Gestion des baux à l’Office du Niger : Quand la société Rajaa se trompe de combat

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Détentrice d’un bail de 564 ha, la société Rajaa au lieu de mettre en valeur ces parcelles les loue à des particuliers à 150 000 FCFA par ha contre 46 900 FCFA au prix de l’Office du Niger. Elle empoche ces sous sans payer la redevance eau. Conséquence, les paysans bénéficiaires de ces parcelles mettent la pression sur le patron de Rajaa, Sidi El Moukhtar Mounta. Motif : ils n’ont pas droit à la caution pour l’enlèvement des engrais subventionnés à 12 500 FCFA, malgré le paiement des frais de location des parcelles qu’ils versent à Rajaa. Acculé par de pauvres paysans, le patron de Rajaa s’attaque, à son tour, à l’Office du Niger à qui il doit près de 74 millions de FCFA pour les arriérés de la redevance eau.

Amadou Boye Coulibaly, PDG Office du Niger

Héritier du tout premier bail (1760 ha) de l’histoire de l’Office du Niger, attribué  à son défunt père Sidi Békaya Kounta le 24 octobre 1985, Sidi Al Moukhtar Kounta n’est jamais arrivé à mettre en valeur ses parcelles. Ainsi, cinq ans après la signature du bail en question, la direction générale de l’Office du Niger sous la conduite, en son temps, d’un certain Moussa Léo Sidibé, actuel ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche, s’est vu obligée de réduire ledit bail à 564 ha à la suite d’un accord signé le 28 mars 1990 entre les deux parties.

Après dix ans d’hibernation, le fameux dossier est revenu sur la table de discussion, plus précisément le 9 janvier 2001 lors d’une réunion entre l’Office du Niger avec à sa tête, Youssouf Kéïta, alors PDG de l’entreprise et la société Rajaa représentée par Sidi Al Moukhtar Kounta. La réunion a porté sur les ambitions de Rajaa, le devenir du reliquat des superficies et la liquidation du passif de la société concernant la redevance eau qui s’élevait à 19 millions de FCFA pour les campagnes agricoles 1996-1997, 1997-1998 et 1998-1999. Ainsi, le 29 septembre 2001, soit 8 mois après la rencontre, Rajaa demande à l’Office du Niger un moratoire de 5 ans pour s’acquitter de sa redevance eau “consécutive à la mauvaise gestion de son ex-représentant”. Cette expression est de Sidi Al Moukhtar lui-même qui a demandé à l’Office du Niger de lui accorder “une chance supplémentaire de faire ses preuves“.

Ainsi, l’on a procédé à l’établissement d’un autre accord portant sur l’attribution de 300 ha à  Rajaa à partir de la campagne agricole 2001-2002, l’engagement de la société à payer la totalité de la redevance eau des 300 ha et l’installation par l’Office du Niger des exploitants sur le reliquat du bail qui fait 264 ha pour une période de deux ans à compter de la campagne 2001-2002 . A la fin des deux campagnes agricoles, les parcelles devraient être remises à Rajaa si elle avait pu réunir les conditions techniques et financières nécessaires pour la bonne exploitation de l’ensemble des parcelles.

Pour le paiement des 19 millions de F CFA représentant la redevance eau des trois campagnes agricoles de 1996 à 1999, il était question que Rajaa les paye en 5 tranches, soit 3 millions de F CFA pour la première tranche et 4 millions de F CFA par an pour les quatre dernières années. Le procès verbal de ces accords a été signé par le PDG d’alors Youssouf Kéïta et Sidi El Moukhtar Kounta. Aucun de ces engagements  n’a été concrétisé par Rajaa.

