L’importation, la commercialisation et l’utilisation des équipements amplificateurs des signaux dénommés “boosters” sont interdites au Mali selon l’arrêté n°1535 du 5 juin 2015 : ces appareils n’étant pas homologués par l’Autorité malienne de régulation des télécommunications, des technologies de l’information et de la communication et des postes (AMRTP). Malgré tout, certains grands marchés et environnants sont inondés par ces “boosters”. Ce qui explique la dégradation, de plus en plus, de la qualité des services des télécommunications dans certains marchés de la capitale. Les opérateurs de téléphonie (Moov Africa Malitel, Orange-Mali et Telecel) sont les principales victimes de ce nouveau phénomène. Les fautifs risquent une peine de 5 ans d’emprisonnement et 100 millions de FCFA d’amende.
Depuis un certain temps, certains quartiers de Bamako, plus particulièrement le Grand marché et environs, sont inondés par l’utilisation des équipements amplificateurs communément appelés par les spécialistes “boosters”. Et pourtant, la commercialisation, l’importation et l’utilisation de ces appareils sont purement et simplement interdites au Mali puisqu’ils n’ont jamais été homologués par les services de l’Autorité malienne de régulation des télécommunications, des technologies de l’information et de la communication et des postes (AMRTP).
Malgré tout, l’importation et la commercialisation de ces équipements amplificateurs sont devenues courantes. “Les premiers boosters ont été importés de la Chine. Au départ, ils étaient vendus entre 300 000 et 250 000 F CFA. Mais, aujourd’hui, ils sont vendus entre 140 000 à 90 000 F CFA alors que l’utilisation de ces appareils est interdite par la réglementation. C’est pour vous dire que la vente des boosters est aussi interdite. Ceux qui utilisent ces appareils sont considérés comme des mini-opérateurs de téléphonie”, témoigne un spécialiste en télécommunications.
Le hic est que les opérateurs de téléphonie, à savoir Moov Africa Malitel, Orange-Mali et Telecel sont les principales victimes de ce phénomène qui est aujourd’hui un “véritable danger”. L’un des responsables d’une société opératrice semble être dépassé par l’utilisation de ses appareils.
“En fait, nous sommes accusés très généralement pour la mauvaise qualité de nos réseaux. Alors que nous sommes victimes de l’utilisation de ces appareils amplificateurs qui jouent sur la qualité de nos services. Depuis quelques mois, le Grand marché de Bamako est pratiquement inondé par ces appareils. Voilà pourquoi, les services de télécommunications sont souvent mauvais à Bamako et environs. L’utilisation des boosters bloque carrément les services des télécommunications”, précise-t-il, très mécontent que le régulateur, à savoir l’AMRTP, ne sévisse pas.
“Vous savez, les commerçants ont aujourd’hui des outils pour soi-disant pallier ou améliorer la qualité des communications. Ces appareils sont des amplificateurs (booster) non autorisés par l’AMRTP pour des tiers. L’utilisation sans autorisation de ces équipements cause des brouillages préjudiciables aux réseaux des opérateurs de télécommunications, ce qui affecte la qualité de service, car 2 fréquences de 2 émetteurs différents (c’est comme 2 baffles face à face jouant la même musique). Aujourd’hui, il suffit de nettoyer le marché de ces amplificateurs pour se rendre compte que la qualité du réseau des opérateurs est bonne. Nous les opérateurs, souffrons de cette situation qui nous cause un manque à gagner financier et de notoriété. Aussi, il nous est impossible de faire que des optimisations continuent pour mettre à disposition des ressources suffisantes pour appeler. Quand nos équipes sont sur le terrain, les mesures de qualité de service sont impossibles à cause des interférences”, analyse un cadre d’un autre opérateur de téléphonie.
Et de préciser : “Nous venons juste d’installer 6 nouveaux sites dans ces zones pour améliorer la qualité du service… Aujourd’hui ces pratiques doivent cesser pour le bonheur de tous. L’Autorité de régulation des télécommunications est imprégnée du problème et n’arrive pas à sévir”. Voilà pourquoi, les opérateurs de téléphonie ne cessaient de se plaindre auprès de l’AMRTP pour la mauvaise qualité de leurs services.
Un impératif de sécurité nationale
Du côté de l’AMRTP, toutes les démarches ont été entreprises pour remédier à ce phénomène qui est en train de faire perdre aux opérateurs de téléphonie des milliards de nos francs. Ainsi, face à cette situation, l’AMRTP a, d’abord, mis l’accent sur la sensibilisation. C’est pourquoi, un groupe de travail composé des représentants de différents secteurs a été mis en place afin de gérer la question de la qualité de services. Il s’agira de travailler ensemble afin de trouver une solution pérenne et définitive à ces pratiques.
Au départ, une équipe de contrôle de l’AMRTP avait procédé à un travail de contrôle sur le terrain pour confirmer la dégradation de la qualité de service dans le marché. Elle a pu identifier les causes de cette dégradation due à une utilisation massive des équipements amplificateurs. “En fait, nous sommes convaincus que la seule solution pour mettre fin à ce phénomène est le débranchement de ces équipements. On sait que l’utilisation de ces amplificateurs perturbe les services des opérateurs de téléphonie. C’est pour vous dire que le phénomène est devenu un problème de sécurité où l’ensemble du pays est menacé. On peut dire que l’utilisation de ces appareils peut avoir des répercussions sur les navigations aériennes“. Parole d’un spécialiste en la matière.
Dans le cadre de la sensibilisation et de l’information, l’AMRTP a organisé des rencontres avec la Chambre de commerce et d’industrie du Mali, l’Association des commerçants voyageurs du Mali et de la diaspora, la direction générale de la concurrence, la police nationale (direction régionale) et même la douane malienne. Des commerçants ont été aussi sensibilisés à travers certains grands marchés de Bamako sur les effets négatifs de la commercialisation et l’importation des boosters au Mali. Sans oublier les chefs de quartier.
Aujourd’hui, l’AMRTP veut passer à la vitesse supérieure. “En plus de la sensibilisation de grande nature, nous estimons aussi que la répression est également une solution. Cette pratique est interdite par les textes. Donc, les fautifs risquent une peine de 5 ans d’emprisonnement et 100 millions de F CFA d’amende. Pour la sensibilisation, nous avons pu mettre à la disposition de la douane, de la direction générale du commerce, de la concurrence et de la consommation des exemplaires de ces appareils permettant aux agents de pouvoir identifier l’appareil et faciliter son contrôle aux frontières aux fins de saisine. Nous avons également remis à ces structures des textes réglementaires”, précise une source à l’AMRTP.
C’est dire que l’AMRTP entend procéder à un traitement global de la question pour une résolution pérenne. “Même si le problème des boosters n’est pas le seul défi de la problématique de la qualité de service, son ampleur et sa persistance font de lui une préoccupation majeure pour les différents acteurs du secteur à savoir le régulateur, les opérateurs et les consommateurs”. Parole d’un cadre de l’AMRTP.
El Hadj A.B. HAIDARA