Les deux parties ont été appelées le vendredi dernier pour leur signifier la reprise de la procédure par l’expert-comptable afin de permettre au juge commercial de mieux asseoir sa conviction sur des faits irréfutables, susceptibles de contribuer à la manifestation de la vérité.
C’est seulement sur notre continent africain qu’on badine avec la notion de Droit. Sinon dans les pays de l’homme blanc, les valeurs de Justice et d’Equité sont religieusement respectées. Le géant français de la téléphonie mobile au Mali, Orange peut faire semblant d’ignorer ce principe élémentaire de la vie en société au Mali. Parce que dans nos pays, certains magistrats chargés de dire le droit ont tout simplement accepté de mettre leur intelligence au service de l’argent quitte à fouler au pied, la soif de Justice de leurs concitoyens. Même si certains de nos hôtes instrumentalisent notre justice à notre dépens, ce n’est pas tous les magistrats qui se prêtent à leur jeu. En tout cas, les juges de la Cour d’Appel de Bamako, viennent de donner la preuve qu’ils ne reçoivent d’injonction de personne, encore des fortunés d’Orange Mali, qui ont appris à leur dépens l’indépendance et le souci de justice de nos hauts magistrats.
Selon nos sources, le vendredi dernier, le Conseil d’Orange-Mali aurait été informé de la décision de la Cour d’Appel de débouter son client, le géant de la téléphonie mobile de sa requête en annulation contre la décision du juge commercial, qui avait pris sur lui, la responsabilité de désigner un expert-comptable pour l’aider à évaluer le préjudice financier subi par les plaignants, qui ne sont autres que les membres de l’AMARCR. Lesquels avaient introduit une plainte contre le géant de la téléphonie mobile suite à des prélèvements d’argent qu’il avait effectué dans les comptes Orange money de ses membres en l’absence de toute décision de Justice. Par cette de cette décision, les magistrats en Appel ordonnent au juge de reprendre son dossier et de poursuivre son instruction, expliquent nos sources.
Pour rappel, de commun accord,l’AMARCR et Orange-Mali avaient décidé de s’attacher le service du Cabinet Conseils, audit et organisation C.A.O, représenté par Abdou Salam Guindo, un robuste expert-comptable, bien connu de la place, qui avait été souverainement désigné par le Tribunal du commerce de Bamako pour mener cette enquête d’évaluation. Mais malheureusement, en dépit la bonne volonté de cet expert indépendant, dont la neutralité ne pouvait souffrir d’aucune contestation, le sieur Guindo avait fini par jeter l’éponge du fait des entraves posées sur son chemin par Orange-Mali. Ainsi, le 24 octobre dernier, l’expert-comptable Abdou Salam Guindo adressa une correspondance au Président du Tribunal du commerce de Bamako pour lui signifier les obstacles auxquels il fait face dans les couloirs sans issues d’Orange Mali, dans le but de l’empêcher de mener à bien sa mission d’expertise. En conséquence de cause, il se dessaisit du dossier.
Il faut noter qu’entre temps, les avocats d’Orange-Mali avaient également introduit une requête en annulation contre la décision du juge commercial pour des raisons que seuls ces avocats peuvent expliquer. En tout cas, les magistrats de la Coup r d’Appel ne se sont pas laisser influencer probablement par la tonne d’argent dont dispose Orange-Mali. Ils ont simplement pris fait et cause en faveur du Droit. En revoyant les deux parties à la décision du juge commercial. Ainsi, la procédure peut continuer son cours normal. C’est ce qu’a décidé le Tribunal de commerce qui aurait instruit à l’expert-comptable de reprendre son investigation dans les entrailles d’Orange-Mali pour l’aider à fonder sa décision dans cette affaire, qui a tout l’air d’un vol. Car, en opérant des prélèvements dans des comptes appartenant à autrui, sans une décision de Justice, cela ne peut s’appeler autrement que « du vol, par abus de position dominante. »
Est-il besoin de rappeler que c’est par une correspondance en date du 25 septembre 2017, qu’Abdou Salam Guindo avait demandé à Orange-Mali de lui fournir un certain nombre de documents permettant d’éclairer sa lanterne sur la nature des Conventions qui lient Orange aux parties intervenant dans la chaine de production d’Orange-Money. Il s’agit des documents juridiques régissant les relations commerciales entre les différents intervenants de la filière : partenaire distributeur, demi grossiste et les détaillants. Il avait également souhaité être informé de la clé de répartition de la commission entre les différentes parties, la liste exhaustive des comptes impactés par les prélèvements du 27 janvier, les 17, 18 et 19 février 2017. Il avait en outre réclamé le listing devant faire apparaître les informations suivantes : la date de l’opération, le nom, prénom et numéro de téléphone imputé des unités de valeurs, le montant total retenu, les remboursements effectués. Au lieu de fournir les informations demandées, témoignant de sa bonne foi, Orange-Mali s’emploie dans une entreprise d’intimidation contre ses adversaires.
