La crise institutionnelle survenue en mars 2012 a eu un impact négatif sur l’environnement des affaires et la perception du risque pays. Le classement global du Mali dans l’édition 2014 du rapport Doing Business s’est détérioré de deux places, passant de la 153e place à la 155e sur 189 pays.
En effet l’amélioration a concerné surtout le paiement des taxes et impôts (+13 points), indicateur pour lequel le classement du Mali est passé de 170e à 157e tandis que les reculs ont été enregistrés pour les indicateurs concernant la création d’entreprises (-17 points), les procédures d’octroi de permis de construire (-13 points), de transfert de propriété (-10 points), de règlement d’insolvabilité (-9 points) et de raccordement à l’électricité (-3 points). Quant à l’indicateur sur la protection des investisseurs, il est resté stable avec un rang de 147e place.
En outre, le coût pour la création d’entreprise au Mali (76.7 %) est plus élevé que la moyenne pour l’Afrique Subsaharienne (67.4 %) même si le nombre de procédures (5) et le délai (11 jours) requis sont faibles comparés à la moyenne pour l’Afrique Subsaharienne (8 procédures et 29.7 jours. De manière générale, les difficultés au Mali sont plus liées au coût relativement élevé qu’au nombre de procédures et aux délais.
Le Mali a adopté un nouveau code des investissements en 2012, dont la mise en œuvre a été entravée par la crise politico-institutionnelle de 2012, devrait contribuer à assurer la viabilité du secteur privé et sa capacité à promouvoir la croissance économique.
Secteur financier
Le système bancaire malien est composé de treize banques commerciales et deux établissements financiers. Les sept plus grandes banques du pays représentent 82 % du total des actifs. Le ratio de solvabilité moyen se situe à 11 %. L’appartenance du Mali à la zone UEMOA contribue à sa stabilité financière. La surveillance prudentielle par la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC), indépendante du pays, joue également un rôle important dans cette stabilité.
La crise sécuritaire et constitutionnelle a fortement pénalisé le secteur financier en 2012 en raison notamment de la fermeture des agences bancaires dans les trois régions du nord du pays.
D’après l’analyse des indicateurs du système financier le pays est comparable à la plupart des membres de l’UEMOA. En revanche, les taux d’intérêts débiteurs maliens se situent toujours au-dessus de la moyenne de la zone. Sur la base d’enquêtes mensuelles réalisées auprès des établissements de crédit, le taux d’intérêt moyen au Mali se situe à 8.92 % en 2013 contre 9.01 % en 2012. Pour la zone UEMOA, ce taux a atteint 7.72 % en 2013 contre 8.00 % en 2012. Les crédits à l’économie malienne en 2013 totalisent 1 216 milliards XOF contre 1 099.2 milliards en 2012.
Quant au pourcentage de crédits alloués au secteur privé par rapport aux crédits à l’économie, il se situe à 55.3 % en 2013 et 83.2 % en 2012. De façon générale, la contribution du secteur bancaire au financement de l’économie demeure faible : le ratio des crédits à l’économie sur le PIB était de 22.4 % en 2011 et 2012, et de 21.4 % en 2013 contre 28.3 % au Ghana et 103 % au Maroc.
En termes d’accès aux services financiers, le gouvernement poursuit la mise en œuvre du plan d’action adopté par le Conseil des Ministres de l’UEMOA en 2007 en vue de porter le taux de bancarisation à 20 % en 2012. Pour le Mali, ce taux atteint 6.9 % en 2013 contre 6.1 % à fin décembre 2012. Le pourcentage de la population qui a accès aux services financiers reste très faible : 20.7 % à fin 2013 contre 17.2 % à fin décembre 2012, y compris les services offerts par les institutions de micro finance.
À l’instar des autres pays de la zone, il n’y a pas de restrictions aux paiements et transferts afférents aux transactions internationales courantes. En vue de favoriser le crédit bancaire aux petites et moyennes entreprises, le gouvernement, en collaboration avec la BCEAO, étudie la possibilité de mettre en place un registre des garanties bancaires accessible à tous et permettant la réalisation accélérée de ces garanties en cas de non remboursement des emprunts.