Un ha loué à 150 000 FCFA au lieu de 46 900 FCFA

Face à la situation, l’Office du Niger s’est vu obligée d’adresser, en 2007, une lettre de mise en demeure à Sidi El Moukhtar qui loue les parcelles à 150 000 FCFA par ha alors que l’Office les facture à 46 900 FCFA par ha. Pire, le patron de Rajaa oblige les producteurs à qui il loue ses parcelles de le payer urbis sur ongle. Des factures de paiement sont disponibles pour attester la pratique à laquelle se livre Sidi El Moukhtar. C’est dans ces conditions que l’Office du Niger décide de saisir le tribunal de Macina, localité qui abrite le bail, afin de résilier le contrat. Ainsi, le patron de Rajaa va frapper à toutes les portes y compris celle du président de la République d’alors, Amadou Toumani Touré pour que l’Office sursoie à la procédure judiciaire. Ce qui fut fait en 2008 avec un nouveau protocole d’accord à la demande de Sidi El Moukhtar qui avait juré, la main sur le cœur, de régler les passifs. Dans ce protocole, le patron de Rajaa reconnait “devoir bien et légitimement à l’Office du Niger la somme de 73 926 550 FCFA représentant les arriérés de la redevance eau depuis la campagne agricole de 1996 à 2009“. Ce qui est confirmé par le PDG Seydou Idrissa Traoré qui a remplacé Youssouf Kéïta à la tête de l’Office du Niger.

Pour le paiement de cette somme, l’accord donne un autre moratoire à Rajaa sur cinq échéances provisionnelles annuelles de 14 785 310 FCFA  payables avant le 31 mars 2009, sans préjudice du payement régulier de la redevance eau de la campagne qui était en cours. Aussi, l’accord indique qu’ “en cas de non respect d’une seule échange, le bail sera résilié. En cas de remboursement par voie judiciaire, le solde exigible sera augmenté de 10% pour couvrir les frais administratifs et judiciaires, sans préjudice des dommages et intérêts“. Pour éviter toute autre interprétation, l’Office du Niger a fait homologuer le protocole d’accord signé par le jugement n°008 du 28 janvier 2010 du tribunal de Macina. Ainsi, ledit protocole d’accord a eu force de loi.

Face à cette nouvelle mesure de l’Office, la société Rajaa a eu le dos au mur. Pour une fois, elle a honoré une partie de ses engagements en s’acquittant de la première tranche des cinq échéances annuelles par le paiement de 14 785 310 FCFA pour les arriérés de la redevance eau en plus des 26 451 600 FCFA pour celle des 564 ha, soit 46 900 FCFA par ha.

A la veille du paiement de la deuxième tranche des cinq échéances, Sidi Moukhtar se rebiffe et attaque l’Office du Niger devant le tribunal de Macina pour dénoncer l’accord qu’il a pourtant signé et qui a été homologué par le tribunal pour “non respect des engagements” (sic). Le procès a commencé le 23 janvier 2011. De cette date à nos jours, l’affaire va de renvoi en renvoi à la demande de Rajaa qui joue au dilatoire. Car, la société change constamment d’avocats qui demandent, sans cesse, à prendre connaissance des dossiers.

Les dessous de l’affolement de Sidi Moukhtar Kounta 

Ce qui fait affoler aujourd’hui le patron de Rajaa, c’est que l’Office du Niger refuse de donner des cautions pour l’enlèvement des engrais dans le cadre de l’initiative riz pour la campagne en cours aux paysans installés sur les parcelles de Rajaa. Motif : Sidi Moukhtar refuse de payer la redevance eau dont le montant s’élève à près de 74 millions de FCFA quand bien même il empoche les frais de location de ses parcelles aux paysans, soit 150 000 FCFA par ha alors que l’Office du Niger lui facture un ha à 46 900 FCFA.

Aussi, faut-il le rappeler, pour avoir la caution pour l’enlèvement des engrais, le paysan doit présenter  le reçu de paiement de la redevance eau. Ce qui n’est pas le cas de Rajaa qui doit aujourd’hui à l’Office du Niger environ 74 millions de FCFA. Ainsi, ce sont les bénéficiaires de la location des parcelles de Rajaa qui coupent le sommeil à Sidi Moukhtar Kounta parce qu’ils n’ont pas droit à la caution pour l’enlèvement des engrais subventionnés pour la simple raison que  Rajaa ne verse pas le moindre centime à l’Office du Niger pour la redevance eau.

N’ayant pas les cautions pour l’enlèvement des engrais subventionnés à 12 500 FCFA par sac de 50 Kg, des paysans bénéficiaires des parcelles de Rajaa font la pression sur Sidi Moukhtar Mounta qui empoche les frais de location de ses parcelles sans payer la redevance eau à l’Office du Niger.