Ainsi, en lieu et place de ces informations, le Conseil de Orange-Mali (Doumbia-Tounkara de la Société civile professionnelle d’avocats) avait répondu par une correspondance en date du 02 octobre adressée au Conseil C.A.O. Dans cette lettre, SCPA/Doumbia-Tounkara, avait écrit ceci «… Selon le Code de procédure civile sociale et commerciale, une décision de justice ne peut être exécutée qu’après avoir été signifiée au préalable. Mieux Orange-Mali a fait appel de cette décision qui sera incessamment jugée par la Cour d’Appel de Bamako. Par ailleurs, les faits en cause étant des infractions à la loi pénale, une plainte a été introduite contre l’ensemble des membres de l’AMARCR impliqués dans cette fraude gigantesque… ». Une argumentation qui ne pouvait résister au Droit, s’il était tenu par des magistrats intègres. C’est le cas depuis le vendredi dernier. La Cour d’appel a débouté le Conseil d’Orange-Mali et renvoyé les parties devant le juge commercial de Bamako. Qui a ordonné la poursuite de l’affaire, confirmant le point de vue du Conseil C. A. O. concernant la démarche. Selon lui, la commission d’un expert-comptable par le juge pour mieux éclairer sa lanterne sur le dossier qu’on lui a donné d’instruire, ne signifie nullement la mise en œuvre d’une décision de justice mais un éclairage à l’intention du Juge. Car, la chose n’est pas encore jugée. Ainsi, dans une correspondance en date du 09 octobre 2017, le Cabinet C.A.O a écrit ceci : « Faisant suite à votre courrier enregistré sous la référence n°255 du 02 octobre, j’ai pris note des circonstances évoquées et vous signale qu’il ne s’agit pas d’une décision de justice, comme évoqué dans votre correspondance, mais plutôt d’une expertise de compte qui concourrait à édifier le juge sur la nature et la réalité des transactions intervenues sur les comptes Orange-Money des membres de l’AMARCR. A ma connaissance, l’appel interjeté par Orange Mali n’éteint pas la procédure en cours, dans cette optique, je vous saurais gré de bien vouloir demander à Orange Mali de nous mettre à disposition des documents sollicités en vue de réaliser la mission qui nous est dévolue… ». En dépit de cette lettre, Orange Mali était restée insensible à la douleur des jeunes gens. Qui n’aspirent qu’à vivre de leur boulot et non de l’aumône.
Zoom sur l’affaire
En effet, ce feuilleton judiciaire a commencé en avril de cette année, suite à une plainte introduite par les membres de l’AMARCR contre Orange-Mali devant le Tribunal de Grande Instance de la Commune IV, le 11 avril 2017. A la suite de cette requête, l’affaire a été portée devant les juges du Tribunal de Commerce de Bamako, eu égard à la nature du dossier, qui est un différend commercial.
Suite donc à cette requête, une première audience de comparution s’était tenue le lundi 24 avril dernier. Depuis cette date, le feuilleton se poursuit. Il est reproché à Orange-Mali : des prélèvements d’argent dans les comptes des clients, membres de l’AMRCR, sans se référer à une quelconque décision de justice. Pour les victimes de cet acte extra judiciaire, Orange Mali a abusé de sa position de dominance pour les spolier de leurs maigres ressources, sans un avertissement préalable encore moins un arrêt de quelque tribunal que ce soit et surtout en violation de la loi sur la protection des données personnelles. N’est-ce pas des faits assimilables à des actes de vol ou de piratages des comptes appartenant à autrui, qui ne sont que des clients ? Si l’on n’était pas au Mali, une telle opération suffirait pour que toute sa clientèle se détourne d’elle. Mais, il ne nous appartient pas de juger, mais des magistrats payés par les contribuables pour dire le droit, rien que le droit. Il ne s’agit point de protéger un compatriote, mais de dire en toute transparence qu’Orange Mali a oui ou non le droit de rentrer dans les comptes personnels des clients pour se faire payer des services qu’elle a probablement prélevé déjà. Car, chaque transfert se fait contre une redevance 50 FCFA que le client paie à l’opérateur.
C’est dommage qu’une entreprise qui se déclare « citoyenne » se permette de piquer dans les comptes de ses clients. Quelle que soit la gravité de la faute, elle aurait dû patienter et attendre que les professionnels du Droit tranchent. Selon les responsables de l’AMRCR, la plupart des victimes sont des gens sans défense. Ce sont des gestionnaires de tontines de femmes, des comptes des familles des migrants dans les villages très éloignés et des jeunes diplômés qui se débrouillaient pour joindre les deux bouts avec ce petit commerce.
Affaire à suivre
M. A. Diakité