situé à 7 km au sud-ouest de Djenné. Après ce sacrifice humain, la ville connue un développement et une prospérité assez rapide selon les traditionalistes. Le bien classé Patrimoine mondial comprend non seulement le centre historique de la ville, mais aussi des paysages culturels fossiles (sites archéologiques) connu par les professionnels sous le nom de « ville ancienne de Djenné ». En effet, l’inscription de ce bien à cette prestigieuse liste a été obtenue non seulement pour la valeur exceptionnelle de son architecture de terre dont le style a influencé toute la sous-région, mais aussi pour la valeur toute particulière des vestiges des civilisations préislamiques présentes dans les environs de la ville.
Changements. Pour l’observateur non averti, la ville donne l’impression d’avoir connu très peu de changements en traversant les siècles, explique Yamoussa Fané, le chef de la Mission culturelle. En effet, il existe très peu de différences entre la ville de Djenné telle qu’évoquée à travers les images de la période coloniale montrant de façon attrayante les maisons et les scènes de ruelles et celles de nos jours. Cependant, des changements considérables ont pu intervenir, même s’ils n’ont pas affecté l’harmonie qui a toujours caractérisé la ville. Ces changements sont de plusieurs ordres : les changements intervenus dans la composition des cellules familiales et la poussée démographique ; la flambée des coûts des matériaux ordinaires d’entretien ; l’introduction des matériaux modernes (ciment, carreau en terre cuite) et des techniques modernes dans l’entretien des anciens bâtiments et dans la construction des nouveaux ; les interventions sur l’ancien bâti en vue de le renforcer ou d’en améliorer le confort ; l’abandon de certains bâtiments pour des raisons socioculturelles (bien commun hérité) ou économiques (extrême pauvreté des occupants suite au déclin économique de la ville) ; l’implantation de nouveaux équipements de développement urbain ; l’implantation de constructions nouvelles dans le tissu classé ; la pose d’antennes paraboliques et de fils électriques ayant un impact visuel négatif sur les ouvrages en terre. Les écarts constatés se justifient par des facteurs naturels et anthropiques comme l’utilisation de certaines parties des sites archéologiques comme champs de culture ou dépotoirs d’ordures comme à Kaniana. Auxquels il faut ajouter le prélèvement de la terre des sites pour en faire des matériaux de construction ; le lessivage, l’érosion et le ravinement des sites par les intempéries, les eaux de ruissellement et les trous creusés par les pilleurs. Il y a aussi le flétrissement de la ceinture verte réalisée en 1996 par la coupe abusive des arbres constituant la haie vive ; la divagation des animaux sur les sites ; le non renouvellement des cordons antiérosifs installés en 1996.
Le site archéologique de Tonomba connaît des menaces plus sérieuses à cause de son occupation par les bureaux de l’administration locale ; l’étang piscicole et le périmètre maraîcher du groupement des femmes de Djenné. On assiste aussi à l’utilisation du site comme carrière de prélèvement du banco pour la construction et l’entretien des maisons ; enfin et surtout au pillage sous toutes ses formes. Aux facteurs affectant les sites archéologiques et l’architecture, il faut ajouter, le problème récurrent de l’assainissement. Les différents projets de recherche, de restauration et de conservation de l’architecture de Djenné, ont permis de sauver de la ruine plusieurs maisons monumentales, sauvant du coup un pan remarquable du patrimoine et de l’identité nationale. Les maisons isolées et les ensembles restaurés ont contribué à améliorer l’esthétique des quartiers qui les abritent. On a même pu constater un effet multiplicateur, les travaux ont poussé les populations à procéder à des interventions individuelles et privées de leurs maisons en terre. De considérables efforts ont été consentis par les autorités locales pour la gestion des ordures ménagères à travers la sensibilisation de la population et la mise en place des structures chargées de la collecte des déchets. Ainsi, l’état de salubrité de la ville de Djenné s’est nettement amélioré aux cours de ces deux dernières décennies. Un projet de gestion des eaux pluviales dans la ville de Djenné, a été mis en oeuvre en juin-juillet 2005, avec l’appui financier de la Banque Mondiale.
La question de la gestion des eaux usées a été abordée à travers plusieurs actions, en l’occurrence : le « projet pilote d’infiltration des eaux usées », exécuté en collaboration avec la coopération néerlandaise dans les quartiers de Yoboukaina et Algassouba en 2000 ; la poursuite du projet néerlandais en 2005, en collaboration avec la coopération allemande à travers la KFW. Ces travaux, financés en partie par les bénéficiaires, sont exécutés par le GIE-DJEBAC qui assure la maintenance des ouvrages. Ils concernent aussi la mise en place de système d’infiltration des eaux aux niveaux des bornes fontaines ; En vue de contribuer à l’amélioration de l’assainissement de la ville de Djenné, un important appui en matériels d’assainissement constitués de charrettes, d’ânes, de brouettes etc., a été offert le 11 juillet 2009 à la Mairie de Djenné par le Projet Niger-Loire financé conjointement par l’UNESCO et l’Union Européenne. En perspective, il est prévu la construction d’un dépôt de transit et d’un dépôt final.