Au Mali comme sur le reste du continent africain, la guerre des enseignes et des kiosques bat son plein. Selon l’excellent article du JDM «Orange Money, Mobocash, Lemonway : la guerre des kiosques», publié le 23 juillet 2015 sous la signature de Boubacar SANGARE, Orange Money, arrivé en 2010, est la toute première solution de transfert d’argent par mobile à s’implanter sur le marché malien. « Quelques années plus tard, c’est son concurrent Malitel qui lance le service Mobicash, puis le dernier né, Lemonway, fin 2014 », poursuit notre confrère qui ajoute : « Quoi de plus normal quand le taux de pénétration du mobile explose à plus de 100%, alors que le taux de bancarisation stagne à environ 11% au Mali ? ». Essor du mobile et stagnation du taux de bancarisation, voici le constat qui décide Orange, le géant du Télécom français, à lancer un offensif tout azimut sur et en direction du continent africain. Il envisage, dès le début de l’année prochaine, de lancer en France Orange Money, « un service de transfert d’argent électronique avec un mobile, qui doit lui permettre de tirer parti de sa forte présence en Afrique ». Annoncée à grand frais de campagne médiatique, la solution Orange est en expérimentation auprès de clients sélectionnés dans une boutique avenue de Saint-Ouen, dans le 17e arrondissement de Paris. Selon le plan de déploiement, la solution va s’adresser d’abord aux diasporas sénégalaises, ivoirienne et malienne afin de leur permettre d’envoyer de l’argent à leurs proches restés au pays. Mieux, Orange va couper l’herbe sous les pieds de la concurrence en prélevant «une commission fixe moyenne proche de 5 euros quel que soit le montant envoyé ». Le moins que l’on puisse dire, c’est que Orange Money marque son territoire africain où il compte déjà pas moins de 14 millions de clients et ambitionne d’atteindre la barre de 30 millions. L’opérateur fait un gros pari sur l’Afrique en comptant sur le développement fulgurant du mobile sur le continent où aucun coin et recoin n’échappe à cette vague contagieuse. En effet, dans son plan stratégique à l’horizon 2020, Orange compte acquérir des filiales de Bharti Airtel, ce qui pourrait ainsi lui apporter 9 millions de clients supplémentaires, 600 millions de chiffre d’affaires et 50 millions de résultats d’exploitation additionnels. Par ailleurs, Orange pourrait prendre le contrôle de Millicom en République démocratique du Congo, précise ce plan stratégique. Enfin, il envisage aussi de prendre le contrôle d’Orange Tunisie où il est aujourd’hui minoritaire. Manifestement, il y a de grosses manœuvres à l’horizon qui visent à conforter les parts de marché des opérateurs historiques et, à long et moyens termes, contraindre la concurrence à jeter l’éponge. Le jeu en vaut la chandelle d’autant plus que, selon une étude de la Banque Mondiale, six milliards de dollars sont transférés chaque année en Afrique par la diaspora du continent. Pour Orange comme pour la concurrence, il y a beaucoup d’argent à faire. Toutefois, il faut simplement déplorer l’absence d’opérateurs africains de ce secteur juteux qui est promu à un bel avenir. Mais quels que soient les cas de figure, la ruée des opérateurs sur le continent africain est une double aubaine, d’abord pour les expatriés qui pourront envoyer de l’argent à leurs proches à des tarifs raisonnables, ensuite pour les populations bénéficiaires qui n’auront plus ni à avaler des distances énormes pour toucher les envois, ni à subir des tracasseries et autres mesquineries pour empocher leur argent. Avec le développement prodigieux des solutions mobiles, le transfert d’argent se présente comme un filon pour les populations rurales africaines dont certaines vivent malheureusement dans le plus grand dénuement. Enfin, il faut espérer que les Etats africains concernés sauront réguler cette nouvelle jungle financière en sauvegardant ses intérêts propres et ceux de ses populations.
Serge de MERIDIO