Gestion du secteur public, institutions et réformes
Le Cadre stratégique pour la croissance et la réduction de la pauvreté (CSCRP) est le cadre unique de référence à moyen terme de la politique de développement du Mali et le principal référentiel pour l’ensemble des partenaires techniques et financiers. Un CSCRP 2012-17 a été approuvé en décembre 2011. Il est bâti autour de trois axes stratégiques à savoirla promotion d’une croissance accélérée, durable, favorable aux pauvres et créatrice d’emplois et d’activités génératrices de revenus ;le renforcement des bases à long terme du développement et l’accès équitable aux services sociaux de qualité et le développement institutionnel et la gouvernance.
Les efforts des autorités pour améliorer la gouvernance dans toutes ses dimensions tardent à donner des résultats. La situation s’est fortement dégradée avec la crise qu’a connue le pays en 2012, et les progrès réalisés, notamment dans le cadre du Plan d’action gouvernemental pour l’amélioration et la modernisation de la gestion des finances publiques (PAGAM-GFP 2011-2015), ont été fragilisés. Selon l’évaluation des politiques et des institutions du pays réalisée par la Banque africaine de développement, la notation du Mali s’est établie à 4.0 en 2012 (contre 4.2 en 2011). Pour la gouvernance, sa note atteint 3.9 en 2012 (contre 4.1 en 2011).
En outre, le classement du pays selon l’Indice Mo Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG) s’est détérioré : il est passé de la 22e place (avec un score de 53.6 sur 100) en 2011 à la 27e place (avec un score de 50.7) en 2012. Comparé à l’Afrique et à la région ouest africaine, le score IIAG du Mali est inférieur à la moyenne de l’Afrique (51.6) et à la moyenne de l’Afrique de l’Ouest (52.5).
Par ailleurs, la perception de la corruption demeure élevée. Le Mali est classé 127e sur 177 pays en 2013 avec un score de 28 selon l’Indice de perception de la corruption de Transparency International.
De manière générale, les autorités ont l’intention d’accroître la transparence dans l’ensemble des administrations publiques face aux citoyens. C’est l’objectif de la loi contre l’enrichissement illicite et qui incluse en son sein une disposition exigeant une déclaration annuelle de la richesse personnelle pour les hauts fonctionnaires.
Gestion des ressources naturelles et environnement
Les efforts se poursuivent pour inclure la dimension environnementale dans toutes les stratégies et politiques sectorielles de développement. Le gouvernement a ratifié tous les instruments juridiques internationaux dans le domaine de la protection de l’environnement notamment la Convention africaine sur la conservation de la nature et des ressources naturelles, la Convention relative aux zones humides d’importance internationale, la Convention sur la diversité biologique, la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification et la Convention cadre sur les changements climatiques. Il a mis en place des politiques et programmes, notamment la Politique nationale de protection de l’environnement, la Politique nationale de gestion des ressources naturelles, le
Programme national de lutte contre la désertification et le Cadre stratégique d’investissement pour la gestion durable des terres. En 2011, une Politique nationale sur les changements climatiques a été élaborée, ainsi qu’une stratégie nationale et son plan d’action ; cependant, en raison du coup d’état, elles n’ont jamais été approuvées officiellement par le gouvernement.
Les aspects de gestion de l’environnement et des changements climatiques ont été intégrés dans le CSCRP 2012-17 sur la base d’évaluations environnementales stratégiques (EES) sectorielles ; la question de l’intégration de ces aspects dans le programme d’action prioritaire est restée en suspens en raison des évènements politiques. Début 2012, le gouvernement a été très actif dans la préparation d’un cadre stratégique pour la croissance verte au Mali et la mise en place d’un Fonds malien pour le climat ; cet engagement constitue un exemple pour les autres pays africains, notamment dans la sous-région. Malheureusement, la situation politique n’a pas permis l’opérationnalisation de ces éléments. De plus, en 2012, le ministère de l’Environnement n’aurait reçu que 10 % du budget annuel prévu, ce qui n’a pas permis de mettre en œuvre les activités planifiées.
