Entendons-nous ! Il ne m’a jamais effleuré l’esprit l’idée selon laquelle le Rwanda, ce petit pays de la région des Grands Lacs, également appelé “Pays des Mille Collines”, devrait tracter, à lui tout seul, le continent africain vers quelque direction. Ce que je souhaite démontrer, c’est que le Rwanda s’est engagé dans un ambitieux projet de transformation de ses handicaps en atouts et, à cet effet, montre la voie à suivre aux autres pays du continent dans des domaines de pointe comme celui de la transformation digitale. Le Rwanda qui force mon admiration, c’est subjectif, a les pieds solidement plantés sur terre, mais la tête dans les cieux de l’incubation technologique. Rien, m’a-t-on répété un milliard de fois, ne se fait sans grand rêve. En Afrique, depuis plusieurs années, le Rwanda rêve ; tous les frémissements dans la sphère des technologies, portent l’emprunte digitale du Rwanda. Et le ministre rwandais de l’Economie, Claver Gatété, est sans nuances : « En tant que pays enclavé, qui n’a pas beaucoup de ressources naturelles, nous pensons que les nouvelles technologies peuvent devenir l’un des moteurs de notre économie ». Les dernières statistiques créditent le pays d’un taux de croissance de plus 6,9 % en 2015 et pour le Président Paul Kagamé, l’ambition de son gouvernement est de baser son économie sur les connaissances et services d’ici 2020. Selon Wikipedia, “La transformation digitale se réfère aux changements associés à l’application de la technologie numérique dans tous les aspects de la société humaine.” Cela, le pays du Président Paul Kagamé semble l’avoir compris avant les autres. Qui sont obligés de se bousculer à Kigali pour se mettre au diapason de la transformation digitale. Le dernier exemple en date, c’est la session du Forum économique mondial sur l’Afrique qui vient de s’y tenir les 11, 12 et 13 mai et dont le thème était des plus explicites: « Connexion des ressources de l’Afrique grâce à la transformation numérique ». Aux dires des organisateurs de la manifestation, plus de 1200 participants, issus de plus de 70 pays ; 600 dirigeants d’entreprises dont plus de la moitié sont africains, mais également 10 chefs d’Etat du continent au moins, étaient attendus à Kigali. Tout ce beau monde a pris d’assaut les luxueux hôtels de Kigali et a claqué, sans compter, des devises. Une affaire en or pour tous les entrepreneurs engagés dans la transformation digitale et les dividendes collatéraux, pour une fois que ceux-ci ne sont pas létaux. Il faut simplement rappeler que l’évènement de Kigali est le prolongement du Forum économique mondial de Davos (Suisse). En janvier dernier, le WEF s’est penché sur la « 4e révolution industrielle », « cette transformation numérique de l’économie mondiale, qui transforme en profondeur les sociétés ». Tous les spécialistes sont unanimes : Miser sur le numérique représente une occasion pour les économies africaines de se diversifier ». Cette conviction a d’autant plus de sens que l’Afrique vit un contexte de ralentissement de la croissance à cause de la chute des cours des matières premières. Le Forum de Kigali s’est intéressé à d’autres défis majeurs comme le déficit en termes d’électricité sur le continent, ou le faible taux d’accès à Internet. Une belle tribune donc pour les dirigeants africains d’évoquer la question de l’intégration régionale et panafricaine qui a bien du mal à prendre son envol au sein du continent. Mais surtout une tribune magistrale pour le Rwanda de ventre son image, son modèle et sa destination qui s’impose désormais sur le continent.
Le pays travaille d’arrache-pied à achever le premier building de l’« Innovation City » de Kigali. Cette installation accueillera mi-2017 la Carnegie-Mellon University, une prestigieuse université américaine qui y implante son premier campus africain. Le gouvernement rwandais ne fait pas mystère de sa volonté de rallier des investisseurs et des multinationales, et devenir ainsi leur « laboratoire » en Afrique. Du coup, le Rwanda se positionne pour tenir la dragée haute au Kenya et à l’Afrique du Sud, les deux pays africains qui, jusque-là, accueillent la majorité des investissements dans les nouvelles technologies. En matière d’incubation technologique, le Rwanda est fortement intéressé par le modèle indien et le ministre du commerce, François Kanimba, le confesse :« Notre modèle, c’est Bangalore [sud de l’Inde] ».
Avec son prestigieux rang de N°1 africain du classement « Doing Business » de la Banque mondiale, nul doute que le Rwanda va aspirer des milliards de dollars d’investissement à court et moyen termes.
Serge de MERIDIO
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