Afin de tirer la couverture à soi, le patron de Rajaa fait savoir à qui veut entendre qu’il n’y a pas d’engrais pour les paysans de l’Office du Niger tout en prédisant une campagne agricole catastrophique si rien n’est fait pour l’approvisionnement correcte des paysans en engrais. Ainsi, il tient l’Office du Niger responsable de la situation tout en s’attaquant à son PDG, Amadou Boye Coulibaly et à certains de ses agents dans une missive signée le 23 juillet 2012 adressée à qui de droit et publiée par une certaine presse de la place

Alassane DIARRA

 

De l’engrais subventionné, il y en a, mais pas pour un mauvais payeur de la redevance eau  

La rumeur selon laquelle il n’y a pas d’engrais ou que l’Office du Niger refuse de donner de l’engrais aux paysans n’est pas du tout fondée. Un tour à Niono, ville considérée comme le poumon de l’Office du Niger, nous a suffit pour nous rendre compte de la réalité.

Diadié Bah, PDG Gnoumani SA

Déjà à l’entrée de la ville ce mercredi 8 août dernier, des camions de 60 tonnes de Gnoumani Sa de l’opérateur économique Dadié Bah perturbent la circulation. Ils sont venus ravitailler les magasins de Niono, N’Débougou, Molodo, Dogofri et Diabaly. Auparavant d’autres camions avaient déjà ravitaillé les zones de Kolongo, Macina et M’Béwani.

Interrogé sur le problème du ravitaillement des marchés en engrais, Diadié Bah, le PDG de Gnoumani Sa indique que sa société dispose d’importantes quantités et de qualité d’engrais aux prix de l’initiative riz, c’est-à-dire subventionnés. “A chaque voyage, nous acheminons 3000 tonnes d’engrais via Abidjan ou Dakar. Toute chose qui nous coûte plus d’un milliard de FCFA pour les frais de dédouanement. Aujourd’hui, Gnoumani Sa est le seul fournisseur qui couvre l’ensemble des zones de l’Office du Niger et qui accepte de prendre les cautions pour l’enlèvement des engrais subventionnés. Nous avons même été sollicités pour venir au secours de l’Office Riz Ségou qui a besoin de 2000 tonnes. Nous sommes également prêts à intervenir dans les zones CMDT“.

Koké Diarra président du Sagripon, un des syndicats des paysans de l’Office du Niger confirme les propos de Diadié Bah en ce qui concerne l’Office du Niger. Il ajoute volontiers que “Diadié Bah est pratiquement le seul fournisseur  qui a accepté les cautions de l’Etat, malgré les difficultés de recouvrement de ses factures. Il sert même d’intermédiaire entre les paysans dont les coopératives ne sont pas solvables et les banques et institutions financières en sa qualité de président de la Chambre agriculture de Niono et membre de la chambre régionale“. Pour le syndicaliste, “la direction de l’Office du Niger joue toute sa partition dans le cadre de l’accompagnement et l’encadrement des paysans“.

Pour tout dire : de l’engrais subventionné, il y en a, mais pas pour un mauvais payeur de la redevance eau. D’ailleurs, on se rappelle de la célèbre expression de l’ancien PDG de l’Office du Niger, Seydou Idrissa Traoré à savoir “celui qui ne paye pas la redevance eau sera chassé des terres de l’Office du Niger“.  Aussi,  comme le prévoyait cet autre ancien PDG de l’Office du Niger, Kassoum Denon «tous beaux non mis en valeur doivent être resiliés».  Les deux cas sont pratiquables à Sidi Moukhtar Mounta.

Des fournisseurs d’engrais courent encore derrière leurs sous

Annoncé à coup de tapage médiatique, le paiement des factures des fournisseurs n’est pas encore effectif et cela malgré les assurances du Premier ministre “de pleins pouvoirs” Cheick Modibo Diarra. Selon de sources concordantes, “des reliquats de 2010 et de 2011 existent” à cause de la lourdeur administrative pour ne pas parler de dilatoire.

A ce sujet, le PDG de Gnoumani Sa accuse la direction nationale de l’Agriculture d’être à l’origine du blocage.

                                                Alassane DIARRA

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2 COMMENTAIRES

  1. c’est ce qu’on appel la cupidité journalistique. un journaliste doit etre impartiel………… va lire le code de déontelogie tu as en besoin. Toule monde connait la boite salle l’office du niger.c’est uniquement composé de corrupteurs et d’élegants financers. le amadou boye coulibaly qui ne le sait pas? sa place c’est la prison

  2. SOS pour ces centaines d’agents de Air Mali licienciés abusivement sans plan social par une Direction qui veut detruire des centaines de foyers et mettant des chefs de famille à la porte en cette periode de crise

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