Les Nations Unies ont lancé mi-2012 une Étude des effets de la crise sociopolitique sur les populations pauvres, la gestion des ressources naturelles et environnementales dont les résultats sont en cours devalidation.
Contexte politique
Sur le plan politique, la situation s’est normalisée grâce à la tenue d’élections présidentielle et législatives transparentes en 2013.
Notons que le Mali a connu la plus grave crise politico institutionnelle de son histoire en 2012 avec un coup d’état perpétré le 22 mars 2012 par une junte militaire et l’occupation, durant neuf mois, des régions du nord du pays par les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et des groupes islamistes armés. Pour sortir de cette crise, les autorités de transition ont adopté une feuille de route avec deux principaux objectifs : le rétablissement de l’intégrité territoriale du pays par la reconquête du nord et l’organisation d’élections générales transparentes et crédibles avant le 31 juillet 2013.
Ainsi, le scrutin présidentiel a effectivement été organisé le 28 juillet pour le premier tour et le 11 août pour le second tour dans un contexte calme avec une participation très bonne (en moyenne 48.66 %). Il s’est conclu par la victoire d’Ibrahim Boubacar Keita avec 77.61 % des voix.
Les législatives se sont également bien déroulées le 24 novembre et le 15 décembre, et ont permis l’élection de 147 députés. Le bon déroulement de la présidentielle et des législatives a permis de mettre fin à la période de transition politique et de retrouver une vie constitutionnelle normale.
Sur le plan sécuritaire, la situation s’est améliorée. La progression des groupes islamistes armés vers le centre du pays a été stoppée en janvier 2013 et les régions du nord ont été libérées grâce à l’intervention des forces françaises (opération SERVAL) et à l’appui des troupes des pays de la CEDEAO et du Tchad. En juillet 2013, afin de consolider la paix et la sécurité dans les territoires libérés, la communauté internationale a mis en place une force internationale dans le cadre de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA). Toutefois, si l’ensemble de ces interventions ont permis d’affaiblir les groupes extrémistes, ils demeurent actifs, avec notamment des attaques sporadiques et des attentats suicides. Le problème sécuritaire persiste en particulier dans la région de Kidal où la tension est vive.
Dans un souci de consolider le processus de réconciliation nationale et la cohésion sociale, le gouvernement a entrepris des efforts considérables : libération des prisonniers appartenant aux combattants des groupes armés ;levée des mandats d’arrêt à l’encontre de certains membres du MNLA et du Haut conseil pour l’unicité de l’Azawad (HCUA) ;tenue d’une série de consultations nationales sur la situation dans le nord du pays notamment les États généraux de la décentralisation, les Assises nationales sur le nord et le Forum local et régional de Gao.
Ces différentes réunions, qui ont réuni les représentants des pouvoirs publics, des communautés locales, des réfugiés maliens dans les pays voisins, des experts et des partenaires au développement ont permis d’échanger et de proposer des solutions par rapport à l’approfondissement de la décentralisation, la promotion de la bonne gouvernance, le renforcement du dialogue national et de la réconciliation intercommunautaire et intracommunautaire, le développement économique et social. Les partisans du MNLA et du HCUA n’ont pas pris part à ces différentes rencontres arguant que tout dialogue national devrait être organisé en consultation avec les parties à l’accord préliminaire signé à Ouagadougou. Il est donc urgent pour les autorités maliennes de trouver les voies et moyens de relancer les négociations avec les groupes armés en vue de la mise en œuvre de cet accord de paix.
Avec les pourparlers inter-maliens en cours à Alger pour une sortie définitive de la crise, il y a de l’espoir que l’économie malienne rebondisse.
Dieudonné Tembely Info-SEPT